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Ces vies qui comptent

NEW YORK, NY - DECEMBER 3: People holds a banners as they take part during a protest in support of Eric Garner at Union Square on December 3, 2014 in New York City. Garner died after being put in a chokehold during an alteration with NYPD officers in the Staten Island borough of New York City. (Photo by Kena Betancur/Getty Images) Photo: Kena Betancur/Getty Images

Bien sûr que toutes les vies comptent. Depuis que le mouvement Black Lives Matter existe, et chaque fois que sa notoriété prend de l’ampleur, des fins finauds, convaincus d’avoir inventé la roue à trois boutons, s’expriment en ce sens : «Oui, mais toutes les vies comptent!» Parions qu’avec leur grande sensibilité, ces gens ont tendance à dire qu’eux aussi souffrent lorsqu’un bon ami leur apprend qu’il est atteint du cancer.

Bien sûr que toutes les vies comptent. Mais le mouvement Black Lives Matter est né du besoin de rappeler que les vies des personnes noires comptent aussi, alors que celles-ci tombent de manière disproportionnelle sous les balles des policiers et que tout semble indiquer que ces vies ne comptent pas autant que celles des Blancs. Le slogan vise à rappeler les êtres humains derrière les statistiques et à faire ressortir les problématiques systémiques vécues spécifiquement par les Noirs. Même si, bien sûr, il arrive aussi aux Blancs de mourir.

Dans ce contexte, rétorquer que «toutes les vies comptent» revient à nier l’existence d’un racisme structurel qui menace particulièrement la sécurité et la paix d’esprit des Noirs. Bien sûr que toutes les vies comptent, mais s’il est si important pour vous de le rappeler alors que la discussion porte précisément sur la situation des Noirs, c’est soit que vous êtes déterminé à ne pas entendre les revendications d’un groupe opprimé, soit que vous êtes incapable de réprimer votre envie de tout ramener à vous.

Dans tous les cas, vous n’êtes pas en train d’écouter. Vous êtes en train de vouloir parler plus fort, pour que des voix marginalisées continuent de ne pas être entendues.

Depuis que le mouvement Black Lives Matter existe, des tas de comparaisons ont été utilisées pour illustrer l’absurdité – voire le biais raciste – d’«All lives matter». C’est comme si vous répondiez à des environnementalistes engagés contre la destruction de la forêt tropicale qu’on coupe aussi des arbres dans la forêt laurentienne, ou que vous reprochiez à un chercheur qui se penche sur le VIH de ne pas s’occuper de toutes les autres maladies. La métaphore la plus parlante est probablement celle de la maison qui brûle : si la maison de votre voisin prend feu, allez-vous arroser la vôtre en affirmant que «TOUTES les maisons comptent»?

Tout ça semble bien évident, jusqu’à ce qu’un chanteur décide de modifier l’hymne national canadien lors d’une compétition sportive pour intégrer «All lives matter» dans les paroles et qu’un de nos politiciens l’en félicite pour se rétracter par la suite.

«All lives matter» ne veut pas dire qu’on soutient toutes les personnes victimes de violence. «All lives matter» est une réponse passive-agressive au cri d’une communauté qui demande à être entendue.

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