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Bombardier perd l’appui de la Caisse de dépôt et du Fonds FTQ

Graham Hughes / La Presse Canadienne Photo: Graham Hughes
Julien Arsenault, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

MONTRÉAL — À quelques jours de l’assemblée des actionnaires de Bombardier, la Caisse de dépôt et placement du Québec (CDPQ) et le Fonds de solidarité FTQ désavouent le président directeur du conseil d’administration, Pierre Beaudoin, en plus de s’opposer à l’approche de la multinationale en matière de rémunération de ses patrons.

Estimant que le temps est venu d’avoir un administrateur indépendant à la tête du conseil d’administration, deux des plus importants investisseurs institutionnels de la province ont décidé de ne pas appuyer la réélection du petit-fils du fondateur Joseph-Armand Bombardier et fils de Laurent Beaudoin.

Bien qu’ils renouvellent leur confiance à l’endroit du président et chef de la direction Alain Bellemare et de son plan de redressement, ces deux investisseurs estiment que le conseil d’administration a erré en approuvant la politique de rémunération qui a suscité un tollé au sein de la population en plus de provoquer des manifestations.

«À notre avis, les décisions du conseil d’administration sur la rémunération des hauts dirigeants de la société ne sont pas à la hauteur des normes de gouvernance et de responsabilité envers les parties prenantes», fait valoir la première vice-présidente, affaires juridiques et secrétariat de la CDPQ, Kim Thomassin, dans sa lettre publiée lundi.

En plus de détenir 30 pour cent de Bombardier Transport, la CDPQ est l’un des plus importants actionnaires de la multinationale avec plus de 53 millions d’actions de catégories A et B. Le Fonds de solidarité FTQ possède un peu plus de 21 millions d’actions de catégorie B.

«Nous croyons qu’un changement est nécessaire à la tête du conseil d’administration, a dit le conseiller principal aux relations de presse du Fonds de solidarité FTQ, Patrick McQuilken. Le meilleur exemple est le Fonds lui-même, qui depuis maintenant presque deux ans, a un membre indépendant, Robert Parizeau, à la tête du conseil.»

Le Fonds va même encore un peu plus loin en refusant d’appuyer la réélection des membres du comité de rémunération.

Bombardier n’a pas voulu commenter. Par courriel, l’entreprise a fait savoir qu’il sera possible de discuter de ces «questions importantes» lors de l’assemblée, jeudi, au centre montréalais de finition des avions d’affaires Global, à Dorval.

En raison de la pression populaire, Bombardier avait repoussé d’un an, soit jusqu’en 2020, certains paiements qui devaient être versés à compter de 2019 à ses six plus hauts dirigeants. Initialement, la rémunération globale de ceux-ci devait totaliser 32,6 millions $, ce qui représentait une augmentation de 50 pour cent sur un an.

La CDPQ — qui avait voté en faveur de la politique de rémunération l’an dernier — salue ce pas de recul, mais ajoute que le «rehaussement des normes de gouvernance va bien au-delà des enjeux immédiats de rémunération».

Ainsi, le bas de laine de Québécois croit que le conseil d’administration devrait être dirigé par un administrateur indépendant plutôt qu’un membre de la famille qui contrôle l’entreprise.

Grâce aux actions à droit de vote multiple, la famille Beaudoin-Bombardier contrôle 53,23 pour cent des droits de vote.

L’an dernier, la résolution consultative non contraignante sur l’approche de l’entreprise en matière de rémunération des membres de la haute direction avait été appuyée dans une proportion de 96,06 pour cent par les actionnaires.

En agissant de la sorte, la Caisse a voulu envoyer un «message clair», a affirmé le directeur général de l’Institut sur la gouvernance d’organisations privées et publiques (IGOPP), Michel Nadeau.

«Elle voulait que les autres actionnaires tiennent compte de son message», a-t-il lancé au cours d’un entretien téléphonique.

M. Beaudoin, qui siège également au conseil d’administration de Power Corporation du Canada (TSX:POW), est aussi dans la mire du Régime de retraite des enseignants de l’Ontario, également connu sous le nom de Teachers, qui s’abstiendra de voter pour sa réélection comme administrateur.

Pas les seuls

La CDPQ et le Fonds de solidarité ne sont pas les seuls investisseurs institutionnels à s’opposer à la politique de rémunération en vigueur chez Bombardier (TSX:BBD.B).

La corporation d’investissement et de gestion de la Colombie-Britannique, qui détient près de sept millions d’actions, imitera le gestionnaire québécois en plus de voter contre la réélection de tous candidats non indépendants — dont Pierre Beaudoin.

«Le programme n’est pas suffisamment en phase avec la performance, n’est pas assez transparent et n’est pas aligné avec les meilleurs pratiques», fait valoir l’investisseur institutionnel.

Le Mouvement d’éducation et de défense des actionnaires (MÉDAC), par l’entremise de son président, Daniel Thouin, compte interpeller la haute direction du constructeur d’avions et de trains sur la question de la rémunération.

La firme de conseils aux actionnaires Glass Lewis a par ailleurs récemment recommandé à ses clients de s’opposer à l’approche de l’entreprise, alors que la firme Institutional Shareholder Services (ISS) a adopté une position contraire.

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D’autres dossiers qui pourraient être soulevés lors du rendez-vous annuel de Bombardier:

— La plainte de Boeing:

Le géant américain s’est tourné vers le département du Commerce et la Commission du commerce international des États-Unis (ITC) pour demander une enquête sur une campagne jugée «agressive» par Bombardier pour «vendre ses appareils de la CSeries sur le marché américain à des prix dérisoires». La direction de Bombardier pourrait avoir à répondre aux allégations avancées par Boeing.

— La CSeries:

Bombardier a livré trois avions CSeries à ses clients depuis le début de l’année alors que sa cible pour 2017 oscille entre 30 et 35 avions. Des problèmes de cadence chez le motoriste Pratt & Whitney pèsent sur les efforts de l’avionneur montréalais au chapitre des livraisons.

— Fusion en Europe?

Bombardier et l’Allemande Siemens AG discuteraient d’un regroupement de leurs divisions de matériel roulant dans le cadre d’une transaction qui pourrait atteindre 14 milliards $. L’entreprise québécoise n’a pas commenté directement ce dossier jusqu’ici.

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