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Réfection du tunnel : «Il ne faut jamais gaspiller une bonne crise»

La circulation automobile est lente sur la route Transcanadienne, près du pont-tunnel Louis-Hippolyte Lafontaine.
Photo: Josie Desmarais, Métro Média

Le début des travaux de réfection du tunnel Louis-Hippolyte-La Fontaine a suscité bon nombre d’inquiétudes de par l’ampleur inattendue du chantier, qui durera trois ans. Hasard du calendrier, c’est aussi le délai que donne le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) à l’humanité pour agir afin de limiter le réchauffement climatique. Face à un tel constat, les travaux de réfection du tunnel ne seraient-ils pas un moment propice pour revoir la mobilité dans la métropole?

Limitation de la voiture solo, déploiement et tarification avantageuse du transport collectif, navette fluviale, stationnement incitatif; voilà un aperçu des mesures envisagées ou adoptées et qui pourraient être pérennisées après la fin des travaux. Cette zone de Montréal pourrait ainsi devenir un terrain d’expérimentation pour redéfinir la mobilité montréalaise.

Pour la directrice générale et porte-parole de Trajectoire Québec, Sarah V. Doyon, toute occasion est bonne à prendre. Elle cite l’ancien premier ministre britannique Winston Churchill qui, au sortir de la Seconde Guerre mondiale, avait déclaré: «Il ne faut jamais gaspiller une bonne crise.»

«On peut certainement profiter de cette crise autour du chantier du tunnel comme une opportunité pour passer des messages envers la mobilité durable, dit-elle. Là, les gens sont un peu forcés ou fortement encouragés à réfléchir à leurs déplacements, mais il faut s’assurer qu’il y ait des solutions de rechange à leur proposer quand ils sont dans cette réflexion.»

Selon Sarah V. Doyon, la gratuité du transport collectif, souvent évoquée pour inciter le transfert modal, n’est pas une solution efficace. Déployée dans différentes villes à l’international, cette mesure ne permettrait pas un réel changement des habitudes. Selon elle, c’est plutôt une offre de service fiable, rapide et de qualité qui inciterait la population à abandonner la voiture au profit du transport collectif.

«Sur le long terme, l’axe de l’A-25 et du tunnel va pouvoir devenir un axe important de transport collectif, ce qui n’était pas du tout le cas avant le début du chantier, dit-elle. Si les gens adoptent vraiment ces mesures-là et que les bus sont pleins, ce n’est pas vrai qu’à la fin du chantier, on va couper ces lignes de bus.»

Cette idée est partagée par la responsable du transport et de la mobilité au comité exécutif de la Ville de Montréal, Sophie Mauzerolle. Cette dernière aimerait pouvoir pérenniser les solutions qui auront été adoptées par la population.

Elle espère ainsi qu’un engouement collectif se développera pour revoir la mobilité des personnes et des marchandises. Mme Mauzerolle souligne que le transport collectif demeure la clé dans cette redéfinition de la mobilité durable.

Je pense qu’il va y avoir de belles opportunités de tester des choses. Il y a un certain appétit à penser à l’extérieur de la boîte et trouver des solutions innovantes.

Sophie Mauzerolle, responsable du transport et de la mobilité au comité exécutif de la Ville de Montréal

Vers des solutions plus radicales

Pour le directeur général de Vivre en Ville, Christian Savard, des mesures plus radicales s’imposent face à l’urgence d’agir.

«On est un peu menotté du point de vue de la société au point que la personne qui a fait la proposition la plus intéressante et peut-être faisable, c’est le président de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain qui dit qu’il faudrait interdire la voiture solo», explique Christian Savard.

On espère toujours que ce genre de situation là soit l’électrochoc qui nous permette de faire un pas plus loin.

Christian Savard, directeur général de Vivre en Ville

Le président et directeur général de la Chambre de commerce du Montréal métropolitain, Michel Blanc, avait en effet proposé comme solution d’interdire la voiture solo aux heures de pointe au profit du covoiturage, du transport collectif et des camions.

«Il va falloir augmenter le niveau de radicalité, comme peut-être à certaines heures ou zones, d’interdire les véhicules à essence ou l’auto solo dans certains secteurs», explique Christian Savard.

Sophie Mauzerolle rappelle la responsabilité de Québec de financer davantage le transport en commun structurant afin de proposer des solutions de rechange à la voiture et d’inciter le transfert modal.

Se sevrer de la dépendance à l’auto

Pour la directrice générale de Trajectoire Québec, le besoin de s’affranchir de l’auto est indéniable. Ancrée dans l’imaginaire collectif, la possession d’une voiture représente à bien des égards le succès et la liberté.

«On est très habitué à ne pas réfléchir à son moyen de déplacement et à sauter dans la voiture, explique Sarah V. Doyon. Mais plus c’est compliqué et cher de se déplacer en voiture, plus les personnes vont utiliser le transport collectif.»

Elle reste cependant réaliste et reconnaît qu’un seul mode de transport ne permettra pas de donner lieu à un réel transfert modal.

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