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Coronavirus: les conditions d’isolement des détenus sèment l’inquiétude

détenus Bordeaux
Le centre de détention de Montréal (Bordeaux). Photo: Archives Métro

Alors que le gouvernement du Québec met en place des mesures pour prévenir la propagation du nouveau coronavirus dans les établissements carcéraux, des proches et des organismes s’inquiètent des conditions d’isolement des détenus à risque.

Le ministère de la Sécurité publique (MSP) du Québec n’a pu confirmer à Métro vendredi le nombre de détenus dans les établissements carcéraux du Québec qui ont dû être placés en isolement parce qu’ils présentaient des symptômes associés au nouveau coronavirus.

«Considérant que le nombre varie plusieurs fois par jour et dans un souci de préserver la confidentialité des personnes incarcérées entre elles, nous ne diffusons pas ces données», a justifié le MSP par courriel.

La semaine dernière, on en dénombrait toutefois près d’une vingtaine, dont 10 à la prison de Bordeaux, à Montréal, selon des données obtenues par Le Devoir. Un nombre qui a fort probablement augmenté, selon les intervenants questionnés par Métro.

«Ces établissements présentent des défis de salubrité importants. On parle de personnes qui vivent dans la promiscuité et il n’y a pas plus de mesures d’hygiène que d’habitude», déplore à Métro la présidente de l’Association des avocats et avocates en droit carcéral du Québec (AAADCQ), Rita Magloé Francis.

Les détenus à risque

Dans une lettre ouverte, l’Association a récemment fait part de ses craintes que le coronavirus se propage de façon «fulgurante» dans les prisons de la province. 

«Il paraît que les employés qui travaillent dans les cuisines des établissements carcéraux n’ont pas de masques», soulève la porte-parole de la Ligue des droits et libertés (LDL), Lucie Lemonde.

Le MSP, pour sa part, assure avoir mis en place des «procédures de travail sécuritaires» afin de préserver les employés des centres de détention du coronavirus.

«La tension, notamment à Bordeaux, monte énormément. Dès que quelqu’un tousse, les détenus deviennent violents […] Ils ont très peurs.» -Lucie Lemonde, porte-parole de la LDL

Isolement «22 heures sur 24»

Par ailleurs, une aire de quarantaine a été aménagée dans les 17 prisons québécoises. Celle-ci recevra tous les nouveaux détenus pendant 14 jours afin de limiter les risques de propagation du virus. Les proches des détenus ne peuvent également plus visiter ceux-ci depuis le 14 mars.

«Mettre les détenus en confinement, ça veut dire qu’ils sont 22 heures sur 24 en cellule, sans avoir accès à des activités ni accès à un téléphone pour parler à leurs proches. Ces conditions de détention, le gouvernement ne pourra pas les garder à long terme. Ça va avoir des conséquences dramatiques», prévient néanmoins Mme Magloé Francis. 

Métro a d’ailleurs pu joindre la femme d’un détenu de la prison de Bordeaux qui est actuellement en isolement «depuis cinq jours».

«C’est dangereux pour une personne, un tel isolement. Ça peut nuire à sa santé mentale», affirme Catherine Lizotte. Cette dernière affirme que son mari ne dispose que d’une heure par jour «pour faire des appels à ses proches». Le reste du temps, il est en isolement.

Elle déplore par ailleurs le manque de mesures d’hygiène en place dans l’établissement.

«Je veux qu’il sorte de là. L’hygiène sanitaire n’est pas appropriée. Il n’y a pas de gants, rien», s’insurge-t-elle. 

Libérer des détenus

Mme Lemonde souligne que les mesures mises en place par le MSP ne viennent pas régler l’enjeu de la surpopulation carcérale. Or, celle-ci rend presqu’impossible le respect de la distanciation sociale recommandée par les autorités publiques.

«C’est le temps de faire des choses comme ça, même si ça ne suit pas les protocoles. C’est une situation exceptionnelle. Ça prend des mesures exceptionnelles», affirme-t-elle.

Cette dernière presse donc Québec et Ottawa d’autoriser la libération de certains détenus dans leurs centres de détention, notamment ceux dont la peine se termine prochainement, les personnes de 60 ans et plus et les femmes enceintes.

«Le gouvernement, de manière urgente, devrait mettre en place des mesures drastiques. Il faut réduire la population carcérale pour limiter la distanciation sociale», martèle également Rita Magloé Francis. 

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