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Canadien, un signe religieux?

journalistes Canadien

Je vous l’avoue: je suis inquiet pour l’avenir de mon Canadien. De notre Canadien. Oui, je sais, parler de «notre» Canadien (donc évoquer l’idée d’un «nous») en cette ère de particularismes déjantés sonne faux, mais que voulez-vous, j’ai toujours chanté faux. Pourquoi suis-je inquiet, donc? C’est qu’à la suite de la Loi 21 sur la laïcité de l’État, je crains que Canadien ne puisse plus, dans un futur proche, porter son célèbre uniforme tricolore tel qu’on le connaît lors de ses matchs.

C’est que, depuis toujours, on dit bien sûr que le hockey est le sport national au Québec, mais surtout, c’est devenu avec le temps notre religion. Si on concède que cela reflète la réalité, il va sans dire que l’un des symboles forts de cette pratique religieuse est le logo de Canadien.

Les fins observateurs rétorqueront que le gouvernement du Québec a choisi d’interdire, oui, les signes religieux, mais pour certains employés de l’État uniquement. Et Canadien, évidemment, n’a pas encore été nationalisé; bref, il s’agit d’une entreprise privée. Or, le premier ministre du Québec, François Legault, n’arrête pas de dire qu’il veut gérer l’État comme une entreprise privée. It’s more of the same, dirait-il dans un anglais déglingué.

Il y a aussi la question de l’autorité: les gens désormais interdits du port d’un signe religieux sont certains employés de l’État en position d’autorité. Si on admet que, dans l’esprit de M. Legault, l’État devrait être géré comme une business, on peut se demander dès lors si les joueurs de Canadien sont en position d’autorité. Réponse: il suffit d’avoir déjà vu un attroupement de fans autour des joueurs de Canadien lors d’un événement public pour comprendre qu’ils peuvent faire faire au monde ce qu’ils veulent. Bref, ils ont de l’autorité en sacrament.

Doit-on craindre alors que le premier ministre étende sa Loi 21 à Canadien? Je ne le crois pas. J’en prends pour preuve le fait qu’il (m’a jadis bloqué sur Twitter, mais ça c’est une autre question) a déjà affirmé sur Twitter qu’il était un fan fini de l’équipe.

Par contre, Simon Jolin-Barrette, lui, je ne le truste pas pantoute. J’ai rien contre lui, mais comme ma mère disait, «yinque à voir on voit ben». En fait, je le soupçonne d’être un fan fini du Nordiques qui ne s’est jamais remis du départ de son club pour le Colorado. En plus, je suis certain que son joueur préféré chez le Nordiques était un méta-jambon, genre Mike Hough ou Tony Twist.

Bon, capotons pas non plus, on n’en est pas là; mais n’empêche, imaginons la chose un instant. Si Jolin-Barrette s’attaque éventuellement à Canadien et tente de lui interdire le port de son logo religieux, la direction du club pourra se rabattre sur la clause grand-père et exiger que les joueurs ayant signé un contrat avant l’adoption de la loi continuent à porter l’uniforme sacré. Mais qu’en sera-t-il des joueurs qui signeront dorénavant avec Canadien? Devront-ils porter un chandail sans le logo du CH? Un autre chandail? Si oui, la Ligne nationale permettra-t-elle le port d’uniforme différencié au sein d’une équipe? Rien n’est moins sûr.

Si je ne me retenais pas, je dirais que Simon Jolin-Barrette est le Brad Marchand de la CAQ. Méfions-nous-en.

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