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«Lequel est un Basquiat»: le chaos maîtrisé de Philippe Racine 

Philippe Racine Photo: Valérie Remise/Gracieuseté

Lequel est un Basquiat, création de Philippe Racine qui mêle les arts de la scène, l’art pictural et la musique en direct, n’a rien de conventionnel. À l’instar de l’œuvre du peintre américain Jean-Michel Basquiat, la pièce est un «chaos maîtrisé», qui invite à la réflexion sociale sans être un spectacle intellectuel.  

L’artiste multidisciplinaire Philippe Racine est à la fois l’auteur, le metteur en scène et l’unique interprète de la pièce. Cette dernière suit Samy, jeune grapheur montréalais d’origine haïtienne, à qui l’on offre de fabriquer de faux tableaux de Jean-Michel Basquiat en échange d’argent.  

Lui-même d’origine haïtienne, Philippe Racine a découvert Basquiat vers la fin de son adolescence. «Rapidement, je me suis mis à écrire sur lui, autour de lui, à gribouiller et à faire de la musique. J’étais vraiment inspiré par Basquiat», se souvient-il en entrevue avec Métro

Conservé dans les tiroirs de Philippe Racine, un texte récité au festival du Jamais Lu, en 2012, est devenu cette pièce lorsque l’artiste a proposé d’en faire un spectacle avec la compagnie du Théâtre de La Sentinelle, dont il est le directeur artistique. 

Si sa création porte à la réflexion sociale, elle n’est pas «un spectacle intellectuel», même si on «peut l’intellectualiser» en raison des sujets traités, qui servent de «point de départ pour aller vers l’émotion et la sensibilité», fait-il valoir.   

Trois entités sur scène 

Seul sur scène – à l’exception de Valérie Bourque, qui assure la régie – Philippe Racine représente à la fois trois entités durant son spectacle: Samy, Basquiat et Philippe, explique-t-il. 

En effet, à quelques reprises, le comédien brise le quatrième mur pour s’adresser directement au public en tant que lui-même.  

Philippe Racine, qui a fait du théâtre d’intervention auprès des jeunes de Montréal-Nord pendant 10 ans, désirait transposer cette partie de son métier dans un théâtre institutionnel. «Ça demande qu’on brise le mur, qu’on parle avec des gens, qu’on les engage directement dans l’œuvre», mentionne-t-il.  

Pour ce qui est du protagoniste Samy, Philippe Racine explique qu’il s’agit de son alter ego, avec 20 années en moins. «Basquiat, c’était un type qui se cherchait. Samy, c’en est un qui se cherche et moi aussi, mais à différents âges», précise-t-il.  

Gérer le chaos 

Entre les toiles projetées, la musique live, les narrations enregistrées juxtaposées aux répliques et toute la mise en scène mouvementée, Lequel est un Basquiat est un spectacle quelque peu chaotique.  

Cela rappelle l’habitude qu’avait Jean-Michel Basquiat de créer dans la cacophonie des rues de New York. «Quand il peignait, il y avait souvent de la musique qui jouait et des gens autour de lui. Il marchait sur ses toiles. Il prenait une pause et recommençait à créer. C’est très frénétique comme travail», commente Philippe Racine.  

Bien que les tableaux du peintre aient une apparence désordonnée, ils se démarquent aussi par leur technique, ce qui fait de ceux-ci un «chaos maîtrisé», pense M. Racine.  

Ce dernier voit d’ailleurs le chaos comme sa source d’inspiration principale.  

Notre nature est chaotique. La nature en général est chaotique. Ce que l’humain cherche à faire, c’est gérer le chaos et créer du sens avec ce chaos. C’est ce que j’essaie de faire avec la pièce. 

Philippe Racine

Manque de modèles 

Ce qui fascine le plus Philippe Racine chez Basquiat, c’est sa recherche de connexion avec son identité et avec l’héritage afro-descendant américain. «Moi, c’est quelque chose que je cherchais aussi, des modèles. Et des modèles noirs québécois, je n’en ai pas tant», souligne-t-il. 

Selon lui, c’est ce manque de représentation qui rend si difficile la recherche d’authenticité pour les premières générations d’immigrants au Québec. 

Toutefois, Philippe Racine ne se voit pas nécessairement lui-même comme un modèle. «Tant mieux si certains peuvent me voir comme un modèle, mais ce n’est pas ce que je revendique», dit-il.  

Or, il pense que Sentinelle, dont la mission est de promouvoir et de faire rayonner la diversité culturelle québécoise sur la scène théâtrale, peut inspirer les personnes qui lui ressemblent.  

Il estime que le Québec est en retard en matière de représentativité sur scène. «Ça fait 400 ans qu’il y a une présence noire ici et c’est maintenant qu’on sent qu’on a vraiment notre place», pense celui qui se réjouit d’enfin sentir une écoute de la part des institutions et du public.  

Lequel est un Basquiat est présenté au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui jusqu’au 5 octobre. 

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