C Series: commande et cible ratée pour Bombardier
MONTRÉAL — Bombardier (TSX:BBD.B) a potentiellement décroché sa plus importante commande de C Series en près d’un an et demi, et ce, même si l’avionneur ratera sa cible des livraisons de cette famille d’avions en 2017.
La multinationale québécoise a signé une lettre d’intention avec un client européen non identifié pour une commande ferme de 31 C Series assortie d’options pour 30 appareils supplémentaires. Selon les prix catalogues, la portion ferme du contrat est évaluée à 2,4 milliards $ US.
Cette entente, qui devrait être finalisée d’ici la fin de l’année, survient après qu’Airbus eut annoncé le 16 octobre dernier une prise de participation majoritaire dans le programme de la CSeries sans verser de contrepartie financière.
Interrogé jeudi lors d’une conférence téléphonique avec les analystes pour discuter des résultats du troisième trimestre, le président et chef de la direction de Bombardier, Alain Bellemare, n’a pas voulu faire de lien direct entre la signature de la lettre d’intention et le partenariat avec le géant européen.
«Il y a un certain nombre de campagnes de ventes en cours et (la lettre d’entente) fait partie des dossiers sur lesquels nos équipes travaillent, a-t-il expliqué. Il faut du temps avant de conclure une entente.»
Le plus récent client de la C Series est le gouvernement de la Tanzanie, qui avait annoncé l’achat de deux CS300 en décembre dernier. En avril 2016, Delta Air Lines avait placé une commande pouvant atteindre 125 CS100.
M. Bellemare a toutefois convenu que l’alliance avec Airbus venait solidifier la confiance des clients à l’égard du programme de la C Series, au coeur d’une dispute commerciale avec Boeing (NYSE:BA) aux États-Unis.
Cible ratée
Puisque Bombardier ne reçoit pas suffisamment de moteurs, l’entreprise a fait savoir qu’elle livrera entre 20 et 22 C Series en 2017, ce qui est inférieur à sa prévision antérieure d’environ 30 appareils.
Néanmoins, les livraisons devraient doubler en 2018 pour osciller entre 45 à 55 avions.
«Il est trop tôt à ce moment-ci pour s’avancer sur un chiffre pour la prochaine année, mais ce sera probablement dans la partie inférieure de la fourchette», a indiqué le chef de la direction financière, John Di Bert.
Les retards sont attribuables à des problèmes de cadence chez Pratt & Whitney, le fabricant des moteurs, en raison de l’usure prématurée de certaines pièces. La filiale de United Technologies a retardé des livraisons prévues à Bombardier et Airbus afin d’offrir des moteurs de rechange aux compagnies aériennes qui exploitent des C Series ainsi que des A320 neo.
Pratt & Whitney a accepté de verser des avances de fonds à Bombardier dans le cadre de l’augmentation de la cadence de production de la C Series.
Le constructeur d’avions et de trains a par ailleurs affirmé être en bonne posture pour atteindre les objectifs de son plan de redressement qui doit culminer en 2020, même s’il a creusé sa perte nette au troisième trimestre terminé le 30 septembre.
Toujours dans le rouge
Bombardier a perdu 117 millions $ US, ou cinq cents US par action, comparativement à 94 millions $ US, ou quatre cents US par action, il y a un an.
De leur côté, les revenus ont affiché une progression de 2,6 pour cent, à 3,84 milliards $ US, en dépit des livraisons moins élevées que prévu de C Series. Les recettes ont progressé de 20 pour cent du côté de la division ferroviaire, dont le carnet de commandes atteint 33 milliards $ US.
«Nous prenons les décisions nécessaires afin de déployer la pleine valeur de notre portefeuille», a affirmé M. Bellemare, soulignant au passage la croissance des marges dans les secteurs des avions d’affaires et de la division du matériel roulant.
Seth Seifman, de J.P. Morgan, a noté que Bombardier avait utilisé 495 millions $ US de ses flux de trésorerie — un indicateur suivi par les analystes — au cours du trimestre. L’analyste s’attendait à ce que le montant soit un peu moins élevé.
Par ailleurs, M. Bellemare a estimé que Bombardier Transport pouvait continuer à tirer son épingle du jeu dans le secteur du matériel roulant malgré la récente alliance entre Siemens et Alstom et la présence d’un géant comme la société d’État chinoise CRRC.
«Nous allons continuer d’évaluer des transactions potentielles qui pourraient créer de la valeur pour nos actionnaires, a-t-il répondu, lorsque questionné à propos d’un éventuel regroupement entre Bombardier et un concurrent. Tout est possible, mais il faut que cela soit logique au plan stratégique.»
Les investisseurs ont réagi favorablement aux annonces effectuées par Bombardier, puisqu’en mi-journée, à la Bourse de Toronto, le titre de la société s’envolait de 16 cents, ou 5,76 pour cent, pour se négocier à 2,94 $.