L’islamophobie est bel et bien du racisme
Il devient de plus en plus difficile de nier l’existence de l’islamophobie, ce racisme qui vise les personnes de confession musulmane. Pourtant, même après un épisode aussi spectaculairement tragique que celui ayant eu lieu à Christchurch vendredi dernier, il se trouve encore des gens pour remettre en question l’existence de l’islamophobie, ou alors son illégitimité. Je propose de retourner à la base du phénomène et de réaffirmer qu’il s’agit d’une forme de racisme grave.
Plusieurs nient l’existence de l’islamophobe à partir de ce raisonnement: l’islam n’est pas une race, donc l’islamophobie n’est pas du racisme.
L’islam n’est effectivement pas une race. Il n’en demeure pas moins que les personnes de confession musulmane sont confrontées à des actes et des paroles racistes, précisément parce qu’elles sont musulmanes.
Le racisme est une idéologie qui trace une hiérarchie entre les êtres humains. Dans cette hiérarchie, des groupes se considèrent supérieurs et s’attribuent un ascendant sur d’autres groupes jugés inférieurs.
Ainsi, le racisme n’est pas seulement une affaire de couleur de peau. Il y a des racismes culturalistes, ou différentialistes, ou encore du néo-racisme, qui s’appuient sur d’autres facteurs que les prétendues différences biologiques. Ces racismes vont souvent mettre de l’avant une incompatibilité culturelle. Par exemple, quand on dit «l’islam n’a pas sa place au Québec», on fait appel à cette thèse de l’incompatibilité.
En réalité, ce n’est pas bien différent du racisme biologique, car les mêmes procédés se mettent en place: stéréotypes, généralisations, préjugés, etc. Et entraînent les mêmes conséquences: stigmatisation, discrimination, rejet, violence, etc.
Quand il y a attitude hostile, c’est du racisme, peu importe si c’est la couleur de peau, le nom de famille ou l’habit religieux qui est visé.
Ensuite, avec l’islamophobie (comme avec l’antisémitisme), un processus de racialisation s’opère. C’est-à-dire qu’on enferme socialement et politiquement un groupe dans une catégorie figée. Cette catégorie est stéréotypée, grossière et négative. En gros, on dit que ces gens n’ont rien en commun avec nous, qu’ils sont même un peu moins humains. Et parce qu’ils sont ainsi, il devient acceptable de les tenir à l’écart d’un emploi ou d’un logement, et même de leur refuser une politesse minimale.
Lorsqu’on a enfermé un groupe dans une catégorie «Autre», on peut même se réjouir que 49 personnes aient perdu la vie dans des circonstances dramatiques. Après la fusillade de Christchurch, il n’était pas difficile de trouver sur les réseaux sociaux des commentateurs satisfaits. À glacer le sang.
L’islamophobie est donc bel et bien du racisme. Nommer les choses par leur nom est l’étape la plus élémentaire pour comprendre ce qu’on a devant nous, et agir.
Ce texte est le premier d’une série de trois chroniques portant sur l’islamophobie.
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