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Le langage des enfants affecté par le confinement: que peuvent faire les parents?

Enfant masque
Une enfant portant un masque. Photo: 123rf
Yvonne Wren, University of Bristol, La Conversation - La Conversation

Par Yvonne Wren, University of Bristol

Pendant une grande partie de l’année, pandémie oblige, de nombreux enfants ont interagi beaucoup moins que d’habitude avec leurs enseignants, leurs amis et leur famille. Et la grande inconnue demeure l’impact sur leur apprentissage du langage.

Le confinement et les autres mesures contre la Covid-19 ont-ils affecté chez les enfants l’acquisition de compétences en matière de langage et d’élocution, si essentielles à leur développement scolaire et social? Et si c’est le cas, que peuvent faire les parents pour y remédier?

Une récente enquête menée par l’Education Endowment Foundation auprès des écoles et des parents a révélé que les enfants qui ont commencé l’école à l’automne 2020 avaient besoin de plus de soutien que ceux qui avaient commencé l’école avant.

Les résultats les plus préoccupants touchent le développement de la communication et du langage, pour lequel 96% (55 sur 57) des écoles ont déclaré être «très préoccupées» ou «assez préoccupées». Viennent ensuite le développement personnel, social et émotionnel (91%) et l’alphabétisation (89%); des compétences qui dépendent largement du développement de solides capacités d’élocution, de langage et de communication.

Impact des différents confinements

Les parents ont fait un travail considérable tout au long de la pandémie pour garder leurs enfants en sécurité et en bonne santé. Et le fait d’avoir eu peu d’activités à leur disposition et de ne pas avoir pu fréquenter la famille élargie ne leur a certainement pas facilité la tâche.

Cette situation a forcément nuit à l’apprentissage d’un nouveau vocabulaire – à des mots plus variés qui pourraient être utilisés, par exemple, lors d’une sortie à la ferme ou à l’occasion d’une visite chez grand-maman. Cette limitation a son importance, car nous savons que l’étendue du vocabulaire à l’âge de deux ans influence les performances des enfants à leur entrée à l’école, et joue sur les résultats scolaires des années subséquentes.

Impact du port du masque

Le port généralisé du masque pendant la pandémie nous a également fait réaliser l’importance de la lecture labiale sur la compréhension. L’impossibilité de voir les lèvres bouger, combinée à l’atténuation du son causé par le masque, constitue une barrière pour comprendre ce que disent les gens autour de nous. C’est particulièrement vrai pour les nombreux enfants atteints d’otite séreuse, une affection qui peut entraîner une perte d’audition temporaire, dans la petite et moyenne enfance.

À l’école et à la prématernelle, les enfants peuvent avoir du mal à différencier des sons similaires, comme le «p» et le «t», lorsque leur enseignant porte un masque. Cela peut avoir un impact sur le développement de la parole de l’enfant ou sur sa conscience phonologique, qui est la capacité à décomposer les mots en sons pour faciliter l’apprentissage de la lecture et de l’orthographe.

Les masques dissimulent également l’expression du visage, qui fait intrinsèquement partie du processus de compréhension du sens des mots. Lorsque cette expression n’est pas visible, non seulement le risque de malentendu (et de mauvais apprentissage) augmente, mais cela peut également avoir un impact sur le développement des compétences sociales et émotionnelles des enfants.

Accès à la thérapie

Bien que le confinement ait pu nuire au développement de la parole et du langage de tous les enfants indistinctement, ceux qui étaient déjà les plus à risque sont susceptibles d’avoir été affectés de manière disproportionnée. Plusieurs d’entre eux auront besoin d’une thérapie du langage et de l’élocution pour y remédier.

Selon un rapport du Royal College of Speech and Language Therapists, 62 % des enfants ayant besoin d’une thérapie orthophonique n’y ont pas eu accès lors du premier confinement (d’après une enquête menée auprès de plus de 400 parents). Quand cela était possible, les services étaient fournis à distance. Cependant, la même enquête a révélé que 19 % des enfants n’aimaient pas avoir une thérapie orthophonique sur vidéo, tandis que 12 % étaient incapables de suivre la session.

Au Québec, les listes d’attente en orthophonie explosent. Plus de 11 400 enfants patientent actuellement pour recevoir des services dans les établissements de santé.

Les enfants nés avec une fente palatine font partie de ces groupes à haut risque de problèmes de développement du langage. Afin d’étudier l’impact du premier confinement, des chercheurs de l’Université de Bristol ont demandé aux parents d’enfants atteints de cette pathologie d’évaluer l’efficacité de la prise en charge orthophonique à distance.

Parmi les 212 répondants, 26 % ont déclaré qu’elle était très efficace, tandis que les autres ont dit qu’elle était plutôt efficace (67 %) ou pas du tout efficace (8 %). Certains parents ont déclaré qu’ils estimaient que les rendez-vous vidéo étaient « mieux que rien ».

Que faire pour aider les enfants?

Les parents peuvent utiliser plusieurs méthodes efficaces pour aider leur enfant dans l’apprentissage du langage. Dès la naissance, parlez à votre bébé de tout ce qui semble attirer son attention. Utilisez des phrases simples et rendez votre voix attrayante en utilisant plusieurs intonations et expressions faciales. Les bébés et les jeunes enfants aiment les répétitions et en ont besoin. Si votre enfant regarde un autobus, parlez-lui abondamment de l’autobus, en décrivant son aspect, ses déplacements et en répétant souvent le mot «autobus».

Les mêmes méthodes fonctionnent lorsque l’enfant grandit. Parlez-lui des choses qui l’intéressent. Répondez à ce que votre enfant dit et fait, afin qu’il puisse donner une signification à des mots et des phrases. Maintenant que les restrictions sanitaires sont assouplies, vous pouvez favoriser l’évolution du vocabulaire chez votre enfant en visitant des bibliothèques, des fermes urbaines, des parcs et des jardins, et en rencontrant des amis et des membres de la famille.

Des organismes tels que I CAN, l’association caritative pour la communication des enfants dont je suis membre, ont développé des ressources que les parents peuvent utiliser afin d’aider leurs enfants d’âge préscolaire et de niveau primaire à parler et à écouter.

Avec de la stimulation, la plupart des enfants feront rapidement des progrès. Pour les enfants qui continuent à montrer des difficultés, il sera nécessaire de les faire évaluer par un professionnel de la santé, un enseignant ou un orthophoniste.

Yvonne Wren, Chercheur principal et directeur au Bristol Speech and Language Therapy Research Unit, à University of Bristol

La version originale de cet article a été publiée sur La Conversation.

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