Un bilan en demi-teinte pour l’Escouade mobilité
Alors que la Ville de Montréal dresse un bilan «impressionnant» du travail réalisé par l’Escouade mobilité au cours des dernières années, un expert réplique que cette équipe manque encore d’effectifs et de moyens technologiques suffisants pour assurer une gestion optimale des chantiers dans l’ensemble de la métropole.
Des fonctionnaires ont présenté mercredi matin, en séance du comité exécutif, un bilan des actions posées par l’Escouade mobilité depuis sa création, à l’été 2018. Au départ, celle-ci comptait six inspecteurs présents dans trois arrondissements centraux, avant d’étendre sa présence à trois autres arrondissements l’année suivante.
Depuis juin dernier, cette équipe compte maintenant 16 employés chargés de superviser les chantiers routiers dans l’ensemble des 19 arrondissements de la métropole. L’année 2020 a d’ailleurs représenté un record d’interventions pour l’Escouade mobilité: la Ville en dénombre 22 401 sur un peu plus de 30 000 depuis 2018. À titre comparatif, cette équipe avait réalisé 6783 interventions en 2019.
«Le bilan qui vient de nous être présenté est éloquent. Il démontre toute la pertinente et l’impact de l’Escouade mobilité pour faciliter les déplacements des Montréalais, que ceux-ci soient à pied, en transport collectif, en automobile ou encore en vélo», s’est réjoui le conseiller associé aux services aux citoyens et à la gestion des chantiers au comité exécutif, Jocelyn Pauzé.
Sans surprise, le son de cloche est bien différent du côté de l’opposition officielle.
«L’administration a beau se péter les bretelles avec son escouade, elle a quand même annulé le tiers de ses travaux pour 2021 parce qu’elle était incapable de bien gérer et coordonner ses chantiers», réplique pour sa part à Métro le chef intérimaire d’Ensemble Monréal, Lionel Perez, par écrit. Selon lui, les Montréalais n’ont pas ressenti les effets des interventions de ces équipes sur le terrain dans les dernières années.
Plus de 6000 constats d’infraction
Sur une base quotidienne, l’Escouade mobilité intervient notamment pour empêcher que des entrepreneurs privés opèrent un chantier en-dehors des heures autorisées par la Ville, pour modifier une signalisation déficiente ou encore pour libérer un arrêt d’autobus encombré par un véhicule, par exemple. L’an dernier, l’Escouade mobilité a également réalisé 1830 interventions reliées à l’aménagement des corridors sanitaires et des voies actives sécuritaires.
Les inspecteurs de cette équipe, qui ne relèvent pas du SPVM, ont aussi remis 6172 constats d’infraction, un pouvoir dont ils disposent depuis un peu plus d’un an.
«Quand l’Escouade mobilité intervient, ça a un impact», a fait valoir la mairesse de Montréal, Valérie Plante, qui a qualifié le bilan présenté mercredi d’«impressionnant».
Pas assez d’inspecteurs, selon un expert
Le chargé de cours en planification des transports de l’UQAM, Pierre Barrieau, ne partage toutefois pas cet avis. S’il reconnaît que cette équipe est pertinente, ses effectifs sont encore nettement insuffisants, selon lui, pour réponde à l’ampleur de la tâche à laquelle elle est confrontée quotidiennement. Cette équipe ne dispose même pas de suffisamment d’inspecteurs pour en déployer un par arrondissement, illustre-t-il.
«Est-ce que l’Escouade mobilité en fait suffisamment? La réponse est non. Il n’y a pas assez d’effectifs», tranche M. Barrieau. Des problèmes de signalisation routière autour de chantiers au centre-ville perdurent, constate-t-il notamment.
«L’idée de l’Escouade mobilité, c’est qu’elle est censée être suffisamment présente sur le terrain pour pouvoir régler les problèmes alors que maintenant, on est trop souvent dans une situation où il faut réagir parce que les effectifs ne sont pas assez importants.» -Pierre Barrieau, expert en planification des transports
Le chargé de cours propose par ailleurs que cette équipe se dote de technologies reliées à l’intelligence artificielle afin d’assurer une meilleure surveillance des chantiers. La Ville devrait aussi mettre en place une ligne téléphonique pour permettre aux citoyens de contacter directement l’Escouade mobilité, sans avoir à passer par le service 311, dont la lenteur a fait l’objet de plusieurs critiques, ajoute-t-il.
Une responsabilité partagée
La mairesse Valérie Plante a pour sa part rappelé ce matin que la Ville ne gère qu’environ 25% des chantiers dans la métropole. Plusieurs travaux relèvent notamment du secteur privé ou encore du gouvernement du Québec et de ses sociétés d’État.
«Oui, ça prend l’Escouade mobilité, mais aussi plus de responsabilisation et d’imputabilité de la part des autres donneurs d’ouvrage. La Ville de Montréal, avec son 25% [de chantiers sous sa gouverne], doit faire mieux, mais les autres joueurs dans la ville, qui occupent l’espace public, doivent aussi prendre leurs responsabilités et faire leur part», a affirmé Mme Plante.
Par ailleurs, en 2021, la Ville se donne comme cible de «pérenniser» la présence des inspecteurs de l’Escouade mobilité la fin de semaine. Cette équipe pourra aussi réaliser des remorquages «immédiatement» sur des voies réservés, lorsque nécessaire, afin d’éviter des entraves à la circulation routière.
Le budget 2021 de la Ville prévoit une somme de 1,7 M$ pour l’Escouade mobilité, en hausse par rapport aux années précédentes.