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La relation commerciale Canada-États-Unis ne sera pas plus facile avec Joe Biden

Prime Minister Justin Trudeau meets with U.S. President Donald Trump in the Oval Office at the White House in Washington, D.C. on June 20, 2019. THE CANADIAN PRESS/Sean Kilpatrick Photo:

OTTAWA — Le Canada a dû endurer près de quatre ans de présidence de Donald Trump marqués par la réécriture ou l’envoi à la déchiqueteuse des règles du commerce international. Mais il serait peut-être un peu prématuré de croire à un retour des beaux jours, sous le règne du respect de la loi, si Joe Biden accède à la présidence américaine.

Cette mise en garde est partagée par de nombreux spécialistes, analystes et diplomates experts du commerce international qui ont vu les Canadiens encaisser les menaces répétées de M. Trump envers leur bien-être économique.

Les perturbations de la relation économique entre les deux pays ont été marquées par les menaces de M. Trump de déchirer l’Accord de libre-échange nord-américain, les insultes du président pendant la renégociation de ce même accord et l’imposition de tarifs douaniers sur l’acier et l’aluminium justifiés par de prétendus risques pour la sécurité nationale.

Le gouvernement de Justin Trudeau a tout fait pour maintenir une attitude civilisée à travers ces crises, mais a éventuellement cédé en qualifiant l’administration Trump de gouvernement le plus protectionniste en Amérique.

Toutefois, avant l’ère Trump, cet honneur appartenait à un autre groupe: les démocrates américains.

En devenant président, Joe Biden tenterait probablement de rétablir la stabilité, la prévisibilité et le respect nécessaires à une bonne relation commerciale entre le Canada et les États-Unis, mais il reste un démocrate et les intérêts économiques de son parti sont différents de ceux du Canada, explique Lawrence Herman, un ex-diplomate aujourd’hui avocat spécialisé en commerce international.

«Ce ne sera pas un retour complet à la douceur et à l’harmonie», prévient-il.

Si Joe Biden remporte l’élection présidentielle, cela va sans doute mettre fin aux menaces persistantes contre l’aluminium et l’acier, auxquels Donald Trump a imposé des tarifs douaniers par décret en 2018.

Officiellement, M. Trump disait vouloir s’attaquer à l’acier chinois de mauvaise qualité qui inonde le marché américain en passant par le Canada, et qui mettrait en péril la production américaine d’un métal essentiel à la production de matériel militaire.

Sauf que le représentant américain au commerce nommé par Donald Trump a été très clair sur le fait que ces tarifs visaient à mettre de la pression sur le Canada afin d’accélérer les négociations sur le nouvel accord de libre-échange.

Le premier ministre Justin Trudeau et son cabinet se sont publiquement indignés de voir le Canada présenté comme une menace à la sécurité par son allié de longue date.

«Il ne faut pas s’attendre à des faveurs»

Il reste que malgré l’approche respectueuse des lois et coutumes commerciales à laquelle on s’attend de la part de Joe Biden, celui-ci demeure lié à un mouvement anti-libre-échange au sein même de son parti, rappelle M. Herman.

Le sénateur Bernie Sanders, qui était candidat à l’investiture démocrate, considère le régime du commerce international comme une bénédiction pour les grandes entreprises et un fléau pour les travailleurs.

M. Herman souligne que M. Sanders, la sénatrice Elizabeth Warren, qui a elle aussi été candidate à l’investiture démocrate, et les syndicats exercent une véritable influence au sein du Parti démocrate.

«Je ne veux pas sous-estimer l’importance de simplement profiter d’une relation bilatérale beaucoup plus amicale et de la reconnaissance du fait que le Canada est un État important et un bon ami pour les États-Unis, mais en matière de politiques, il ne faut pas s’attendre à des faveurs», observe de son côté Meredith Lilly, détentrice de la chaire de recherche en commerce international Simon Reisman de l’Université Carleton.

Joe Biden fait campagne pour des politiques protectionnistes d’achat local «Buy American» qui pourraient empêcher les entreprises canadiennes de soumissionner sur des contrats publics d’infrastructures dans les États ou les municipalités.

Selon le vice-président de l’Institut canadien des affaires mondiales, Colin Robertson, le Canada a jusqu’ici contourné le problème en demandant aux premiers ministres provinciaux et aux gouverneurs d’États américains de négocier à la pièce des ententes de réciprocité.

Il y a aussi le controversé projet Keystone XL, un oléoduc devant transporter le pétrole des sables bitumineux de l’Alberta jusqu’au golfe du Mexique. Barack Obama l’a bloqué. Donald Trump l’a approuvé. Joe Biden promet d’y mettre fin.

«Ce serait, je crois, dévastateur, particulièrement pour l’Ouest canadien et le secteur de l’énergie», a estimé l’ex-ambassadeur américain au Canada sous George W. Bush, David Wilkins, lors d’une conférence donnée à l’invitation de la Chambre de commerce du Canada.

Mike Blanchfield, La Presse Canadienne

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