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Les combats quotidiens

Photo: Collaboration spéciale

Un enfant poursuit ses parents dans Capharnaüm, le nouveau long métrage de Nadine Labaki qui a ému Cannes (Prix du Jury) et qui est nommé aux Oscars dans 
la catégorie du Meilleur film en langue étrangère.

Le sujet a de quoi faire réagir. Surtout que le film se déroule dans les strates pauvres du Liban, dont le problème a été amplifié par l’accueil de plus de 1,5 million de réfugiés syriens.

«Ces enfants font presque partie du décor de la ville, raconte en entrevue téléphonique la cinéaste libanaise. Et on a tendance à les ignorer complètement, à tel point que plus personne ne les remarque.»

C’est le cas du jeune héros de 12 ans, dont l’interprète, Zain al-Rafeea, est un réfugié syrien habitant un des quartiers les plus défavorisés de Beyrouth.

«C’était évident pour nous que c’était lui, assure celle qui a réalisé il y a quelques années Et maintenant on va où? et Caramel. Il a grandi dans la rue et il a vu beaucoup de choses… Il possède cette force de caractère et cette sagesse qui ne viennent qu’aux enfants qui ont connu la souffrance. »

Porté par un engagement social que n’aurait pas renié Ken Loach, Capharnaüm tend, à l’instar des œuvres du néoréalisme italien, à épouser au plus près le réel pour faire naître la fiction.

«Je me demandais ce que ça fait d’être aussi inexistant aux yeux du monde, d’être dépourvu du moindre droit. Si cet enfant pouvait parler, qu’est-ce qu’il dirait?» – Nadine Labaki, réalisatrice, qui pose dans Capharnaüm un regard sur les êtres 
des bas-fonds de la société libanaise.

«Mon devoir était vraiment de relater la vérité telle qu’elle est, explique celle qui a également scénarisé le récit. C’est-à-dire de travailler avec des non-acteurs, qui ont presque vécu la même chose dans leur vie, tourner dans de vrais décors sans altérer des choses.»

Une authenticité d’autant plus éclairante qu’elle est filmée à hauteur d’enfants, de façon viscérale, afin de faire apparaître ce qui se passe dans leur tête et leur corps.

Lorsque cette vérité éclate au visage, personne ne peut demeurer indifférent. C’est particulièrement le cas avec la dernière partie, qui tord le cœur.

«Certaines personnes m’ont reproché d’avoir montré trop de misère, se souvient celle qui apparaît à l’écran en avocate. Malheureusement, la réalité est pire que ce qu’on voit dans le film. Elle est atroce, presque intenable.»

L’espérance est pourtant entrevue ici et là, dans cette façon qu’ont les personnages de ne jamais rendre les armes et de former, malgré l’adversité, une véritable famille de substitution.

«L’espoir est la seule chose qui nous permette de continuer à vivre, rappelle Nadine Labaki. Je pense qu’il y a toujours des petites victoires dans la vie, même quand la situation est très dure. Les enfants qui étaient dans la rue au début du tournage ne le sont plus maintenant. Ils vont bientôt rentrer à l’école, tout comme Zain qui a appris à lire et à écrire.»

Capharnaüm
À l’affiche dès aujourd’hui

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