«Étudiants libres»: Une comédie qui nous ressemble
La vie de Michel et Rich, deux étudiants montréalais, est soudainement bousculée par l’arrivée chez eux d’une troisième colocataire qui tombe solidement dans l’œil de Rich. Cliché comme prémisse? La web-série Étudiants libres déconstruit pourtant plusieurs stéréotypes.
Les trois protagonistes de cette sitcom conçue et réalisée par Richardson Zéphir sont d’origine haïtienne. La nouvelle venue dans l’appartement, Sydney (Tracy Marcelin), est la cousine de Michel (Érich Preach). Ce dernier, très protecteur, voit d’un mauvais œil l’intérêt que lui porte son ami et coloc Rich (Lyndz Dantiste).
En entrevue avec Métro, le comédien et humoriste Preach se réjouit de la façon dont ce projet comique, produit dans le cadre du festival Juste pour rire, montre à l’écran des situations auxquelles il peut s’identifier.
«On me demande souvent pourquoi je ne regarde pas la télévision québécoise. C’est parce que ça ne représente pas les réalités auxquelles je fais face», dit-il franchement.
Il cite en exemple le populaire téléroman des années 1990 Urgence, dont l’action se déroulait dans un hôpital montréalais. «Tout le staff était blanc! Vraiment? Dans un hôpital de Montréal? Wow!» s’exclame-t-il.
Au-delà de l’enjeu de la diversité ethnique, l’artiste déplore que la télévision québécoise ne soit pas même représentative de la diversité régionale de la province. «Les Québécois ont de la misère à représenter la diversité entre eux autres, observe-t-il. Dans un sitcom ou dans une dramatique québécoise, le médecin, l’infirmière, le préposé, la fille de huit ans et le robineux ont tous le même niveau de français.»
L’équipe d’Étudiants libres a porté une attention particulière à ces détails, souligne-t-il. Par exemple, les trois personnages principaux ont des accents différents. «Juste ça, ça fait une différence!» assure Preach.
Des échos à The Fresh Prince of Bel-Air
Le communiqué de presse faisant la promotion du projet compare Étudiants libres à la comédie américaine culte The Fresh Prince of Bel-Air qui a fait connaître Will Smith il y a une trentaine d’années.
En restant toujours dans le registre comique, la série québécoise aborde elle aussi certains enjeux sociaux, comme le manque de diversité dans les médias. Elle fait également état de plusieurs injustices que vivent les Afro-Québécois, le tout en seulement deux courts épisodes totalisant 25 minutes.
Par exemple, le personnage de Michel est victime de profilage racial de la part d’un policier alors qu’il reconduit un collègue de classe blanc. Ce camarade fait quant à lui preuve de racisme ordinaire en prenant un faux accent créole sous prétexte qu’il a grandi à Montréal-Nord. «Moi j’ai fait un stage en Abitibi pis tu me vois pas parler joual», lui répond sèchement Michel.
«Ça aborde des sujets comme le profilage racial, mais le but n’est pas de donner une leçon. On fait juste montrer la réalité, sans passer de message ni apporter de solution.» -Érich Preach
La culture haïtienne est aussi représentée à l’écran. Lorsque Sydney reçoit des amies, Rich leur offre des ti-punchs et des planteurs, des cocktails populaires de la cuisine antillaise. Et quand leur jeune voisine s’immisce dans l’appartement, elle demande une toast au beurre d’arachide épicé.
Seulement deux épisodes d’Étudiants libres ont été tournés pour l’instant. Le projet, monté en à peine trois semaines, est la réponse créative de Richardson Zéphir à la carte blanche que lui a offerte Juste pour rire dans le cadre de sa nouvelle «Série des concepts éclatés».
Ces deux épisodes sont présentés comme le pilote d’un projet qui pourrait être amené à se développer. «Nous, on aimerait en faire une série télé ou web», espère Preach.
Les deux épisodes d’Étudiants libres seront offerts gratuitement vendredi et samedi sur la plateforme de Juste pour rire