Montréal mise sur la sensibilisation des employeurs pour réduire le taux de chômage des immigrants
La Ville de Montréal mettra en branle dès cet automne une vaste campagne de sensibilisation visant à convaincre les employeurs de la métropole du bien-fondé de recruter plus d’immigrants. Une mesure qui vise à réduire l’écart persistant entre le taux de chômage des nouveaux arrivants et celui de l’ensemble des Montréalais.
Grâce à une subvention de 1,6 M$ de la part de Québec déjà annoncée en février dernier, la Ville déploiera dès cet automne une vaste campagne de sensibilisation orchestrée par l’agence Publicis afin d’inciter les entreprises montréalaises à recruter plus d’immigrants.
La Ville créera ensuite «un cercle des gouverneurs» qui réunira des membres influents de quelque 200 entreprises de la métropole afin de convaincre ceux-ci d’avoir de s’engager concrètement à recruter plus de nouveaux arrivants. Une firme, qui n’a pas encore été sélectionnée, sera ensuite appelée d’ici deux ans à offrir aux entrepreneurs des «parcours de mentorat» pour aider ces derniers à faciliter l’intégration d’immigrants dans leur entreprise.
«Je ne vous cacherai pas qu’il y a des gens qui nous disent encore que le fait d’avoir un nom qui sonne étranger, ça va parfois les pénaliser [dans le processus d’embauche] et il semble qu’ils ne vont pas se rendre jusqu’à l’entrevue. Il faut se le dire, ce n’est pas systématique, mais ça arrive», a déclaré lundi la mairesse de Montréal, Valérie Plante, en marge d’une conférence de presse dans le Vieux-Montréal portant sur le lancement de la stratégie «Montréal, inclusive au travail», qui s’échelonne jusqu’en 2021.
Bien que des données de l’Institut de la statistique du Québec (ISQ) démontrent que le taux de chômage des immigrants est en baisse depuis quelques années dans l’ensemble de la province, l’écart entre le pourcentage d’immigrants sans emploi à Montréal par rapport à celui pour l’ensemble de la population de la métropole demeure important, particulièrement chez les nouveaux arrivants qui résident dans la métropole depuis cinq ans ou moins.
«On a une responsabilité de soutenir l’intégration, autant économique que sociale. Et on sait qu’une bonne intégration à la société, ça passe entre autres par l’emploi», a ajouté Mme Plante, qui a souligné que l’écart entre le taux de chômage des immigrants et celui de la population native est plus grand à Montréal qu’il ne l’est notamment à Toronto et à Vancouver, comme l’ont démontré certaines études canadiennes publiées dans les dernières années.
«Discrimination systémique»
Selon le professeur honoraire en démographie et en immigration à l’Université de Montréal (UdeM), Victor Piché, il est primordial de trouver des moyens de mettre fin à la «discrimination systémique» vécue par les immigrants, qu’il associe entre autres à un «biais culturel» de la part des entrepreneurs.
«On aime ça embaucher les gens qui ont le même accent de nous autres, qui sont allés dans les mêmes écoles», a illustré M. Piché, qui fait partie d’un comité d’experts consultés par la Ville pour réaliser cette stratégie.
Au-delà de la sensibilisation, l’expert, qui est également l’auteur du blogue Parlons immigration pour Métro, «il faut que les entreprises se mettent des objectifs quantitatifs. Il faut changer les pratiques d’embauche pour être plus ouverts aux CV, plus ouverts aux diplômes et à l’expérience [des immigrants]».
Bien que cette campagne de sensibilisation s’adresse avant tout au secteur privé, Mme Plante a noté que le secteur public sera aussi incité à être plus inclusif.
«On veut travailler avec les différents syndicats pour favoriser plus de diversité à même les différents corps de travail», a-t-elle souligné.