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Une journée sans hijab

Photo: Istock/Motortion

LETTRE OUVERTE – Ce 1er février 2022 constitue le 5ième anniversaire du #NoHijabDay, soit la journée sans hijab, initiée par la canadienne Yasmine Mohammed. Il s’agit d’une journée de solidarité et de soutien à celles qui veulent enlever leur hijab, l’ont enlevé ou s’opposent à son objectif misogyne.

Cet anniversaire coïncide, cette année, avec la campagne #LetUsTalk, Laissez-nous parler, qui a incité de nombreuses personnes de culture musulmane, d’ici et d’ailleurs, à partager leurs photos d’enfance en hijab alors qu’elles étaient forcées à le porter et à s’exprimer sur l’idéologie islamiste. Ces femmes disent se faire accuser d’islamophobie lorsqu’elles racontent leurs histoires et affirment craindre l’idéologie islamiste. Elles demandent à être entendues.

Au Canada

Le Conseil national des musulmans canadiens reconnait que le hijab est obligatoire dans certaines familles musulmanes canadiennes et peut mener à des conflits familiaux ou entre pairs.

Ce fut le cas de Yasmine Mohammed qui a été contrainte par la violence à porter le hijab dès l’âge de 9 ans, puis le niqab à l’âge de 19 ans. Lorsqu’elle a retiré son hijab, à l’âge adulte, sa mère a menacé de la tuer. À cause du hijab, elle s’est retrouvée en rupture avec sa famille et elle ne l’a pas revue depuis maintenant presque 20 ans.

D’autres cas existent tels que, par exemple, ceux de deux adolescentes âgées de 16 ans. Aqsa Parvez, une jeune Ontarienne qui refusait de porter le hijab, a été tuée par son père et son frère tandis qu’une adolescente de Victoriaville, mariée de force et contrainte par son fiancé à porter le hijab, a dû fuir le domicile familial de peur d’être frappée.

Consciente des dangers qui pèsent sur celles qui désirent s’affranchir du hijab, Mme Mohammed précise, dans le cadre de la campagne #NoHijabDay, qu’elle ne demande pas aux femmes de retirer leur hijab.

Pression sociale

Évidemment, la journée #NoHijabDay ne vise pas à créer un préjudice aux femmes qui adhérent à un certain fondamentalisme religieux. La liberté de religion et de conscience constitue un droit fondamental qu’il faut défendre. L’adhésion à des pratiques religieuses doit être volontaire et quiconque doit pouvoir y mettre un terme s’il le souhaite.

Il faut néanmoins être conscient que dans chaque groupe, qu’il soit ou non religieux, s’exerce une certaine pression pour que ses membres continuent d’y adhérer et de se conformer à ses normes. Mais, quand cette pression s’accompagne de menaces, de contraintes ou de violences psychologiques ou physiques, la situation doit être dénoncée.

Droit des femmes à l’égalité

Si la liberté religieuse est une liberté fondamentale qui mérite d’être défendue, elle ne saurait justifier de restrictions aux droits des femmes. Des traditions qui entravent, à des degrés divers, l’égalité ou l’autonomie des femmes, existent partout et elles doivent aussi être dénoncées.

Rappelons que plusieurs traités internationaux reconnaissent que la liberté de religion peut être limitée par le droit d’autrui tels le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et la Déclaration sur l’élimination de toutes les formes d’intolérance et de discrimination sur la religion ou la conviction (Déclaration sur la religion).

Accusations d’islamophobie

De toute évidence, le débat s’envenime lorsqu’on y intègre la notion ambigüe d’islamophobie. Notons que certains musulmans sont parfois eux-mêmes aussi accusés d’islamophobie. Selon Sami Aoun, cofondateur de la Chaire UNESCO en prévention de la radicalisation et de l’extrémisme violents, « le plus souvent, cette notion est acceptée sans distance critique et est utilisée par complaisance ou est instrumentalisée par activisme. »[1]

Il est important d’écarter les accusations d’islamophobie qui sont adressées aux femmes qui racontent leurs histoires et de les écouter attentivement si l’on veut atteindre une véritable égalité entre les sexes dans notre société.

Comme le dit si bien Yasmine Mohammed : « Mon travail de soutien aux féministes du monde musulman est nuancé et éreintant. Dans mon organisation, Free Hearts Free Minds, j’entends constamment des femmes dont la vie a été ruinée à cause de ce morceau de tissu. Il est profondément insultant et exaspérant de voir des personnes qui ne comprennent pas notre combat pontifier sur cette question. »

La force collective des femmes a été et est encore la condition sine qua non de la conquête de leurs droits et de leurs avancées sur le terrain de l’égalité. Des hommes ont aussi, de tous temps, accompagné les femmes dans cette quête. Ensemble, nous devons appuyer la journée sans hijab et la campagne #LetUsTalk pour une société plus juste et égalitaire.

Marie-Claude Girard


[1] Aoun, Sami. Penser la citoyenneté : Laïcité, pluralisme et islam, Médiaspaul, 2021, 258 p.

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