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Gondry honore Gainsbourg avec un clip, sorte de «conte maléfique»

Michel Gondry
Michel Gondry Photo: Jason Merritt/Getty Images

«C’est une sorte de conte maléfique»: le cinéaste Michel Gondry revient pour l’AFP sur la couleur donnée à son beau clip d’animation pour La chanson de Prévert de Serge Gainsbourg, mis en ligne cette semaine.

Cet habitué des clips (Daft Punk, Björk, Massive Attack, The White Stripes, etc.) inaugure une série de rendez-vous entre réalisateurs du cinéma français et l’oeuvre de Gainsbourg (disparu il y a 30 ans), selon la maison de disques Universal.

Comment est né ce clip ?

«On m’a proposé une quinzaine de chansons et j’ai pris celle-là tout de suite, c’est une de celles que je préfère de Gainsbourg. Il y a deux univers, celui de Prévert et celui de Gainsbourg, juxtaposés et en contraste. J’ai grandi avec le Gainsbourg qui parle (à la fin de sa carrière, ndlr) et j’ai découvert plus tard celui qui chantait. Ça lui a donné une complexité et un côté unique par rapport aux autres chanteurs. La qualité des paroles, c’est de la littérature, on est inspiré tout de suite».

Vous vous frottez aux monuments, Gainsbourg maintenant et Vian auparavant avec L’écume des jours

«Il y a un lien, Vian avait pris sous son aile Gainsbourg. Ça met une très forte pression quand un artiste n’est plus en vie, on est exposé au reste du monde. Quand l’artiste est vivant, s’il aime sa vidéo, ça va, on a bien travaillé».

Avez-vous demandé l’avis de Charlotte Gainsbourg ?

«Oui, bien sûr. C’était important que ce ne soit pas quelque chose qui la froisse. Je lui ai raconté l’idée, ça lui convenait et je lui ai montré le clip terminé avant tout le monde. Et là, elle n’a pas répondu pendant trois semaines… J’en ai fait une mini-dépression… Je me disais “elle n’aime pas”. C’était un problème d’ordi, ou je ne sais plus, elle a répondu, elle était contente. Tout va bien».

Comment est venue cette belle idée d’une feuille morte qui vole et change ce qu’elle touche ?

«La feuille morte a ce côté naïf, mais c’est aussi une sorte de conte maléfique, l’amour fait accélérer le temps, laisse derrière lui des cendres d’une certaine manière. Je me suis dit “peut-être que la chanson n’est pas aussi triste que je le pense”, mais il chante “Jour après jour les amours mortes/N’en finissent pas de mourir”».

C’est réalisé comment ?

«J’utilise un smartphone. Je fais beaucoup de films pour ma fille comme ça: elle me donne les indications avec son prénom, “policière”, “les chats voleurs”, “le tigre”. Mais ce n’est pas raisonnable, je viens d’en terminer un avec un degré de sophistication… J’ai travaillé un mois, dix heures par jour… Stop! Je vais essayer d’acheter une caméra ou un appareil photo plus performant».

Sur quoi d’autre travaillez-vous ?

«J’ai trois projets de long-métrages qui avancent doucement, je ne sais pas si c’est un “syndrome zoom”, mais il y a beaucoup de projets et moins qui aboutissent… On ne s’imagine pas toutes les étapes d’un film: le producteur vous dit cinq fois qu’on a le feu vert. Donc, la dernière fois ce n’était pas un feu vert? (rires)».

Vous avez travaillé avec les Daft Punk, que pensez-vous de leur séparation ?

«Ce qui m’a surpris (c’est l’effet de leur annonce) c’est comme si on avait appris un décès… J’étais plus affecté par la disparition de Jean-Pierre Bacri. Les monstres sacrés, il faut 60 ans pour les fabriquer et ils partent en un jour. Beaucoup ont disparu alors que je rêvais de travailler avec eux, je sais, c’est égoïste de dire ça. Il sortait de la télé, il venait dans le salon avec vous, tellement il était réel. Malgré sa “ronchonnerie”, il était touchant et sympa, ça m’a vraiment fait quelque chose… Je digresse, j’ai un énorme respect pour les Daft Punk. Bon, quand on a arrêté Oui Oui (son groupe dans les années 80, dont il était batteur et réalisait les clips, ndlr), on n’a pas fait de communiqué, on avait vendu 5000 albums (rires)».

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