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Coronavirus : une éclipse médiatique plus forte que le 11 septembre 2001

La crise sanitaire du coronavirus a occupé plus de 89% du contenu des médias au Québec, tout angle de couverture confondu. Photo: Métro

La crise sanitaire causée par la propagation du coronavirus reçoit une couverture médiatique «sans précédent». Impossible d’échapper au déferlement de nouvelles déclinées sous tous les angles imaginables. Mais attention. Il faut savoir doser l’information que l’on consomme, car elle peut très bien devenir anxiogène.

«Il n’y a rien de comparable depuis le début des années 2000», soutient Jean-François Dumas, président d’Influence Communication.

Ni la catastrophe ferroviaire de Lac-Mégantic. Ni l’attentat de Québec. Ni même les attaques terroristes du 11 septembre 2001

La firme qui analyse les médias québécois, canadiens du reste du monde a calculé que lors des sept jours précédant le 18 mars, la crise sanitaire du coronavirus a occupé plus de 89% du contenu des médias au Québec, tout angle de couverture confondu.

Il s’agit d’une véritable «éclipse médiatique», selon M. Dumas. Ce phénomène fait en sorte qu’une nouvelle occupe tellement d’espace qu’elle fait ombrage à toutes les autres.

Aucun événement majeur des 20 dernières années n’a eu le même effet d’obscurcissement.

Certaines nouvelles liées au coronavirus passent sous silence tellement les angles de traitement se multiplient.

«Par exemple, il y a beaucoup de pertes d’emploi. Dans la plupart des cas, c’est lié aux à la crise. Et il y en a tellement que les médias n’en parlent tout simplement pas», souligne-t-il.

Le phénomène n’est pas exclusif au Québec.

«Chaque jour, les quotidiens du monde entier publient l’équivalent d’un journal qu’on pourrait remplir avec uniquement des articles sur le coronavirus, et qui serait publié sept jours sur sept pendant 37 ans» Jean-François Dumas, président d’Influence communication

Crise à l’ère du numérique

À l’ère des médias numériques et des réseaux sociaux, une crise de cette ampleur est du jamais vu, selon Bruno Guglielminetti, consultant en stratégie de communication numérique qui a travaillé 23 ans à Radio-Canada.

Dans ce contexte, il croit que les pouvoirs publics ont notamment su bien utiliser les réseaux sociaux pour communiquer les consignes aux citoyens.

«Ça leur permet d’avoir une amplification plus importante en rejoignant des gens qui ne sont pas devant leur téléviseur ou qui sont au travail», observe-t-il. Il donne notamment l’exemple du cri de ralliement lancé par le premier ministre François Legault à l’intention des influenceurs. Une bonne façon de rejoindre davantage les jeunes.

Il ajoute que l’éveil rapide face à la dangerosité du coronavirus est certainement tributaire à la diffusion presque instantanée via les réseaux sociaux de contenu produit dans le monde entier.

«La possibilité d’avoir accès à toutes ces images-là sans attendre que les médias nous les présentent et passent à travers pour faire un tri, ça nous permet d’avoir une idée de l’ampleur. Il y a 20 ans, on n’aurait pas eu accès à ça», conclut M. Guglielminetti.

Doser l’information

Cet accès inégalé à une quantité astronomique de nouvelles n’est pas sans risque pour le public.

Le niveau d’anxiété chez une personne peut être proportionnel à la quantité d’information consommée en lien avec la crise, explique Marie-Pier Ruel, psychologue spécialisée en troubles anxieux au CIUSSS du Nord-de-l’Île-de-Montréal.

Selon elle, il est important d’observer ses propres réactions pour savoir comment l’information nous affecte.

Alors, on éteint l’ordinateur ? Le téléphone intelligent?

Pas si simple de se priver d’outils de communication alors que l’isolement physique semble en voie de devenir la norme.

Il faut donc apprendre à filtrer le contenu soi-même.

«Si on voit qu’on a une fragilité et qu’on s’en fait beaucoup, il n’y a rien qui empêche qu’on puisse préserver de l’information et s’en tenir à l’essentiel de ce qu’on a besoin de savoir» -Marie-Pier Ruel, psychologue

Il faudra aussi privilégier les contacts humains, même à distance.

«On peut se partager des trucs pour se divertir, par exemple. Il faut briser l’isolement le plus possible en restant en contact, notamment avec les aînés qui ne peuvent recevoir de visite en personne».

Pour ceux qui le peuvent, passer du temps à faire activités en famille permettra de décrocher d’un monde médiatique qui peut devenir accablant. «Il ne faut pas juste écouter des séries; le contact humain demeure important.»

L’exemple de Métro

La couverture du coronavirus chez Métro s’est tout aussi drastiquement accentuée lors de la dernière semaine. Du 11 au 18 mars, seuls 21 articles des 120 publiés dans la section «Actualités» du site web du journal ne concernaient pas la maladie. Cette proportion de l’attention portée sur la crise s’est aussi intensifiée, plus la semaine avançait, alors que le monde entier s’est rapidement mis en mode alerte pour contrer la propagation. «À Métro, il est arrivé à quelques reprises que des articles n’ont pas été diffusés parce que la nouvelle a changé du tout au tout pendant qu’on les préparait, témoigne le directeur de l’information, Olivier Robichaud. C’est arrivé notamment le 12 mars, lorsque les annulations d’événements et de cours se sont succédé à un rythme effarant.»

 


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