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La révolte par le cinéma dans Superstar

Photo: Métropole films
Jérôme Vermelin - Métro France

Rencontre avec Xavier Giannoli, réalisateur du film français Superstar, satire troublante de la célébrité.

Superstar est inspiré d’un livre de Serge Joncour, L’idole. Qu’en avez-vous gardé?
Ce qui me plaisait dans le roman, c’était l’idée d’un homme qui se réveille en créature mutante, kafkaïenne, qui va devenir célèbre en essayant de comprendre pourquoi il l’est devenu. Après avoir rencontré l’auteur, j’ai décidé d’ajouter l’idée de l’homme qui ne veut pas s’intégrer. Qui veut garder une dignité dans ce déchaînement de bêtises. Et qui, en refusant le système… se retrouve encore plus dans le système. Bref, il n’a plus le choix de dire non. La célébrité devient une porte d’entrée pour un voyage dans notre époque.

Comme dans À l’origine, votre film précédent, l’intrigue repose sur un malentendu autour du héros. Même si, cette fois, il en est la victime. C’est un thème qui vous plaît?
Disons que les deux films auraient pu s’appeler L’homme de la situation (sourire). De façon générale, ce qui m’intéresse, c’est la tension entre la vérité humaine et la comédie sociale. Un des mes romans préférés dans la littérature contemporaine, c’est Pastorale américaine, de Philip Roth. À un moment donné, il y a un passage sur le malentendu qui m’a ému aux larmes. On trouve ça aussi dans L’homme qui voulait être roi, de Kipling, adapté au cinéma par John Huston. Cette idée d’un homme qui finit par se demander si le mensonge qu’il incarne n’est pas la vérité de ce qu’il est.

Kad Merad, c’était l’homme de la situation?
J’ai écrit le film pour lui. On se connaît depuis très longtemps, et j’attendais de trouver l’idée qui permettrait de dévoiler quelque chose de son talent qu’il n’avait pas encore montré. À la fois dans la drôlerie et dans l’émotion. Ce que j’aime en tant que spectateur, c’est lorsqu’une personne que je croyais connaître révèle soudain une dimension que j’ignorais. Ou que j’avais oubliée. Ç’a été le cas avec Gérard Depardieu dans Quand j’étais chanteur, ou avec François Cluzet dans À l’origine.

Kad n’a pas été épargné par la critique ces derniers temps. Vous qui le connaissez bien, trouvez-vous qu’il a trop tourné dans la foulée du succès des Ch’tis?
Quand on dit qu’on le voit trop, je trouve ça très injuste. Il y a d’autres acteurs qui ont été désignés comme des «gens chics» et qui tournent beaucoup plus que lui. Et personne ne leur en veut lorsque les films n’ont pas de succès! Il y a peut-être eu un emballement de la part de Kad, mais, à ma connaissance, avant Superstar, il n’avait rien fait depuis un an. Pour moi, c’est difficile de parler de lui, car c’est quelqu’un que je connais depuis 15 ans. C’est un ami, et je voulais que les gens le voient dans ce qu’il peut faire de mieux.

Le film n’est pas très tendre avec les médias. Et dénonce ces icônes éphémères qu’on fabrique jour après jour…
C’est amusant d’entendre un journaliste dire ça! Ce qui me fait rire et m’afflige en même temps, c’est de voir à la une d’un magazine une star faire la promo de son film, et quelques pages plus loin, la même star faire la pub d’un parfum. Aujourd’hui, les stars sont à vendre, elles sont soumises aux valeurs commerciales alors qu’avant elles étaient insoumises, elles avaient une dimension sacrée et fascinante. Pour moi, le cinéma devrait être un cri de révolte… et un éclat de rire devant ce système qui a tendance à triompher des valeurs humaines.

Superstar
En salle dès vendredi

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