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Malgré le déconfinement, la santé mentale des travailleurs encore très fragile

Santé mentale
Le prolongement de la période de confinement a occasionné des défis pour le maintien d'une bonne santé mentale. Photo: Gerd Altmann/Pixabay

Les employeurs canadiens répondent encore trop peu aux besoins en santé mentale de leurs salariés. Une enquête réalisée auprès de 3000 répondants entre le 29 mai et le 9 juin révèle que plus du tiers (34%) des travailleurs estiment avoir reçu un soutien «incohérent, médiocre ou très médiocre» pendant la pandémie.

 «À long terme, les répercussions d’une santé mentale précaire persistante ne préoccupent pas seulement les particuliers, mais également les organisations et les gouvernements en raison de la hausse des coûts liés à la santé et à l’invalidité, et aux retombées négatives sur la participation de tous à l’économie […]. Il faut en faire plus», lâche le président de Morneau Shepell, Stephen Liptrap.

Spécialisée en ressources humaines, cette société torontoise fait paraître chaque mois, depuis avril 2020, son Indice de santé mentale. Celui-ci mesure et quantifie la productivité au travail, le risque lié à l’anxiété, l’isolement ou encore l’humeur générale des employés.

Au Québec, cet indice est «toujours en baisse», constate le rapport. Il affiche un résultat de -10,9 par rapport au score de référence «pré-COVID», qui était de 75. En mai, la variation avait été de -12,3. Plus l’employeur prend en considération les besoins de ses employés, plus ceux-ci se portent mieux. Ainsi, chez les répondants qui estiment avoir été «très bien» pris en charge, la variation n’est que de -1. Mais pour ceux qui parlent d’une réponse «très médiocre», ce chiffre chute de 26 points.

«Tout le monde a été pris de court»

Pour l’avocate et spécialiste en droits de l’emploi, Marianne Plamondon, la difficulté d’intervenir auprès des employés en temps de pandémie est surtout due au caractère inédit de la situation. «Tout le monde a été pris de court, tranche-t-elle. C’est un changement drastique que tout le monde a trouvé dur. Et comme on ne pouvait pas se voir, les possibilités étaient plus limitées. C’est sûr que ça a eu des impacts.»

Maintenant, il faut passer à l’action, convient l’associée du cabinet Langlois avocats. «Pour anticiper la deuxième vague, c’est important que les employeurs mettent en place des vraies politiques de télétravail, donc de mettre des lignes claires sur l’utilisation du temps par exemple», ajoute la juriste. Elle souligne que le déconfinement sera aussi l’occasion d’adapter nos lois du travail, qui n’encadrent pas jusqu’ici le télétravail.

«Ça démontre la nécessité de trouver d’autres façons de créer des liens avec ses employés. Il faut réussir à tisser un sentiment d’appartenance sans la présence au travail. Ça prend un contact plus authentique.» -Marianne Plamondon, avocate en droits du travail

Après la crise, les employeurs qui ont été présents pour leurs salariés seront d’ailleurs les grands gagnants, fait remarquer Mme Plamondon. «On était déjà en pénurie de main-d’œuvre au Québec, donc quand la PCU va finir, ça sera à nouveau difficile de recruter dans plusieurs secteurs. Les employeurs qui ont maintenu un bon milieu de travail auront une bonne longueur d’avance», dit-elle.


Santé mentale et gouvernements

Aux yeux de la vice-présidente à la recherche de Morneau Shepell, Paula Allen, ces données démontrent que la santé mentale des Canadiens devra être surveillée de très près pendant le déconfinement, «alors que les gens retournent au travail et que de nouveaux agents stressants émergent». La clarté des consignes sanitaires et l’aménagement des espaces de travail seraient d’ailleurs la principale source d’inquiétudes.

«Les gouvernements peuvent soutenir de deux manières. D’abord, en reconnaissant que de nombreux employeurs sont petits, n’offrent pas d’avantages sociaux ou n’ont pas l’infrastructure nécessaire pour bien soutenir les employés pendant une crise», explique-t-elle à Métro.

Selon elle, les pouvoirs publics doivent aussi «indiquer aux employeurs que ce qu’ils font est important pour la santé mentale», dit Mme Allen. «La formation, les ressources, la sensibilisation contre la stigmatisation font tous une différence. Les gouvernements peuvent aider à amplifier ce message», renchérit-elle.

Pendant le confinement, plusieurs professionnels de la santé mentale s’étaient inquiétés des conséquences psychiques qu’aurait l’isolement de la population, surtout chez les plus vulnérables.

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