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Procès Maxi: les parents de la victime témoignent

Photo: Archives/FELIX O.J. FOURNIER
Stéphanie Marin et Pierre Saint-Arnaud, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

MONTRÉAL — «Elle s’appelait Clémence, elle avait 20 ans et toute la vie devant elle», a déclaré en ouverture, mercredi, la juge Hélène Di Salvo avant d’envoyer Randy Tshilumba au cachot pour le reste de ses jours, sans possibilité de libération conditionnelle avant 25 ans.

La sentence du jeune homme de 21 ans venait clore une journée très chargée émotivement, où la famille et les proches de Clémence Beaulieu-Patry avaient préalablement livré des témoignages prenants au palais de justice de Montréal.

Les parents de la jeune femme assassinée l’an dernier dans un supermarché Maxi de Montréal avaient été les premiers à livrer au tribunal un vibrant hommage à leur fille plus tôt dans la journée.

«Tu nous as été arrachée», ont lancé en sanglotant Nathalie Beaulieu et Luc Patry, qui ont décrit leur fille disparue comme une personne lumineuse, aimante et pacifique.

Ils ont demandé qu’une photo de Clémence soit projetée sur les écrans dans la salle de cour lors de leur déclaration présentée dans le cadre des observations sur la peine.

Randy Tshilumba a été reconnu coupable par un jury vendredi dernier du meurtre prémédité de la jeune femme. Elle est morte après avoir été poignardée 14 fois alors qu’elle travaillait dans un marché Maxi de l’est de Montréal, le soir du 10 avril 2016. Elle n’avait que 20 ans.

La tenue du procès les a replongés dans le cauchemar, ont dit les deux parents, ensemble à la barre des témoins.

Ils ont parlé de leur fille, s’adressant directement à elle, en se rappelant ses qualités et sa personnalité.

«Nous voudrions tant voir ton sourire (…) toucher tes cheveux, a déclaré Mme Beaulieu en pleurant. La maison est si vide sans toi.»

Ils ont parlé de ses rêves qui lui ont été volés, comme celui de visiter la Grèce avec son amoureux.

«Nous t’aimerons à tout jamais. Repose en paix fille chérie».

Les parents ont aussi parlé du deuil traumatique qu’ils vivent, de la tristesse et de la colère qui les habitent, soulignant qu’ils ne dorment qu’avec grande difficulté et qu’ils ne peuvent plus travailler.

Ils ont précisé que le verdict leur apporte une certaine paix.

«Dans 25 ans, si nous sommes toujours vivants, nous serons là pour nous opposer à sa libération conditionnelle», ont-ils promis.

Pendant plus d’un mois, Mme Beaulieu et M. Patry ont assisté à l’intégralité du procès.

La procureure de la Couronne, Me Catherine Perreault, a souligné que la déclaration d’impact des victimes est «l’occasion qu’on doit avoir dans le système pour permettre aux familles de s’exprimer (…) Particulièrement dans un dossier de meurtre, la victime étant décédée, les proches souvent n’ont pas de rôle, n’ont pas la chance de s’exprimer.»

«Dans le cas du dossier de Clémence, son décès a touché une onde qui est beaucoup plus grande que sa famille immédiate. Ça va à sa famille, sa famille élargie, ses amis», a fait valoir la juriste.

Des membres de la famille élargie et des amies de la victime ont d’ailleurs aussi témoigné, avec difficulté et émotion: ses amies ont dit avoir désormais peur de nombreuses choses, dont marcher le soir. Elles ont parlé de leur confiance évaporée et du vide avec lequel elles vivent.

«Une partie de moi vient de mourir», a déclaré l’une d’entre elles.

Pinel? Au SCC de décider

Randy Tshilumba, âgé de 21 ans, avait plaidé non coupable.

La théorie de la défense était que le jeune accusé souffrait d’un trouble mental et qu’il était convaincu que la victime voulait l’abattre, ainsi que d’autres clients du Maxi. Il a admis l’avoir tuée et a plaidé la non-responsabilité criminelle pour cause de trouble mental. Des psychiatres ont soutenu cette thèse.

L’accusé ne considérait donc pas avoir fait de mauvaises choses le soir du 10 avril 2016 et il avait des idées délirantes, avait fait valoir au procès son avocat, Me Philippe Larochelle.

De son côté, Catherine Perreault, l’avocate de la Couronne, avait plaidé le meurtre prémédité, thèse que le jury a retenue.

Notant qu’il n’y avait pas de suggestion commune de la défense et de la Couronne, la juge Di Salvo a refusé de se rendre à la demande de l’avocat de l’accusé, qui voulait que le tribunal ordonne une détention à l’Institut Philippe-Pinel.

«L’accusé souffre probablement d’un trouble mental», a d’abord admis la magistrate, avant d’ajouter: «Ce sera au SCC (Service correctionnel Canada) de décider quels seront les besoins médicaux pour l’accusé (…) À ce stade-ci, le tribunal ne peut se prononcer sur les soins précis qui seraient requis pour M. Tshilumba.»

Puis, avant de prononcer le verdict de prison à perpétuité sans possibilité de libération avant 25 ans — une peine automatique dans les cas de meurtre prémédité — Hélène Di Salvo s’est adressée aux parents.

«Votre courage, votre dignité auront aussi marqué ce procès», a-t-elle dit, tout en reconnaissant que le verdict ne leur redonnerait pas leur fille, mais elle a dit espérer «qu’il vous apportera une certaine paix et qu’avec la fin des procédures judiciaires, votre deuil pourra enfin continuer tranquillement.»

«Elle s’appelait Clémence, a repris la juge en terminant, et nous nous en souviendrons.»

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