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Résidences de tourisme: Sonder envahit un secteur résidentiel du Plateau-Mont-Royal

L'Édifice Guérin, à l’angle des rues Drolet et Mont-Royal Photo: Josie Desmarais

L’étalement de l’entreprise Sonder dans la métropole se poursuit. Des organismes appréhendent les répercussions qu’aura la conversion d’un immeuble abandonné en plus de 50 unités destinées aux touristes sur la quiétude et le prix des loyers dans un secteur résidentiel du Plateau-Mont-Royal.

L’édifice, situé à l’intersection de la rue Drolet et de l’avenue Mont-Royal, a abrité pendant plusieurs années une entreprise spécialisée dans l’édition de manuels scolaires. Il a ensuite été laissé à l’abandon à la suite du départ de l’entreprise, qui opère aujourd’hui à Saint-Jean-sur-Richelieu.

Depuis quelque temps, néanmoins, des travaux sont en cours pour rénover l’immeuble de cinq étages, situé dans un quartier à dominante résidentielle. À proximité, on retrouve plusieurs commerces locaux de même que la station de métro Mont-Royal.

Contourner la réglementation?

Cette situation est due au fait que l’arrondissement du Plateau-Mont-Royal a accordé l’an dernier un permis d’hôtel pour permettre la construction par Sonder de 53 unités sur ce site. L’entreprise espère rendre celles-ci accessibles à ses clients «vers la première moitié de l’année 2020».

«L’emplacement a été choisi en raison de la demande en matière d’hébergement touristique dans ce quartier vivant de Montréal», indique Sonder par courriel, tout en rappelant que cet immeuble était vacant «depuis quelques années».

L’entreprise est un compétiteur d’Airbnb qui construit et acquiert des logements pour ensuite les mettre à louer à court terme sur son site web. Elle brouille toutefois les lignes entre les résidences de touristes, comme celles offertes sur Airbnb, et les hôtels traditionnels. Ce qui lui permet de se glisser dans un flou réglementaire.

«Pour nous, c’est un peu une manière d’agir de la compagnie pour contourner la loi parce qu’elle sait qu’elle ne peut pas faire de résidences de tourisme dans ces zones-là. Au final, même si c’est fait de manière légale, ce sont quand même des touristes qui vont finir par se retrouver dans cet immeuble-là», déplore l’organisatrice communautaire du Comité logement du Plateau-Mont-Royal, Cloé  Fortin. 

Marché locatif

Le Plateau-Mont-Royal fait partie des arrondissements montréalais où les besoins en matière de logements locatifs sont les plus grands, ce qui contribue à la hausse des prix des loyers et aux évictions de locataires.

«Cet immeuble aurait pu être transformé en logements sociaux et abordables [à louer]», estime le porte-parole du Regroupement des comités logement et associations de locataires du Québec, Maxime Roy-Allard.

«Ça vient changer complètement un quartier. […] Pour les gens qui vivent autour, ça va avoir un impact fondamental.» – Maxime Roy-Allard

Permis de «plein droit»

Sonder affirme être une chaîne hôtelière, mais plusieurs experts consultés par Métro cet été en doutent. L’entreprise réussit ainsi à s’implanter à l’extérieur des secteurs commerciaux restreints où les résidences de tourisme sont permises dans l’arrondissement.

La proposition de Sonder pour l’immeuble en question prévoit d’ailleurs l’aménagement d’un bureau de réception, ce qui répond à la définition d’hôtel. L’immeuble étant situé au coin de l’avenue Mont-Royal, il dispose d’un zonage commercial, même s’il est entouré de logements.

«On va les avoir à l’œil, mais on ne pouvait pas ne pas émettre un permis comme ça. On parle d’un permis de plein droit», confirme à Métro le conseiller du district du Mile End, Richard Ryan. 

Ce dernier milite activement contre Airbnb, qui a contribué au retrait de milliers de logements du marché locatif de longue durée au pays.

«Ce qui me préoccupe le plus, c’est la perte de logements. Dans ce cas-là, il n’y a pas de perte de logements», souligne M. Ryan. 

Embourgeoisement

Des organismes craignent néanmoins que l’arrivée d’une cinquantaine d’unités luxueuses dans ce secteur résidentiel ne contribue à l’embourgeoisement du secteur. Une telle situation pourrait causer une nouvelle pression à la hausse sur les prix des loyers.

Selon le Front d’action populaire en réaménagement urbain, l’arrondissement aurait dû inciter la Ville à acquérir cet édifice alors qu’il était laissé à l’abandon.

«Si on se mettait à acheter tous les bâtiments qui sont laissés vides par des entreprises, on ne finirait jamais. La Ville n’est pas un gestionnaire de logements», réplique Richard Ryan.

 

 

 

 

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