Angle mort: la peur leur va si bien
Pas facile, de jouer la peur au grand écran. Est-ce que j’en fais trop ou pas assez? Dois-je beurrer plus épais? Dois-je crier plus fort? Voilà le type de questions qui trottaient dans la tête de Karine Vanasse et de Sébastien Huberdeau lors des tout premiers jours de tournage d’Angle mort, le deuxième long métrage de Dominic James, dans lequel ils incarnent un couple dont les vacances en Amérique latine virent au cauchemar lorsqu’un tueur pyromane (Peter Miller) croise sa route.
«La peur, c’est touchy observe Karine Vanasse. Au début, je n’osais pas y aller à fond et pourtant, j’assumais complètement le genre de film qu’on faisait. Dominic m’a beaucoup aidé là-dessus. Il m’a poussé à me faire confiance. Il m’a dit : « Vas-y, amuse-toi. Arrête de te casser la tête. C’est simple ce que tu as à faire : tu cries pis tu te sauves en courant. Laisse-toi aller. » Et c’est ce que j’ai fini par faire.»
Pour Sébastien Huberdeau, qu’on a l’habitude de voir dans des rôles de jeunes hommes tourmentés (Nos étés, Polytechnique), le plus grand défi était d’entretenir la tension dramatique sur le plateau, que ce soit entre les scènes, pendant les changements d’éclairage ou à l’heure du lunch. «Le cinéma, c’est 80 % d’attente. Il fallait toujours être on the edge, mais sans trop s’épuiser parce qu’on faisait de longues journées. Ça demande un certain effort, d’autant plus qu’à cause du budget du film, on ne pouvait pas se permettre de reprendre le même plan 20 fois de suite, indique-t-il. C’était un bel exercice.»
Le réalisateur Dominic James ne tique pas quand on qualifie Angle mort de thriller à l’américaine. Bien au contraire. Le cinéaste québécois – qui s’est exilé aux États-Unis à l’âge de 16 ans pour étudier le cinéma – avoue même s’être amusé avec les clichés propres au genre. Tout est une question d’équilibre, souligne-t-il. «Il fallait donner un sens du réalisme à quelque chose qui est rocambolesque. Et c’est avec les comédiens qu’on y est arrivé, explique-t-il. Les gens doivent être capables de s’identifier aux personnages. Trop souvent, quand je vais voir des films comme Angle mort, on ne met pas l’emphase sur les personnages; ils sont juste des victimes. C’était une trappe dans laquelle on ne voulait pas tomber.»
S’inspirant des vieux films d’Alfred Hitchcock, Dominic James a opté pour un style cinématographique «beaucoup plus assis et contrôlé» qui permettrait aux acteurs de s’exprimer en toute liberté. «Je voulais des plans très clairs. Je voulais que la tension passe par le regard de Karine et de Sébastien», précise-t-il.
Contrairement à plusieurs films de sa trempe, Angle mort ne montre pas un goût prononcé pour les giclées d’hémoglobine. Alors que les Scream et autres I Know What You Did Last Summer ont l’habitude de mettre en scène un meurtrier armé d’un couteau de cuisine, d’un fusil ou d’un crochet de pêcheur, la dernière offrande de Dominic James ne propose rien de tel.
«J’avais la responsabilité de m’adresser au plus large public possible. Je ne voulais pas me confiner à une niche de fans de films d’horreur, note-t-il. Hitchcock disait : « Rappelle-toi toujours que ton public, c’est une femme, parce si elle ne veut pas aller voir le film, le gars n’ira pas non plus. » J’ai gardé ça en tête.»
Un maquillage à saveur d’Oscar
Peter Miller est méconnaissable sous les traits d’un tueur pyromane dans Angle mort. Chaque matin, le comédien passait de deux à trois heures à la table de maquillage. Tel un grand brûlé, il en sortait le visage couvert de cicatrices, une gracieuseté de l’expert québécois en maquillage Adrien Morot, qui a reçu le mois dernier une nomination aux Oscars pour son travail sur le film Barney’s Version.
«Je ne voulais pas que notre tueur ait l’air d’un gros monstre, dit le réalisateur Dominic James. Je voulais qu’on voie l’être humain sous le masque.»
Angle mort
En salle dès le 25 février