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L’eau, une priorité montréalaise

Photo: Collaboration spéciale

Les Montréalais sont les Canadiens qui se sentent le plus concernés par la pollution de l’eau et qui reconnaissent le plus l’importance d’investir dans les infrastructures de gestion de cette ressource, selon une étude pancanadienne de RBC. Pour répondre à leurs préoccupations en cette Journée mondiale de l’eau, Métro fait le point sur la gestion de l’eau à Montréal.

La qualité de l’eau rejetée dans le fleuve laisse à désirer, croit Gaëtan Breton, professeur de l’UQAM spécialisé en gestion de l’eau. Cela serait dû, selon lui, à l’inefficacité des systèmes de traitement de l’eau quant aux polluants rejetés par les industries. «Les industries rejettent des produits chimiques et des déchets que les systèmes de la ville, faits pour un usage domestique, ne peuvent pas complètement enlever», explique M. Breton. Les quantités d’eau utilisées par les industries, les commerces et les institutions dépassent d’ailleurs largement celles employées particuliers, qui n’en consomment que 20 %.

Autre problème, lorsque de fortes précipitations s’ajoutent à l’eau d’usage domestique et industriel, les réservoirs et les égouts atteignent souvent leur capacité maximale et débordent. Les surplus d’eau se déversent alors dans le Saint-Laurent sans avoir été traités, avec l’effet néfaste qu’on peut imaginer sur la pollution du fleuve.

L’état des infrastructures n’aide pas à régler ces problèmes. Laissées à l’abandon durant de longues années, elles sont désuètes. En fait, le tiers des 9 196 km de conduites d’aqueduc, certaines ayant été construites au XIXe siècle, ont atteint leur durée de vie utile. La ville a ainsi plus de bris de conduites secondaires que toute municipalité comparable. Mont­réal consomme deux fois plus d’eau potable que la moyenne des grandes villes américaines, et près de 47 % de cette consommation est attribuée aux fuites.

Des solutions

«Il faut viser les industries pour les forcer à consommer moins et à filtrer elles-mêmes leur eau», estime M. Breton. Il croit que pour améliorer la qualité de l’eau, la Ville de Montréal devrait user de son pouvoir politique et faire pression auprès des instances provinciales pour que des règlementations plus sévères soient adoptées.

Le verdissement des ruelles est une façon de réduire les risques de débordement et de déversement d’eau non traitée dans le fleuve, estime Jean-Patrick Toussaint, chef des projets scientifiques à la Fondation David Suzuki. L’eau qui tombe sur des terrains gazonneux est absorbée en grande partie par la terre, contrairement à celle qui tombe sur l’asphalte. «Les citoyens peuvent aussi récupérer l’eau de pluie, qui leur sera utile plus tard pour l’arrosage et pour réduire leur propre consommation d’eau», note M. Toussaint. Les éco-quartiers, notamment, offrent des barils pour la récupération de l’eau de pluie au coût de 20 $.

Selon le collectif citoyen Eau Secours, il est également possible de réduire la consommation de façon importante en changeant certains équipements qui utilisent de l’eau, autant dans les résidences que dans les industries et les institutions. M. Breton est également de cet avis. «Un urinoir utilise autant d’eau dans une journée qu’une famille de quatre personnes, affirme-t-il. Pourquoi ne pas remplacer des appareils sanitaires de 23 litres par d’autres de 7 litres?»

Ce que fait la Ville

La Stratégie montréalaise de l’eau 2011-2020 prévoit un budget d’investissement et de fonctionnement de 8,5 G$ sur 10 ans. Elle s’attaque à la plupart des problématiques de gestion de l’eau de la ville, d’abord en entreprenant une importante remise à niveau des infrastructures. «De nombreuses conduites ont été inspectées, entretenues et remplacées, et les travaux continuent», affirme Hervé Logé, porte-parole du Service de l’eau de la Ville de Montréal. M. Logé reconnaît toutefois qu’il reste beaucoup de travail à faire pour remédier au déficit d’entretien.

Pour ce qui est du contrôle de la pollution de l’eau, M. Hervé affirme que des inspecteurs visitent les industries et que les plus grands pollueurs sont pénalisés par des redevances. La Ville s’est aussi engagée à instaurer la désinfection de l’eau par l’ozone dans sa station d’épuration, un procédé qui augmentera de beaucoup la qualité de l’eau rejetée.

La Ville prévoit par ailleurs construire quatre bassins de rétention d’ici 2015, qui se rempliront lorsque les pluies trop intenses menaceront de créer des débordements. L’administration municipale est aussi derrière le programme de subvention qui permet aux éco-quartiers de distribuer des barils de récupération d’eau aux citoyens. Pour faire de la sensibilisation à la consommation responsable, la Patrouille bleue de la Ville parcourt les communautés locales, les écoles, les commerces et les institutions publiques.

Ces mesures ont-elles déjà eu des impacts? Peut-être, car la Ville se targue d’avoir réduit sa production d’eau potable de 392 millions de mètres cubes au cours des 7 dernières années. M. Logé, lui, voit les résultats du sondage RBC concernant l’attitude des Mont­réalais à l’égard de l’eau comme une très bonne nouvelle. «Ça prouve qu’il y a une conscientisation croissante à l’égard de cet enjeu, dit-il. Que nos efforts de sensibilisation, en quelque sorte, fonctionnent.»

Un nouveau programme

L’Institut international de l’aquaresponsabilité municipale, lancé mercredi, propose une certification pour les villes qui veulent évaluer et améliorer leur gestion de l’eau. Par le biais d’un audit, il propose d’examiner toutes les actions prises pour gérer les ressources de façon responsable, de donner une note sur 5 à la municipalité, de formuler des recommandations et d’assurer un suivi. La Ville de Québec a déjà fait l’objet d’un projet-pilote. Quant à la Ville de Montréal, elle a indiqué ne pas être prête à se positionner sur la question. Richard Bergeron, chef de la deuxième opposition officielle, juge plus important que Montréal acquière une expertise interne en matière de gestion de l’eau.

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