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Un Syrien réfugié dans un aéroport risque d’être déporté par la Malaisie

Photo: Courtoisie

Un réfugié syrien qui est resté pendant sept mois dans un terminal de l’aéroport de Kuala Lumpur, en Malaisie, et qui voulait immigrer au Canada, a été arrêté par les autorités malaisiennes, mardi. Métro s’était entretenu avec lui cet été.

«J’imagine un avenir meilleur», avait confié Hassan al-Kontar à Métro lors d’une entrevue par Skype. «Par contre, je suis épuisé, j’en peux plus. J’ai l’impression que je vais bientôt atteindre un point de rupture», avait-il expliqué.

Après avoir été refusé ou expulsé de plusieurs pays, Hassan al-Kontar avait peur de se présenter aux douanes malaisiennes car il craignait les conditions dangereuses auxquelles s’exposent les migrants syriens dans ce pays, qui n’est signataire d’aucun traité international sur les droits des réfugiés.

Il risque désormais d’être déporté vers la Syrie, pays qu’il a fui, car il pourrait y être emprisonné et torturé pour ne pas avoir complété son service militaire obligatoire. Il était à l’aéroport de Kuala Lumpur depuis le 7 mars.

Le directeur du département de l’Immigration malaisien, Mustafar Ali, a justifié son arrestation par l’activisme de Hassan al-Kontar sur l’internet. «Ses propos sur les médias sociaux faisaient honte à la Malaisie», a-t-il déclaré à l’agence officielle Bernama avant d’ajouter qu’il «communiquerait avec l’ambassade syrienne pour faciliter la déportation vers son pays».

Amnistie internationale a réagi hier en décriant l’arrestation d’Hassan al-Kontar et affirmant qu’il serait «aberrant qu’on le déporte en Syrie, étant donné que la situation y est dangereuse et que sa sécurité y serait compromise».

M. Kontar voulait particulièrement immigrer au Canada. Il avait déposé une demande de parrainage privé, le 25 avril 2018, avec l’aide d’un petit groupe de Canadiens. Sa demande a officiellement été approuvée le 17  juillet, ce qui signifie qu’à partir de cette date, la procédure peut prendre plus de deux ans.

«Nous avons demandé au ministère de l’Immigration d’accélérer le processus, mais nous n’avons pas reçu de réponse», a expliqué à Métro Laurie ­Cooper, une résidante de Whistler, en Colombie-Britannique.

Elle dirige Canada Caring, un organisme qui tente d’organiser des parrainages privés de réfugiés au Canada, en vertu du programme fédéral qui permet l’immigration de Syriens.

«Immigration et réfugiés Canada traite habituellement les demandes selon le principe du premier arrivé, premier servi. La demande de résidence permanente de M. Kontar (…) demeure dans le délai de traitement publié de 22 mois», a fait savoir le ministère de l’Immigration canadien.

Pour l’avocat en droit de l’immigration, Éric Taillefer, le cas d’Hassan n’appelait pas nécessairement à une accélération du processus, qui est en soit très long. «Il faut vérifier l’identité, s’assurer qu’il n’y pas de passé criminel, et avec la situation en Syrie, ce n’est vraiment pas évident, a-t-il énuméré. Il n’y a aucune obligation internationale ou en termes de droit interne qui forcerait le Canada à accélérer ce processus.»

Le représentant canadien du Haut-Commissariat pour les réfugiés de l’ONU (HCR), Jean-­Nicolas Beuze, était au courant de la situation d’Hassan al-Kontar. «Le HCR lui a offert des solutions et il rest[ait] dans l’aéroport de son plein gré», a affirmé M. Beuze, interrogé en août.

Le HCR en Malaisie a demandé à avoir accès à Hassan et le considère comme une «personne d’intérêt» qui a droit à la protection internationale. Le ministère de l’Immigration canadien a confirmé hier à Métro que M. Kontar pourrait bénéficier d’un traitement accéléré, sous recommandation du HCR, «au moyen du Programme de protection d’urgence».

Une histoire compliquée
Les déboires d’Hassan al-
Kontar ont commencé en 2011, lorsque la guerre a éclaté en Syrie. Issu de la minorité druze et originaire du village de Dama, dans le sud de la Syrie, il a travaillé légalement aux Émirats arabes unis comme consultant en marketing de 2006 à 2011.

Alors que tous les hommes syriens doivent effectuer un service militaire, M. Kontar a décidé de ne pas retourner en Syrie. «La guerre n’est pas une solution, je ne voulais m’engager ni parmi les rebelles, ni dans l’armée gouvernementale», a-t-il expliqué.

Faute de se présenter pour faire son service militaire, Hassan a vu son passeport être annulé par la Syrie, ce qui l’a rendu «illégal» aux Émirats arabes unis. Il y a travaillé au noir comme sans-papiers avant d’être expulsé, début 2018, vers la Malaisie.

À partir de là, il a tenté d’aller au Cambodge, pays duquel il a été expulsé. Il s’est alors installé dans le terminal de la compagnie Air Asia, à Kuala Lumpur, où les employés lui apportent de la nourriture chaque jour et où il peut se laver dans les toilettes pour personnes à mobilité réduite. Il y a vécu pendant sept mois avant d’être arrêté.

Laurie Cooper a expliqué que Hassan a de la famille au Canada. Il a d’ailleurs fait une entrevue d’embauche et a décroché un emploi au pays. «Il serait un membre actif de la société», a­
-t-elle affirmé. Laurie Cooper n’a pas répondu au courriel de Métro lui demandant de l’information sur la situation d’Hassan al-
Kontar depuis son arrestation.

Pour Hassan, le Canada représentait une lueur d’espoir. «Le Canada est vraiment humain. Il y a de la compassion, en dépit de votre race, votre genre, votre religion. Pas seulement le gouvernement, les gens aussi. C’est une question de communauté», a-t-il affirmé.

«Le chapitre de l’aéroport n’est qu’une partie de l’histoire, a raconté M. Kontar. L’histoire, c’est la tragédie du peuple syrien. Nous sommes rejetés, détestés, seuls. Ils annulent nos billets d’avion, nous refusent le passage vers d’autres pays. Nous voulons vivre avec des droits fondamentaux. Je veux la paix».

Le chapitre de l’aéroport de Kuala Lumpur semble désormais clos pour Hassan, mais un autre, plus sombre, s’ouvre pour lui.

«Les annonces pour les vols sont devenues comme une torture. Il y a toujours des gens, de la lumière.»

Hassan al-Kontar, réfugié syrien qui a vécu dans l’aéroport de Kuala Lumpur pendant sept mois pour éviter d’être déporté en Syrie, décrivant ses conditions de vie.

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