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L’inclusion radicalisée 

Heather Johnston, directrice générale de Projets Autochtones du Québec (PAQ), en compagnie de Valérie Plante, la mairesse de Montréal Photo: Naomie Gelper/Métro

LETTRE OUVERTE – La mairesse de Montréal Valérie Plante aime se vanter d’être inclusive.

Déjà, en 2018, elle répétait que l’inclusion figurait parmi les principes fondamentaux de son administration et dévoilait un plan d’action costaud intitulé «Montréal inclusive», celui-ci prévoyant une trentaine de résolutions. Il y a dix jours, la mairesse injectait 5,1 millions de dollars dans 38 projets d’organismes communautaires qui s’engageront dans les prochains mois à faciliter l’inclusion des personnes immigrantes et à lutter contre le racisme et la discrimination.

Évidemment, nul ne peut être contre la vertu, nous rappelle le dicton.

En revanche, l’inauguration, vendredi le 22 janvier dernier, par l’administration Plante d’un tout nouveau refuge ouvert uniquement aux itinérants autochtones soulève quelques questions. L’idéologie inclusive est-elle véritablement sans défaut ou ne se contente-t-elle pas à l’occasion de se réclamer d’une conduite vertueuse ? Se pourrait-il par ailleurs que malgré ses nobles intentions, l’idéologie inclusive abrite en son sein un courant plus radical, celui-ci entretenant un rapport incestueux avec la pratique discriminatoire ?

Si le projet de refuge exclusivement accessible aux itinérants autochtones a été présenté aux citoyens comme une ressource spécialisée et que ces sans-abris ont depuis lundi accès à un site de consommation d’alcool supervisée sur place, il est déplorable que l’administration Plante n’ait pas à justifier le caractère ouvertement discriminatoire défendu par la mission de ce tout nouveau refuge.

Alors que les météorologues avancent que janvier 2022 aura été le mois le plus froid depuis 15 ans au Québec et qu’il manque des centaines de lits pour les sans-abris à Montréal, la détresse aurait-elle décidé la semaine dernière de se découvrir une origine ethnique particulière ? Aurait-elle maintenant une couleur de peau ?

Quiconque s’est déjà promené à Montréal sait pertinemment que l’itinérance n’a pas de visage parce qu’il n’y a jamais eu de sens, encore moins de logique à la détresse. Quiconque a déjà parcouru les rues de la métropole sait aussi que ce ne sont pas seulement les itinérants membres des communautés autochtones qui sont aux prises avec des dépendances sévères à l’alcool.

Il est évident que les itinérants d’origine autochtone méritent une attention. Toutefois, cette attention ne saurait être particulière sans être profondément cruelle. Des soucis d’égalité et de dignité semblent avoir été balayés du revers de la main par la mairesse.

Bien que choquante, cette initiative de l’administration municipale ne présentait toutefois rien de surprenant vendredi. C’est qu’au même titre que le programme de 93 millions de dollars en soutien aux entrepreneurs noirs instauré en 2020 par le gouvernement Trudeau, un refuge accessible seulement aux itinérants autochtones appartient définitivement au courant radicalisé de l’idéologie inclusive. Un courant qui a réhabilité la race comme condition sociale alors qu’on pensait être en voie de pouvoir l’expulser de notre imaginaire. Un courant qui divise les individus selon la couleur de leur peau, qui hiérarchise la détresse et qui comme tous les radicalismes, est traversé par la violence et les contradictions. Alors que l’hiver est loin d’être terminé et que de trop nombreux sans-abris se font déjà refuser l’entrée dans les refuges parce qu’il ne reste tout simplement plus de places, voilà qu’on leur refusera maintenant l’accès parce qu’ils ne sont pas autochtones.

On ne manquera pas ici de souligner cet énième volte-face d’une idéologie qui ose un peu trop souvent se présenter à la manière d’une cause parfaite, vigilante et défenseure de toutes les minorités.

Rémi Villemure

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