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Le président américain a commis des actes passibles de destitution, selon des experts en droit

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Noah Feldman, professeur de droit à Harvard et Pamela Karlan de l'université Stanford ont témoigné lors de la procédure de destitution de Donald Trump. Photo: Alex Wong/Getty Images
Rédaction - Agence France-Presse

Trois professeurs de droit ont jugé mercredi que la procédure de destitution contre le président américain, Donald Trump, était justifiée et même nécessaire pour protéger la démocratie américaine, s’attirant les foudres des élus républicains qui les ont accusés de partialité lors d’une audition fleuve au Congrès.

Ces experts, invités par la majorité démocrate de la Chambre des représentants, ont été contredits par un confrère, convié lui par les républicains, qui a jugé les preuves «insuffisantes» pour mettre le président en accusation («impeachment»).

Donald Trump est dans la tourmente parce qu’il a demandé à l’Ukraine d’enquêter sur Joe Biden, l’un de ses adversaires potentiels lors de la présidentielle de 2020. Les démocrates sont convaincus qu’il a abusé de son pouvoir à des fins personnelles, notamment en gelant une aide militaire destinée à cet allié en conflit avec la Russie.

Le président républicain nie avoir exercé des pressions sur Kiev et a encore dénoncé mercredi une «blague» démocrate, jugeant honteuse la tenue d’une audition alors qu’il se trouve à Londres pour un sommet de l’Otan.

Après deux mois d’enquête marqués par l’audition de 17 témoins, les parlementaires ont entamé en son absence le débat juridique pour déterminer si sa conduite correspondait à l’un des motifs de destitution mentionnés dans la Constitution: «trahison, corruption ou autres crimes et délits majeurs».

Sans hésiter, trois professeurs d’université prestigieuses ont répondu par l’affirmative.

«Si l’on ne peut pas mettre en accusation un président qui utilise son pouvoir à des fins personnelles, nous ne vivons plus dans une démocratie, nous vivons dans une monarchie ou une dictature», a notamment estimé Noah Feldman, professeur de droit à Harvard, devant la commission judiciaire de la Chambre.

«Si le Congrès ne le destitue pas, la procédure de destitution aura perdu tout son sens, tout comme les garanties constitutionnelles destinées à empêcher l’installation d’un roi sur le sol américain», a renchéri Michael Gerhardt, de l’université de Caroline du Nord.

Pamela Karlan, de l’université Stanford, a elle accusé Donald Trump d’avoir commis «un abus de pouvoir particulièrement grave» en demandant à un pays étranger de l’aider à gagner l’élection.

Elle a souligné que la Constitution américaine ne donnait pas au chef de l’exécutif le pouvoir absolu d’un roi. «Donald Trump peut appeler son fils Barron, mais ne peut pas en faire un baron», a-t-elle plaisanté en référence au dernier fils du président.

Un enfant «doit être tenu à l’écart de la politique», a réagi sur Twitter sa mère Melania Trump. «Pamela Karlan, vous devriez avoir honte de vos courbettes politiques, évidemment partisanes», a-t-elle encore asséné.

Faire référence au fils du président «vous donne l’air méchante», lui a également dit l’élu républicain Matt Gaetz en l’interrogeant sur ses dons aux campagnes de plusieurs candidats démocrates.

Un peu plus tard, son confrère Tom McClintock a tenté de faire dire aux témoins –accusés par la Maison-Blanche d’avoir «un parti pris»– pour qui ils avaient voté en 2016.

Voix dissonante dans ce panel d’experts, Jonathan Turley, de l’université George Washington, a déploré le manque de «preuves directes» contre le président et la «précipitation» des démocrates. Dans ce débat, «il y a tellement plus de rage que de raison», a-t-il pointé.

De fait, chaque camp s’est montré virulent mercredi.

Donald Trump était «prêt à mettre en péril» la sécurité des États-Unis, a accusé l’élu démocrate Jerry Nadler, qui préside la commission judiciaire de la Chambre.

«Ce n’est pas une procédure en destitution, c’est un passage en force», a rétorqué le parlementaire républicain Doug Collins. L’enquête est «injuste», «les faits sont du côté du président», a renchéri Jim Jordan.

La commission judiciaire envisage quatre chefs d’accusation contre le président: abus de pouvoir, corruption, entrave à la bonne marche du Congrès et entrave à la justice. Si elle les retient, ils seront soumis à un vote en séance plénière à la chambre basse du Congrès, peut-être avant Noël.

Compte tenu de la majorité démocrate dans cette enceinte, Donald Trump devrait entrer dans les livres d’histoire comme le troisième président américain mis en accusation, après Andrew Johnson en 1868 et Bill Clinton en 1998, tous les deux acquittés ensuite.

Le Sénat, à majorité républicaine, serait ensuite chargé de juger le président et il faudrait une majorité des deux tiers pour le destituer, ce qui paraît très improbable.

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