Les politiques à la remorque de l'innovation citoyenne
Les négociations internationales sur les changements climatiques se poursuivent présentement à Durban en Afrique du Sud. Sur le front des négociations multilatérales, les nouvelles ne sont pas très bonnes. Il sera difficile de trouver un accord pour prolonger le protocole de Kyoto. Malheureusement, Peter Kent, ministre de l’Environnement du gouvernement Harper sera à Durban… pour accumuler les prix fossiles. Le Canada a déjà fait l’objet de plus de prix fossiles que tous les autres pays (ces prix sont remis chaque jour aux pays qui nuisent le plus aux négociations sur le climat).
La bonne nouvelle c’est que Monsieur Kent ne représente pas le point de vue des Canadiens. Alors que les sondages sur Kyoto démontrent qu’une écrasante majorité de Canadiens (incluant les Albertains, soit dit en passant) appuient le célèbre protocole, M. Kent milite pour son abolition. Qui plus est, il menace la communauté internationale de s’en retirer, stratégie à peine voilée pour tenter de se soustraire des pénalités de plusieurs milliards de dollars qui seront imposées au Canada s’il n’atteint pas ses objectifs.
Sans doute que vous êtes bien au fait que le Canada a la pire performance de réduction des émissions de tous les pays industrialisés. Alors que nous avions pris l’engagement de réduire de 6 % nos émissions, elles ont augmenté de 25 % depuis 1990 et, grâce aux sables bitumineux, elles continueront de croître à un rythme effarant.
Depuis presque 20 ans, je fais partie de ceux qui demandent à Ottawa de mettre en œuvre un plan de réduction des gaz à effet de serre. Nous avons proposé toute une série de mesures qui, en plus de réduire les gaz à effet de serre, auraient des effets positifs sur l’économie et/ou la santé des gens.
Pendant de nombreuses années, nous étions peu écoutés. Aujourd’hui, la population, les municipalités, les provinces et un nombre grandissant d’entreprises (petites et grandes) sont derrière nous.
En dépit de ces appuis et considérant l’immense retard que nous avons pris, certains se demandent s’il est encore réaliste de demander au Canada de réduire ses émissions de gaz à effet de serre au rythme que nous le demandent les scientifiques.
Le Québec a, pour sa part, adopté un ambitieux objectif de réduire de 20 % ses émissions d’ici 2020. Or, l’atteinte de cet objectif risque d’amener des bénéfices économiques à la province qui produit de l’énergie éolienne, des trains et des autobus mais qui doit importer le pétrole et le gaz naturel.
Les bénéfices pour le Canada seraient certes moins importants à court terme, mais à long terme, l’impact économique serait aussi positif et considérable.
Le seul exemple de la Maison du développement durable qui consommera 65 % moins d’énergie que si elle avait été construite selon les standards en vigueur démontre toute la marge de manœuvre économique qui existe. Voilà un exemple ou la technologie devance, et de loin, la réglementation gouvernementale.
C’est aussi le cas d’une foule d’autres secteurs. Je pense à Hydro-Québec qui développe un réseau pour véhicules électriques, à Bombardier qui développe des avions hyper efficaces et des trains rapides, aux pétrolières qui investissent dans l’énergie solaire et éolienne, aux investisseurs qui imposent des critères de durabilité aux entreprises qu’elles financent … Dans chacun de ces secteurs, il y a des exemples de technologies et de façons de faire qui ont le potentiel de réduire de 60 % et plus les émissions de gaz à effet de serre.
Dans plusieurs cas, il manque un geste gouvernemental : un règlement, une loi, une politique ou un petit incitatif financier pour que la technologie sorte de la marginalité et se déploie à grande échelle.
Nelson Mandela a déjà dit : cela a toujours l’air impossible jusqu’au moment où c’est fait.
Que 190 pays se réunissent présentement à Durban, me donne espoir. Que des projets concrets de réduction de gaz à effet de serre poussent partout sur la planète, me donne confiance qu’un changement de cap majeur est possible.
En dépit de vous, MM. Kent et Harper, nous réussirons à réduire les gaz à effet de serre. Nous viendrons à bout des changements climatiques, un bâtiment à la fois, s’il le faut!