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Noisia: Un parcours supersonique qui se termine en beauté

Noisia
Métro s'est entretenu avec Thijs de Vlieger (au centre) de l'illustre formation électronique Noisia. Photo: Rutger Prins/Collaboration spéciale
Michael-Olivier Harding - Métro

À l’approche de son ultime performance en sol montréalais, le trio hollandais Noisia revient sur son catalogue de basses turbulentes et les faits saillants des 20 dernières années.

«Je n’ai rien contre le fait que notre renommée repose sur quelque chose qui ne nous ressemble plus du tout.» Thijs de Vlieger, de l’illustre formation électronique Noisia, a l’esprit songeur lorsqu’on le joint dans son studio à Groningue, dans le nord de la Hollande.

L’automne dernier, Thijs ainsi que Nik Roos et Martijn van Sonderen, les deux autres membres du groupe cultissime de bass music, annonçaient la fin de leur aventure. Ils disent souhaiter emprunter des tangentes différentes tout en restant amis, collaborateurs et cogestionnaires de leurs étiquettes.

À constater l’ampleur du chemin parcouru, on peut comprendre cette envie de se défaire d’étiquettes désuètes. Lorsque les trois copains d’école en étaient à leurs premiers bangers survitaminés il y a 20 ans, la scène de drum and bass était fortement sous-représentée. On connaissait surtout l’héritage électronique néerlandais pour son gabber (pensez techno extrême) et ses grandes pointures du trance (Tiësto, Ferry Corsten), sans oublier les légendaires Vengaboys.

Nous étions encore bien loin de l’électrochoc culturel qu’allait administrer un dénommé Skrillex avec ses basses fréquences dévastatrices piquant la curiosité d’un nouveau, jeune et large public.

En faisant notamment paraître des morceaux sur les étiquettes de Skrillex, de deadmau5 et de Jay-Z, les copains de Noisia allaient rapidement s’imposer par leurs drops distordus, mais surtout par leur design sonore futuriste et extrêmement léché.

Alors que Noisia s’apprête à se livrer au public montréalais pour la toute dernière fois à Igloofest, dans le cadre de sa tournée d’adieu, Thijs s’est prêté au jeu d’une entrevue bilan sur 20 ans de bouleversements et de basses tonitruantes.

La technologie ayant le plus révolutionné le milieu?
Ableton Live, qui a repoussé les limites de l’improvisation et de la performance en direct. Contrairement aux logiciels Cubase et Logic, Ableton Live n’est pas conçu pour recréer des chansons de façon linéaire, mais ouvre plutôt la voie à une nouvelle façon d’imaginer les possibilités de ce contexte.

La meilleure bande sonore des 20 dernières années?
Chernobyl, de la compositrice et violoncelliste islandaise Hildur Guðnadóttir. Elle a enregistré des sons dans une centrale nucléaire estonienne désormais hors service et y a ajouté une trame de violoncelle. C’est sombre et merveilleux.

Le changement le plus difficile avec lequel composer?
De nos jours, la musique existe surtout sous forme gratuite, en format numérique, ce qui réduit un peu sa valeur d’antan. Pour ceux qui tentent de faire de la création leur gagne-pain, ça complique drôlement l’affaire. Toutefois, ça a également des points positifs, comme nous permettre de publier notre travail sans passer par une armée d’intermédiaires. C’est une arme à double tranchant, mais la nature même du progrès implique que certains privilèges soient remis en question.

La meilleure publication consacrée à la musique?
Je ne lis aucune publication consacrée à la musique. Cependant, je pense au livre The Rest Is Noise, du critique musical Alex Ross. Il passe en revue l’histoire de la musique classique du XXe siècle. Il s’agit d’une lecture hautement jouissive qui pourrait même engendrer une dépendance!

«La musique est un phénomène intrinsèquement social. Son rôle a toujours été de rassembler les gens, de créer un sentiment d’euphorie collective.»
Thijs de Vlieger, de Noisia

Au final, que préférez-vous? Créer des pièces ou les partager avec un public?
J’ai longtemps cru que je préférais le studio à la scène. Toutefois, je me suis récemment rendu compte que la musique est un phénomène intrinsèquement social. Son rôle a toujours été de rassembler les gens, de créer un sentiment d’euphorie collective. Quand je suis en studio, bien sûr, j’oublie tout ça, mais je crois foncièrement que la musique doit être partagée.

L’endroit le plus froid où Noisia s’est produit?
Igloofest! J’ai toujours le manteau Canada Goose qu’on m’a remis au festival. C’était avant que Drake ou d’autres rappeurs soient photographiés en train de le porter. Grâce à un étrange festival canadien en plein air et au grand froid, j’ai été un précurseur de tendances aux Pays-Bas!

Votre collaboration la plus marquante?
Il y en a eu trois. La première, avec Skrillex, a changé nos vies en nous ouvrant beaucoup de portes. Ensuite, celle plus intime avec le groupe de hip-hop Foreign Beggars, avec qui nous avons formé un nouveau groupe [I Am Legion]. Et sur un plan plus personnel, ma collaboration avec la compagnie de danse Club Guy & Roni, qui m’a permis d’oser entreprendre de nouvelles choses.

Quelques mots pour décrire les fans de Noisia?
Des gens en quête d’intensité.

Le plus grand bouleversement à venir en musique?
Les gens s’intéressent énormément aux possibilités de l’intelligence artificielle pour donner vie à des compositions génériques, à des choses qu’on peut programmer en formule. Les machines pourront à court terme s’en charger. Elles «rédigent» déjà de petits romans. Les gens les lisent sans se rendre compte que ce n’est pas la plume d’un être humain. La même chose sera bientôt vraie pour la musique.


Noisia
Demain à 19h30, au Quai Jacques-Cartier du Vieux-Port, dans le cadre d’Igloofest

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