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Six plaintes déposées contre le projet de navette fluviale entre Pointe-aux-Trembles et le Vieux-Port

Linda Gauthier, Martin Dion et Sylvain Plourde, du RAPLIQ, ont affirmé vouloir se battre « jusqu’au dernier souffle » pour faire valoir leurs droits. En arrière-plan, la conjointe de M. Plourde, Ginette Pelletier. Photo: Amélie Gamache/Métro Média

Des membres du Regroupement des activistes pour l’inclusion au Québec (RAPLIQ) ont déposé cet après-midi six plaintes à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse. Ils déplorent avoir été privés d’embarquement à bord de la navette fluviale, le 22 juin dernier, au quai Saint-Jean-Baptiste de Pointe-aux-Trembles.

Selon Linda Gauthier, présidente du RAPLIQ, sur les six personnes désirant monter à bord, «seulement un fauteuil manuel aurait pu monter, s’il avait accepté d’être levé par deux matelots». Les plaignants considèrent l’événement comme «un acte discriminatoire en vertu de la Charte des droits et libertés, pour motif de handicap».

Les plaintes visent le ministère des Transports (MTQ), la Société des Traversiers du Québec (STQ), l’arrondissement de Rivière-des-Prairies-Pointe-aux-Trembles, l’Union des municipalités du Québec (UMQ) ainsi que Croisières Navark, l’entreprise privée assurant le service. Tous ces intervenants avaient préalablement reçu une mise en demeure, mais leurs réponses ont été jugées «évasives» ou «ne représentaient aucun changement ou amélioration en regard de l’accessibilité universelle», selon le RAPLIQ.

«On est tannés de se faire niaiser et d’être considérés comme des citoyens de troisième classe. On demande l’accessibilité universelle, autant au niveau des installations d’embarquement comme les quais, que pour monter à bord de l’embarcation.» -Linda Gauthier, présidente du RAPLIQ

La présidente du RAPLIQ, Linda Gauthier, remet les plaintes à un préposé de la Commission des droits de la personne et de la jeunesse, qui a assuré que l’instance porterait attention au dossier.

Mme Gauthier affirme avoir déjà assez patienté, après avoir fait des interventions au conseil de Ville en 2017, lors du premier projet-pilote, puis de nouveau en 2018, alors que la navette avait été en service pendant une semaine.

«Il s’agit de la première fois en dix ans d’existence que le RAPLIQ va être porteur de dossiers de victime par association, souligne-t-elle. Il y a également des plaintes de conjoints de personnes en fauteuil, car ils n’ont pas non plus embarqué le 22 juin, par solidarité.» Parmi les trois plaignants, seulement trois sont en situation de handicap.

Une accessibilité à améliorer

Des fauteuils roulants sont régulièrement acceptés à bord des embarcations, assure de son côté Normand Noël, président de Croisières Navark, qui admet que des améliorations sont encore à effectuer pour assurer une accessibilité complète.

«On a avancé beaucoup depuis le 22 juin, relève-t-il. Le niveau d’eau était encore très haut à ce moment, alors peut-être a-t-on offert de les assister pour monter, mais maintenant les gens en fauteuil roulant peuvent monter de façon autonome. On dépose une rampe amovible sur le quai et ça permet déjà d’accueillir la plupart d’entre eux. Mais pour certains types de fauteuils, c’est en effet plus difficile.»

La compagnie travaille actuellement sur un nouveau modèle d’embarcation «plus efficace, plus beau et plus confortable» qui sera en fonction l’année prochaine. S’y trouvera notamment un pont unique plat sur la longueur du navire, sans marches d’escalier, ainsi qu’une rampe intégrée qui fera le lien entre le quai et le navire.

Du côté de la Société des Traversiers du Québec, on rappelle que le service «est un projet-pilote» qui «servira à définir les paramètres de service d’une éventuelle navette permanente».

«Il est évident que les besoins variés de la clientèle seront pris en compte dans la définition du service et des infrastructures si celui-ci se pérennise», affirme le responsable des relations publiques de la société, Alexandre Lavoie.

«La STQ tient à rassurer sa clientèle sur le fait que l’accessibilité universelle lui tient à cœur et qu’elle s’efforce de desservir l’ensemble de la population.» -Alexandre Lavoie, responsable des relations publiques de la STQ

Un contrat a d’ailleurs été octroyé à l’organisme Kéroul, organisme référence en matière d’accessibilité universelle, afin que celui-ci soumette à la STQ des recommandations quant aux actions nécessaires pour rendre le service accessible. Le rapport vient d’être remis, et la STQ analyse actuellement ses recommandations.

Un service « partiellement accessible »

La certification octroyée au service actuel de navette par Kéroul est la suivante : Service et infrastructures partiellement accessibles aux personnes à mobilité réduite.

Le rapport a été rédigé par Jonathan Gagnier, conseiller en accessibilité pour Kéroul, qui s’est rendu sur place avec André Leclerc, président-directeur général et fondateur de l’organisme, lui-même en fauteuil roulant, qui a pu monter à bord.

«Mais il y a des obstacles importants, relève-t-il. L’un des deux bateaux, l’Explorateur, est plus problématique. Seulement les gens avec des fauteuils de moins de 68cm de largeur peuvent accéder à l’intérieur. Pour les fauteuils motorisés, ce n’est pas l’idéal.»

L’intérieur de la seconde embarcation, le Nydam, n’est pas accessible aux personnes en fauteuil roulant, mais il est possible d’accéder au pont arrière. Celui-ci n’est toutefois pas couvert ; les passagers ne sont donc pas protégés contre les intempéries. Installer un toit fait d’ailleurs partie des recommandations émises dans le rapport. Kéroul suggère également d’aménager une rampe d’accès qui relie le sol au quai flottant qui s’ajuste en fonction des marées.

D’autres recommandations s’adressent à la municipalité. Le rapport relève notamment une pente abrupte pour se rendre à la billetterie et au quai de la Place du Village.

«Des aménagements, tels une rampe d’accès, pourraient être prévus sur le site, propose M. Gagnier. Mais je crois que les intervenants sont de bonne foi. Les choses s’améliorent et continueront de le faire.»

Le RAPLIQ a également déposé une mise en demeure à l’UMQ, afin que l’instance retire le prix du Mérite Ovation municipale, remis à l’arrondissement dans la catégorie Transport, mobilité et accessibilité, pour les navettes fluviales en mai dernier. La demande a été rejetée par l’UMQ, qui a affirmé dans sa réponse que, bien que sensible aux enjeux d’accessibilité, elle était «fière de soutenir ce projet» qui «est en train d’écrire une nouvelle page dans la reconquête du fleuve en mode transport utilitaire.»

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