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Langue: des maires évoquent le chaos

QUÉBEC – Le gouvernement péquiste risque de plonger le Québec dans le chaos s’il s’avise de retirer aux municipalités leur statut bilingue, a prévenu mardi le maire de Côte-Saint-Luc, Anthony Housefather.

Au premier jour de la commission parlementaire étudiant le projet de loi 14 sur le français, les maires de banlieue ont rejeté toute remise en question du statut bilingue dont jouissent plus de 80 municipalités.

Même les municipalités qui ne comptent plus qu’une petite minorité de locuteurs anglophones ne doivent pas perdre «leurs droits acquis», a soutenu M. Housefather, au nom de l’Association des municipalité de banlieue (AMB).

À son avis, les anglophones ne se sentiront plus chez eux si le gouvernement impose le français dans les municipalités dites bilingues.

«Dans ma ville, les affiches et les panneaux sont dans les deux langues. Dans une ville qui n’a pas de statut bilingue, ça doit être unilingue français. Moi, je me sens chez moi dans ma ville et ce ne serait pas le cas s’il n’y avait pas de statut bilingue», a-t-il dit.

Pire encore, le gouvernement du Parti québécois joue avec le feu en remettant en question la paix linguistique, a soulevé le leader anglophone.

«Vous allez avoir le chaos, vous allez avoir l’opposition que vous ne pourriez même pas penser avec des gens dans la rue et vous allez perdre la paix linguistique», a-t-il prédit.

Le projet de loi 14, présenté par la ministre responsable de la Charte de la langue française Diane De Courcy, confère au gouvernement le droit de retirer le statut bilingue aux municipalités qui comptent moins de 50 pour cent de locuteurs ayant l’anglais comme langue maternelle.

Au Québec, plus de 80 municipalités profitent de ce statut linguistique particulier leur permettant d’offrir des services en anglais.

Or, la moitié de ces municipalités ne remplissent plus le critère requis depuis l’entrée en vigueur de la loi 101 il y a 35 ans. Parmi celles-ci figurent Otterburn Park qui ne compte plus que 7 pour cent de résidants anglophones, Rosemère (12,6 pour cent) et Mont-Royal (19,6 pour cent).

Mais peu importe la proportion ou le nombre de résidants anglophones, les droits acquis ne se négocient pas, a fait valoir le maire de Côte-Saint-Luc.

«Même si c’est 6 ou 8 pour cent, c’est un droit acquis, c’est là depuis 35 ans», a-t-il estimé.

Pour l’Association des municipalités de banlieue, il n’appartient pas à l’État de décider du statut linguistique des villes mais aux conseils municipaux.

Cette position est partagée par la Coalition avenir Québec (CAQ) dont l’appui est nécessaire pour que le gouvernement minoritaire puisse adopter la pièce législative _ les libéraux ont déjà fait savoir qu’ils s’opposeront à l’adoption du projet de loi.

«N’enlevons pas des droits à la minorité anglophone», a lancé la députée caquiste Nathalie Roy, en point de presse.

«Essayons de renforcer la langue française de façon constructive, dans la paix. Là, on s’en va vers des chicanes si le gouvernement ne recule pas. (…) Le Québec n’a pas besoin de ça, des vieilles chicanes. Laissons aux municipalités le soin de décider si oui ou non elles conservent leur statut bilingue», a-t-elle ajouté.

Quant à elle, la ministre De Courcy a rappelé que le gouvernement tiendra compte non seulement du nombre de résidants anglophones mais aussi d’autres critères comme le patrimoine historique et la participation «active» des citoyens dans leur communauté.

Pour la suite des choses, elle a voulu se faire rassurante, affichant une ouverture pour le compromis.

«Je dis: voici notre position, nous y croyons. Mais après ça on dit: voyons, entendons et bonifions. On est là», a-t-elle dit.

Alors que les maires de banlieue demandent à la ministre De Courcy de jeter du lest, le Syndicat de la fonction publique du Québec (SFPQ) considère au contraire que le projet de loi 14 manque de tonus et doit être renforcé.

D’après la présidente Lucie Martineau, le projet de loi 14 ne comporte aucune mesure pour freiner l’utilisation de plus en plus fréquente de l’anglais dans la fonction publique.

«Nos membres subissent de la pression pour parler en anglais dans l’administration publique», a dénoncé Mme Martineau.

«Ce n’est pas un renforcement de la loi 101 qu’on a là, c’est plutôt le contraire et je vous dirais que ça va prendre un autre projet de loi pour qu’on cesse la bilinguisation de la fonction publique», a-t-elle poursuivi.

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