Culture et citoyenneté Québécoise: Un cours prometteur pour la cohésion sociale
Nous avons été ravis des orientations annoncées par le ministre de l’Éducation Jean-François Roberge dimanche, concernant le nouveau cours Culture et Citoyenneté Québécoise qui remplacera le cours d’Éthique et Culture Religieuse (ECR), au plus tard à l’automne 2023.
Il est inutile de rappeler les innombrables critiques du cours ECR depuis sa création en 2008 et toutes les démarches entreprises par des groupes de citoyens et de parents pour demander son abolition. À travers le volet « culture religieuse », les jeunes étaient encouragés à s’identifier par des appartenances religieuses figées et souvent représentées dans les manuels scolaires par les pratiques religieuses les plus conservatrices, en contradiction avec les valeurs d’égalité des sexes, de liberté et de laïcité. Par ailleurs, le respect d’autrui, étant confondu avec le respect de sa vision du monde et de ses croyances, l’élève était amené à éviter la critique des croyances et des dogmes religieux. Pour ce faire, les religions étaient présentées sous leur meilleur jour, en évitant de mentionner les conflits entre les pratiques religieuses et les choix de société, ou l’intolérance des religions les unes par rapport aux autres ou encore vis-à-vis de ceux qu’ils appellent les « mécréants ».
Contrairement à ECR qui, en exacerbant les différences religieuses et ethniques, pouvait renforcer l’enfermement communautaire, le nouveau cours sera axé sur la citoyenneté et la participation à la vie civique en mettant l’accent sur le socle commun de la vie en société. La liberté de conscience, l’égalité des sexes et la laïcité de l’État seront, selon ce qui a été avancé en conférence de presse dimanche, présentées comme des valeurs québécoises non-négociables, ciment d’une citoyenneté commune. C’est une excellente nouvelle! Nous nous réjouissons en particulier du fait que la religion ne soit plus présentée comme le fondement de l’identité de l’individu, mais bien comme un élément culturel parmi d’autres, comme la langue, l’histoire, l’art, et abordée en tant que tel dans le cadre de la culture du Québec et des sociétés.
Par ailleurs, tandis qu’ECR donnait une place prépondérante à la liberté religieuse, comprise dans un sens très large englobant le respect absolu des pratiques religieuses, le nouveau cours mettra l’accent sur la liberté de conscience et le développement de la pensée critique. La liberté religieuse, qui est un cas particulier de la liberté de conscience, est ainsi ramenée à une réelle liberté, confrontée à la délibération et à la diversité des idées, et non pas à un enfermement communautaire immuable.
Nous sommes enfin très heureux de constater que l’accent sera mis sur le développement de la réflexion éthique et de la pensée critique. Celle-ci est au cœur du projet éducatif, et toutes les visions du monde, quel qu’elles soient, peuvent et doivent être critiquées et confrontées aux réalités de notre époque. À cet égard, le ministre semble avoir pris acte de la polarisation du débat public ambiant (les bons et les méchants) et a clairement exprimé sa volonté de contrer la culture du bannissement, la censure, les entraves à la liberté d’expression, les tabous et tout ce qui empêche la remise en question des dogmes, comme c’était le cas avec l’ancien cours. La question de la mise en œuvre sera déterminante, mais la volonté de cultiver une réelle délibération citoyenne est bien présente.
Les nouvelles orientations annoncées constituent ainsi un pas important dans la bonne direction. Contrairement au cours ECR, elles sont à même de permettre l’atteinte des objectifs fixés de cohésion sociale. Cependant, la concrétisation de ces orientations sera le facteur déterminant du succès de ce nouveau cours. La production de matériel pédagogique pertinent, solide et concret, ainsi que la formation et l’accompagnement des maîtres à ce nouveau contenu, seront essentiels.
L’implantation de ce cours rencontrera inévitablement des résistances. Nous espérons que tous collaboreront pour permettre la mise en œuvre, le plus tôt possible, de ce nouveau programme, tourné vers la formation d’une citoyenneté commune.
Nadia El-Mabrouk et Claude Kamal Codsi pour le Rassemblement pour la laïcité