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Les jeunes de Montréal ne jurent que par le télétravail

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Photo: Unsplash

Le retour des travailleurs au centre-ville de Montréal pourrait ne pas se faire de sitôt. Les jeunes employés qui sont en télétravail appuient très largement ce mode de travail, tandis que près de la moitié souhaiterait en faire davantage. Les villes voient aussi une large partie des jeunes travailleurs envisager de s’exiler en région.

C’est ce que révèle la quatrième enquête Travaillons ensemble du Regroupement des jeunes chambres de commerce du Québec, en collaboration avec la firme de sondages Léger. Dans un contexte de relance du centre-ville de la métropole, ce sondage montre que les jeunes travailleurs de 35 ans et moins qui télétravaillent sont 85% à souhaiter ne pas vouloir retourner complètement au bureau.

Il s’agit d’une génération «paradoxale», affirme la co-présidente et associée principale du cabinet La Tête chercheuse, Elisabeth Starenkyj. Les jeunes sont fous de télétravail, mais sont plus nombreux que les 36 ans et plus à avoir du mal à concilier travail et vie familiale. C’est le cas de 30% d’entre eux. Ils sont également seulement 43% à juger avoir un bon état de santé mentale, contre 54% de leurs aînés.

Par ailleurs, les jeunes travailleurs prennent davantage de décisions professionnelles par rapport à leur vie personnelle. Ils jugent l’épanouissement personnel plus important que leur revenu, mais le salaire reste leur premier critère pour chercher un emploi, loin devant les conditions de travail et le respect de leurs valeurs. La crise de l’inflation a d’ailleurs fait augmenter la part des jeunes valorisant leur salaire.

Télétravail souhaité, flexibilité recherchée

Ce ne serait pas tant le télétravail que l’hyperflexibilité qu’il permet qui séduit les jeunes, s’avance le vice-président directeur de Léger, Christian Bourque. «Ça existait avant la pandémie», constate-t-il, citant l’essor important des cafés de travail collaboratif. Il juge que pour certaines entreprises comme la sienne, dans le domaine de la recherche, un retour obligatoire au bureau serait suicidaire.

Dans les grands centres urbains du Québec, 41% des jeunes envisagent de quitter la ville s’ils pouvaient ne faire que du télétravail. Un effondrement très net en l’espace de quelques mois, car ils étaient 54% à envisager cette option en septembre 2022. Mais l’attrait de l’exode urbain continue de se faire sentir, même un an après la fin de toutes les mesures pandémiques, qui avait amené Montréal à connaître un solde migratoire négatif.

Productifs ou stressés ?

Récemment, la banque RBC a instauré du travail en présentiel obligatoire, notant une baisse de productivité en télétravail. Une situation à l’opposée des constats de Mme Starenkyj qui entrevoit que les jeunes employés travaillent plus fort à distance et se mettent de la pression. Le travail est moins organique qu’en présentiel, avec la socialisation y compris lors des pauses café, et il faut donc compenser, analyse-t-elle.

Cette pression que les jeunes employés se mettent est à comparer avec l’anxiété qu’ils ressentent. Elisabeth Starenkyj croit que cette génération est dépassée par des enjeux globaux, comme les changements climatiques, et se sent perdue. Les jeunes salariés veulent avoir un impact, mais le respect de leurs valeurs n’est que le premier critère de choix d’un emploi pour une toute petite minorité.

Les jeunes ont dû faire face à deux crises majeures, la pandémie puis la surinflation, sans aucune pause entre les deux, ce qui expliquerait leur état de santé mental, pense M. Bourque. Il faut tout de même noter que les jeunes de 18 à 24 ans sont plus enclins au retour en présentiel, que ceux de 25 à 35 ans, précise le PDG du RJCCQ, Pierre Graff. Cela pourrait justement être lié à leur besoin de socialisation étant donné qu’ils vivent plus souvent seuls et sans famille.

Changer le travail?

Pour faire revenir les jeunes au bureau, il faut les stimuler, préconise M. Graff. «Les employés ne veulent pas faire au bureau ce qu’on fait à la maison», explique-t-il. Il parle ici d’activités aussi vastes que des dîners organisés, des réunions de remue-méninges ou plus surprenante, une activité sportive entre collègues.

Pierre Graff estime que les pouvoirs publics municipaux pourraient aider les entreprises pour inciter leurs employés à revenir au bureau, s’ils veulent revitaliser leurs quartiers d’affaires. Montréal doit ainsi faire face à un centre-ville avec des bureaux de plus en plus vides, et donc moins de travailleurs pour y faire vivre les commerces. Le centre-ville de la métropole est d’ailleurs amené à diversifier ses usages, alors qu’il accueille de plus en plus d’habitants.

D’autres changements d’organisation se font sentir dans le milieu du travail. La jeune génération plébiscite également largement la semaine de 4 jours, qu’elle soit avec maintien ou baisse du salaire, une énième situation paradoxale. Ils veulent également plus de congés et n’hésitent pas à en prendre sans solde, ce qui est toujours autant contradictoire avec leurs envies d’un meilleur salaire.

Les entreprises s’adaptent à ces changements importants en instaurant de nombreuses semaines de congés après un certain temps d’ancienneté. «Avoir seulement les deux semaines légales de vacances est devenu rare», constate M. Graff. Également, les journées de maladies sont de plus en plus remplacées par des congés personnels, remarque Élisabeth Starenkyj. Les jeunes employés n’ont pas peur d’en prendre pour prendre soin d’eux, en allant au spa par exemple, observe-t-elle.

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