Rire engagé dans The Angels’ Share
Avec The Angels’ Share (La part des anges), prix du jury au Festival de Cannes 2012 et nommé au César du meilleur film étranger en 2013, Ken Loach signe une comédie sociale réjouissante. Rencontre avec un cinéaste au regard toujours aussi lucide sur le monde.
Comment l’idée d’une comédie sociale autour du whisky vous est-elle venue?
Avec Paul Laverty, mon scénariste, nous avions envie de parler de ces millions de jeunes en Europe qui n’ont rien. Mais sans tomber dans le misérabilisme, car c’est à mille lieues de la réalité. L’idée d’un crime sans victime nous a plu. Se dire que ces jeunes veulent voler du whisky qui vaut 1 million de livres pour le revendre à quelqu’un pour qui l’argent n’a pas de valeur, on trouvait ça amusant.
La situation des jeunes en difficulté vous touche?
Comment ne pas l’être? La situation est dramatique partout en Europe. Quand on pense à toutes ces vies gâchées, c’est terrible. Même pour ceux qui ont du travail, c’est difficile.
Paul Brannigan, le comédien principal du film, est un acteur non professionnel. Il a déclaré que le film avait changé sa vie…
Ça l’a aidé à s’en sortir. Paul fait partie de ces millions de jeunes sans emploi qui vivent dans la pauvreté et dans la violence. Il se battait pour s’en sortir. Sur le tournage, il était très discipliné. Toujours à l’heure, extrêmement motivé.
Malgré la dureté du propos, on rit beaucoup dans votre film. Était-ce volontaire?
Le but n’était pas de faire rire à tout prix, mais de raconter les choses comme elles se passent dans la vie. Même si on rencontre des difficultés, il y a toujours des moments très drôles. Il suffit de passer du temps avec ces jeunes pour s’en rendre compte.
Votre cinéma est toujours très engagé. Imaginez-vous un jour faire un blockbuster?
Non, je crois que c’est trop tard maintenant (rires). Ça prend beaucoup de temps de faire un film, il faut un projet dans lequel on croit. Il faut être engagé. On n’a pas le choix.
Est-ce plus facile de faire des films quand on s’appelle Ken Loach?
Ce n’est pas plus facile, mais c’est possible. J’ai une productrice formidable et assez d’argent pour pouvoir tourner. Mes films ne coûtent pas cher. On tourne durant six semaines et tout le monde est payé au tarif syndical. Personne n’a de caravane et on voyage tous ensemble en bus. Il n’y a pas de hiérarchie.
Pourquoi continuez-vous à faire des films?
Peut-être parce que c’est la seule chose que je sais faire. Et que c’est une bonne façon d’éviter les embrouilles (rires).
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The Angels’ Share
En salle dès vendredi