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Les policiers municipaux créeront un régime de retraite géré par les travailleurs

Photo: Yves Provencher/Métro

Afin d’échapper à certaines dispositions de la nouvelle loi 15 sur les régimes de retraite des employés municipaux – qui découle du projet de loi 3 – la Fédération des policiers municipaux du Québec (FPMQ) créera son propre régime de retraite géré par ses travailleurs.

Alors que la FPMQ déposait mardi sa requête juridique pour rendre inconstitutionnelle la loi 15, emboîtant ainsi le pas à plusieurs autres membres de la Coalition syndicale pour la libre négociation qui avaient fait de même en janvier dernier, elle annonçait également vouloir «prendre le contrôle de [son] argent».

La FPMQ représente 4500 policiers à travers la province ayant 29 régimes de retraite différents.

«Neuf de nos régimes de retraite sur 29 sont capitalisés à 100%. Au total, 17 de nos régimes de retraite sont capitalisés à plus de 90%, donc en excellente santé financière, et 25 le sont à plus de 85%», a affirmé mardi le vice-président de la FPMQ, Paulin Aubé. Il déplore du même coup qu’ils doivent tous faire l’objet de modifications en fonction de la loi 15.

Avec ce régime de retraite géré par les travailleurs, qui sera offert aux différents syndicats membres de la FPMQ, les municipalités transfèreraient la gestion et la responsabilité des risques du régime aux employés qui seront conseillés pas des experts en actuariat. Cette nouvelle gestion des régimes de retraite entraînerait la création de comités de retraite exclusivement constitués de salariés.

«Nous préférons avoir l’indépendance d’action et la flexibilité possible d’offrir une gestion interne», a poursuivi M. Aubé.

L’employeur continuerait de cotiser au régime, une cotisation stable «qui ne fluctuera pas, que par le fruit des négociations des conventions collectives», a précisé le vice-président de la FPMQ. Le montant de leur cotisation dépendra de la négociation qui sera faite avec la partie patronale, indique l’avocat de la FPMQ, Me Guy Bélanger, de la firme Trudel Nadeau.

«Il y a des Villes qui ne voudront rien changer [à leur cotisation], parce qu’il l’ont négociée de bonne foi et savent très bien que les policiers, si le partage de la cotisation est changé, voudront revendiquer davantage [de bénéfices] sur d’autres points de la convention collective. Et pourquoi demanderaient-ils une cotisation moins élevée qu’actuellement, alors qu’il y aura moins de risque pour eux?» avance Me Bélanger.

Selon M. Aubé, la création de ce régime de retraite géré par les travailleurs permettrait de préserver «l’indexation des rentes, le maintien des prestations, le maintien de la rente du conjoint, le maintien des cotisations et le maintien de l’âge actuel du départ pour la retraite des policiers [55 ans]». Des aspects de leur régime de retraite qui seraient modifiés par la loi 15.

Il estime que ce nouveau régime de retraite pourrait être bien accueilli par la partie patronale, puisque les municipalités «ont plaidé pour plus de stabilité et de prévisibilité dans leur cotisation aux régimes de retraite» lors de la commission parlementaire sur le projet de loi 3. «C’est ce que nous leur offrons», a insisté M. Aubé

Les premières approches auraient été faites par la FPMQ pour sonder les municipalités sur ce possible changement de garde des régimes de retraite. «On commence à tâter le terrain. On a eu de l’écoute. On n’a pas eu d’objection ferme. [Les Villes] regardent ça», a fait savoir Me Bélanger.

Après des discussions depuis le 10 décembre dernier, les membres de la FPMQ ont voté la semaine dernière pour donner le mandat à la fédération de leur offrir un tel service. Les différents syndicats auront le choix de s’en prévaloir ou non. S’ils choisissent d’aller de l’avant, le changement sera négocié avec l’employeur. À défaut de signer une entente, les deux parties devront se présenter devant un arbitrage. «Ça ne se fera pas du jour au lendemain, ce sera une longue bataille, a précisé Me Bélanger. Si ça va bien, dans les 15 à 20 prochaines années, on pourra rapatrier tout le monde.»

L’idée n’a toutefois pas semblé plaire au ministre des Affaires municipales, Pierre Moreau, qui a été interpellé sur le sujet, mardi. «Pourquoi est-ce que l’employeur qui fournit 50% de ce qui va constituer le fonds de retraite n’aurait aucun droit de regard sur la gestion? Si la gestion devient tout à coup déficitaire, qu’est-ce qui se passe?» a réagi le ministre.

Trois autres régimes de retraite du genre au Québec ont déjà été créés dans la dernière décennie. Un regroupement de 530 organismes communautaires et de femmes a initié le mouvement en 2008, suivi par un syndicat de la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ) la même année. En 2011, les employés de la mine Niobec ont emboîté le pas.

La FPMQ soutient qu’en raison de la loi 15, un policier peut perdre jusqu’à 200 000$ en bénéfice de retraite uniquement pour le service passé. À cela s’ajouteraient des pertes récurrentes qui peuvent atteindre 10 000$ par année pour le service futur.

Recours juridiques
Avec sa requête juridique déposée mardi, la FPMQ, tente de déclarer inconstitutionnelle et invalide la loi 15 qu’elle a longuement contesté à l’automne. Elle poursuit le procureur général du Québec et met en cause l’ensemble des villes et MRC, ainsi que le ministre de l’Emploi et responsable de l’application de la loi 15, Sam Hamad.

Selon la FPMQ, «plusieurs dispositions de la loi 15 constituent une entrave substantielle à l’activité associative», peut-on lire dans le jugement.

Le syndicat déplore que plusieurs nouvelles dispositions des régimes de retraite, tel que le partage à parts égales des déficits passés et des cotisations, soient imposés par la loi, ne laissant pas la place à la négociation.

 

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