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COVID-19, aérosols et ventilation: une question qu’on ne peut plus ignorer

une femme dans une aire ouverte avec son masque COVID-19
Les aérosols peuvent contenir des particules de plusieurs tailles, de très petites (respirables) à plus grandes (inhalables). Photo: 123rf

Les scientifiques s’accordent sur un point: le SARS-CoV-2 se transmet principalement d’une personne à une autre par gouttelettes. Par contre, la transmission de la COVID-19 par l’air (ou par aérosols) crée la controverse chez les experts, et des incertitudes au gouvernement. 

Pour sortir de cette situation, Caroline Duchaine, professeure au Département de biochimie, de microbiologie et de bio-informatique de l’Université Laval propose d’abord de s’éloigner de la dichotomie habituelle gouttelettes/aérosols. Et de redéfinir ce que sont les «aérosols» ensuite.  

Avec ce modèle publié dans Clinical Microbiology Reviews, co-rédigé avec Sophie Zhang, co-chef de centres de soins de longue durée au CIUSSS Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal, Mme Duchaine veut simplement qu’on puisse reconnaître la possibilité d’une transmission par aérosols «inhalables.» 

Et ce, afin de mieux protéger la population. 

Selon leur revue de la littérature scientifique, les principaux modes de transmission de la COVID-19 seraient donc les gouttelettes traditionnelles et ces aérosols «inhalables»-là. 

Ceux-ci ne ressemblent pas aux aérosols respirables dits «classiques», qui, s’ils sont présents, semblent peu susceptibles d’être significatifs en matière de transmission, selon plusieurs études qu’elles ont compilées.

Que change ce nouveau modèle?

Selon le modèle qu’elles proposent, la taille de ces particules, tout comme leur concentration en virus et leur potentiel d’infectiosité, se situent en fait sur un continuum. 

Les aérosols peuvent contenir des particules de plusieurs tailles, de très petites (respirables) à plus grandes (inhalables).

Si les gouttelettes tombent sur les surfaces, les aérosols «inhalables», demeurent en suspension dans les airs. Lorsque ce type d’aérosols «inhalables» s’accumulent dans les endroits mal ventilés, l’infection peut donc se produire. 

Ce nouveau modèle expliquerait les contradictions voulant qu’il y ait le virus dans l’air et une transmission entre individus sans contact, sans qu’on observe pourtant de solides preuves cliniques d’une transmission aérienne classique. 

Et donc bien des cas de transmission dans des chorales et des restaurants. 

«Les aérosols inhalables présentent une distance de déplacement et un temps de suspension dans l’air plus courts que les aérosols respirables tout en ayant un plus grand potentiel d’infection en raison de leur probabilité plus élevée de contenir des virions.» -Caroline Duchaine

Ces aérosols «inhalables» expliqueraient également le mode d’infection observé, selon la chercheuse au Centre de recherche de l’Institut universitaire de cardiologie et de pneumologie.  

C’est-à-dire, une infection qui se fait d’abord le nez, avant de descendre secondairement infecter les poumons. 

Une question de ventilation négligée?

Selon Mme Duchaine, cette question du rôle de l’air et de la ventilation a été jusqu’ici négligée, entre autres dans les écoles ou les milieux de travail. 

«Pourtant, il faudrait agir comme si c’était important et déployer autant d’efforts que pour le port du masque ou la désinfection des surfaces», dit-elle à Métro

Sur ce point, le Ministre de la Santé et des Services sociaux Christian Dubé a changé de discours, mercredi. 

Lors du point de presse, M. Dubé a indiqué que la question de ventilation dans les écoles et lieux de travail faisait partie de ses dossiers du jour. 

«On va se pencher là-dessus. On a déjà demandé à l’INSPQ de nous revenir autant pour les écoles que pour nos établissements. C’est d’autant plus important que s’il faut agir on va agir rapidement.»  – Le ministre Christian Dubé

Et si le virus était dans l’air?

Pour Nathalie Grandvaux, professeure au Département de biochimie et médecine moléculaire de la Faculté de médecine de l’UdeM, le gouvernement ne peut plus ignorer cette question de transmission par l’air, ne serait-ce qu’en raison du principe de précaution. 

«Il faudrait accélérer la prise de décisions, conseille-t-elle dans une entrevue avec Métro. C’est comme dans un procès. Même si on ne peut pas le prouver hors de tout doute, ça ne veut pas dire que cela n’existe pas.» 

Selon Mme Grandvaux, il serait impossible de soutenir un confinement total trop longtemps. Et ce, pour de nombreuses raisons, à commencer par la santé mentale et l’économie. 

«La société doit alors faire des choix sur ce que l’on tolère d’ouvrir ou pas. Et déterminer jusqu’à combien de cas on peut aller sans que cela ne se répercute sur le système de soins et sur les patients avec d’autres enjeux que le virus», explique-t-elle. 

«C’est plus une question de choix de société que de virus en tant que tel. Mis à part le confinement total, rien ne pourrait arrêter un virus qui se transmet par l’air. Il n’y a pas de solution parfaite.»  –  Nathalie Grandvaux, professeure à la Faculté de médecine de l’UdeM

Sans rénover toutes les écoles et CHSLD, il est tout à fait possible d’améliorer la ventilation de plusieurs milieux, note-t-elle.

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