Caroline Duchesne, au front pour réduire les infections
Le poste de Caroline Duchesne, responsable du service de Prévention et de contrôle des infections (PCI), a été créé en juin au CIUSSS du Nord-de-l’Île-de-Montréal. Elle répondait aux besoins du personnel soignant pour mettre en place les mesures de préventions en pleine pandémie et leur apprendre à gérer les équipements de protection individuelle. Elle soutenait aussi les préposés aux bénéficiaires et les infirmières dans les CHLSD face à la peur de tomber malade.
Est-ce que votre service disposait de protocoles précis au moment où il a été mis en place?
Nous suivions les directives de l’Institut national de santé publique du Québec. Tout ce qui était scientifique nous venait de là. Nous devions tout simplifier pour que le personnel sur le terrain puisse facilement l’appliquer. On devait tout présenter sous forme d’algorithme en une page pour que le personnel puisse comprendre en un coup d’œil ce qu’il avait à faire.
Étiez-vous inondés d’informations alors que le virus était inconnu et que les scientifiques en apprenaient tous les jours?
Notre travail était de nous mettre à jour constamment. On utilisait aussi beaucoup nos outils sur intranet qu’on actualisait au fur et à mesure que la science évoluait.
Deviez-vous rassurer les gens alors que la situation évoluait constamment?
Ils avaient peur de se contaminer eux-mêmes, ou bien les usagers ou leurs familles. Et puis, les CHSLD sont des milieux de vie. Ce sont des maisons où on ne travaille pas beaucoup avec des équipements de protection individuelle (EPI). Il est rare que nous ayons des éclosions ou des contaminations. Là, on vivait une crise et tout le monde devait mettre une blouse, des gants, un masque. Mettre un équipement de protection ça prend de la pratique et un enseignement. C’était très stressant. Toute mon équipe a dû être sur le terrain pour gérer le stress.
La meilleure réponse au stress était donc de faire confiance aux EPI?
On leur disait que lorsqu’on utilise convenablement les EPI, on se protège ainsi que les autres. Les moments critiques, c’est quand on enlève notre équipement. C’est là qu’on se contamine le plus et qu’on doit faire très attention. On a mis l’accent sur la technique et on leur a enseigné comment procéder pour l’hygiène des mains quand on enlève notre équipement.
Comment avez-vous fait passer le message efficacement dans une situation aussi inattendue?
Le gros du personnel, ce sont des préposés aux bénéficiaires, qui travaillent auprès des usagers. On a formé des formateurs sur le terrain. On est allé chercher des champions et ce sont eux qui apprenaient à leurs collègues. On a fait aussi des capsules vidéo que les gens pouvaient suivre.
Qui mettait en place les protocoles de prévention avant la création de votre service?
On avait la Swat Team au début de la première vague. C’était une équipe d’une dizaine d’infirmières aguerries aux procédures qui étaient délestées des blocs opératoires ou des CLSC. Elles étaient venues volontairement faire de la PCI et faisaient la gestion des éclosions. Elles savaient, entre autres, quelles mesures prendre, quelles affiches accrocher au bon moment, quand les usagers ne devaient pas circuler dans les corridors.
Est-ce qu’elles devaient également rassurer le personnel inquiet pour sa santé?
Lors de la première vague, on a rapidement déployé aussi des dyades, des équipes de deux, par exemple une travailleuse sociale et une hygiéniste dentaire. Elles se déplaçaient dans les CHSLD pour donner des conseils de PCI aux employés et leur offrir un soutien psychologique. Cette formule a très bien fonctionné pour rassurer les gens.
Au plan personnel, quelles leçons tirez-vous après autant de mois passés à endiguer les contaminations dans les CHSLD ?
La prévention et le contrôle des infections appartiennent à tout le monde, pas seulement à l’équipe PCI. Qu’on soit usagers, travailleurs en cuisine, préposés ou infirmières, tout le monde a son travail à faire. Chacun doit se laver les mains et faire attention quand il porte un masque. Tous doivent être sensibles aux signes et symptômes chez les usagers ou le personnel et s’isoler quand c’est nécessaire. Chacun est un petit maillon d’une chaine. Il suffit qu’un se détache et il n’y a plus rien qui fonctionne.