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Saint-Henri se mobilise pour une mendiante

Madame Doris, son chien Bella et un ami Sylvain reçoivent de la nourriture pour la fête de Noël. Un cadeau donné par l’organisme de Saint-Henri, Velvet Hearts Canada. Photo: (Photo: Gracieuseté –Velvet Hearts Canada

Une mendiante fort connue de Saint-Henri, Madame Doris, a péri dans un incendie la semaine dernière. Des citoyens se mobilisent maintenant pour offrir des funérailles dignes de la générosité de la dame de 61 ans.

Chaque jour, beau temps mauvais temps, été comme hiver, Madame Doris était postée en face de la SAQ de la rue Atwater avec sa fidèle chienne Bella. «Elle était petite et frêle. Le visage marqué de rides comme autant de cercles dans le tronc d’un vieil arbre coupé. Sociable et souvent souriante, on l’appelait Madame Doris par respect», témoigne Claude Chevalot, une traductrice de métier qui lui a rendu hommage, mardi matin.

«Malgré sa situation précaire, elle était toujours positive. Tout le monde l’aidait en lui offrant de la nourriture pour elle et son chien», raconte de son côté Diane Gervais, une amie qui s’est occupée de trouver une famille d’accueil pour l’animal.

En décembre, Madame Doris et sa chienne Bella ont été chaudement habillées, grâce à des dons offerts par l’organisme Velvet Hearts Canada. Photo: Facebook

La femme était à son tour très généreuse. «Doris avait un grand cœur et pensait toujours aux autres. Je lui apportais un peu de bouffe et elle me faisait des cadeaux, dont un pyjama neuf qu’elle avait reçu», raconte Caroline Joly, qui organise une campagne de financement afin de défrayer les coûts des obsèques de la mère de son meilleur ami, Jason.

Doris Bafaro a succombé à ses brûlures subies après avoir été coincée par les flammes dans son appartement de la rue Beaudoin, dans l’arrondissement Sud-Ouest. L’incendie, qui a éclaté peu avant 22h le 10 septembre, a nécessité deux alertes et mobilisé une cinquantaine de pompiers.

Sous le choc, Jason peine à trouver les mots pour exprimer sa douleur. «Je prenais soin d’elle et elle prenait soin de moi, on s’aidait mutuellement. Je viens de perdre ma confidente et ma meilleure amie», confie Jason. Âgé de 36 ans, il est présentement sans emploi et sans logis.

Le jour du drame, il avait laissé une note sur la table de l’appartement où sa mère dormait avant d’aller passer la soirée chez son amie Caroline. Le lendemain, il a revu sa mère grièvement blessée à l’hôpital.

Résilience

Le documentaire Saint-Henri, 26 août, produit en 2011, relate la vie de cette dame qui ramassait des bouteilles et des canettes vides à travers les ruelles du quartier. Une façon pour elle «de voir son monde», disait-elle.

Au Marché Atwater, des marchands lui offraient les légumes invendus qu’elle redistribuait à ses amis. Aujourd’hui, plusieurs témoignent de la résilience de cette femme qui a vécu de l’aide sociale durant une grande partie de son existence. Plus jeune, elle avait séjourné quatre ans dans un pénitencier de Joliette et s’était jurée de ne plus jamais y retourner.

«Madame Doris faisait partie intégrante de notre communauté. Son sourire va nous manquer», souligne Sabrina Sabbah, fondatrice de l’organisme Velvet Hearts Canada, qui travaille avec les itinérants et leur animal de compagnie. En décembre, elle lui avait offert à manger, ainsi qu’à deux de ses amis, mendiants eux aussi.

«Après toutes les difficultés qu’elle a surmontées, c’est tragique de périr de cette manière-là»- Sabrina Sabbah, fondatrice Velvet Hearts Canada

Arrivée dans le quartier depuis deux ans, Claude Chevalot, croisait souvent Madame Doris. «J’aimais prendre de ses nouvelles, explique-t-elle. Elle a été malade l’été dernier et a souffert d’une pneumonie. Elle a guéri et a repris sa place avec son chien.»

Mme Chevalot a pleuré en apprenant son décès. «Madame Doris, c’est un personnage de notre quartier. J’avais développé une affection particulière pour elle. Elle ne se plaignait jamais», confie-t-elle, précisant que le drame illustre la réalité de ces femmes laissées pour compte, forcées de quêter pour subsister, même en 2019.

Caroline Joly tente d’organiser des funérailles à Doris, la mère de son ami Jason.

D’ici quelques jours, une cérémonie devrait avoir lieu à l’église de Saint-Henri. L’événement est encore en préparation. Plus de 1264 $ avait été recueilli en date du 17 septembre. Une fleuriste du quartier a offert spontanément une gerbe de fleurs pour les funérailles.

En savoir plus sur Doris: On visionne gratuitement  Saint-Henri, 26 août
https://www.onf.ca/film/a_st-henri_le_26_aout/>

 

 

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