Soutenez

La peur transmissible aux enfants, selon une étude

Beautiful mother is comforting her sad little daughter at home. Family relationships. Photo: Getty Images/iStockphoto

MONTRÉAL — Les enfants pourraient apprendre la peur en observant leurs parents et les adultes en général, selon les conclusions d’une nouvelle étude présentée la semaine dernière au Congrès de l’Association francophone pour le savoir (ACFAS).

Alexe Bilodeau Houle, une étudiante à la maîtrise en psychologie à l’Université de Montréal, voulait étudier l’impact de l’environnement familial sur l’apprentissage de la peur chez les enfants, au-delà du facteur génétique. Son projet a été dirigé par une équipe du laboratoire de Marie-France Marin, qui est chercheuse au Centre de recherche de l’Institut universitaire en santé mentale de Montréal (CRIUSMM).

L’étudiante à la maîtrise et l’équipe de Mme Marin ont donc organisé une expérience pour déterminer si les stimulus de peur ressentis chez l’adulte pouvaient être transmis aux enfants par l’apprentissage, et il semble que ce soit bel et bien le cas, selon les conclusions.

Vingt-six couples d’enfants et de parents ont participé à l’étude. Les enfants étaient âgés de 8 à 12 ans, et parmi eux, il y avait 14 filles et 12 garçons.

Les parents étaient installés dans une salle, où on leur montrait des couleurs — une qui était associée à un choc électrique très léger, et une autre liée à un stimulus neutre, lors duquel rien ne se passait. Sans surprise, les adultes éprouvaient de la peur lorsqu’ils voyaient la couleur associée au choc.

Les enfants voyaient ensuite une vidéo de cette séance, avant d’être soumis au même test que les parents, évidemment sans recevoir de choc électrique. Les chercheurs ont alors mesuré la réaction à l’aide d’électrodes placées sur leurs corps, puisque la transpiration est un indice de peur. Les responsables ont aussi demandé après l’expérience aux enfants s’ils avaient eu peur à la vue de la couleur associée au choc.

Les chercheurs ont découvert que les enfants réagissaient davantage au stimulus négatif qu’au stimulus neutre. Et lorsque les jeunes participants parlaient aux chercheurs par la suite, ils disaient avoir éprouvé de la peur en voyant la couleur liée au choc électrique.

«C’est sûr que c’est une première étude, c’est un développement de protocole qu’on veut utiliser pour tester d’autres personnes par la suite. Mais pour l’instant, oui, ça semble être le cas, les enfants semblent apprendre la peur par observation», a expliqué Alexe Bilodeau Houle, en entrevue la semaine dernière.

«C’est important de comprendre que c’est une étude, donc ça prend plus de recherche», a-t-elle nuancé.

Autres observations de l’étude

Un autre résultat que les chercheurs ont pu tirer de cette expérience: les filles réagissaient davantage que les garçons au stimulus négatif.

«Il y a vraiment peu d’études sur l’apprentissage de la peur par observation, peu d’études chez les enfants aussi. Mais ce qu’on voit dans la littérature, c’est que pour les troubles anxieux et les troubles de stress post-traumatique, les femmes sont beaucoup plus à risque que les hommes», a-t-elle suggéré.

Mme Bilodeau Houle a aussi été surprise d’une autre conclusion de sa recherche: les enfants étaient aussi réceptifs aux réactions des étrangers. Les chercheurs ont appliqué la même procédure à une personne que l’enfant ne connaît pas, et même dans ces cas, il semblait apprendre de l’adulte.

«Dans la littérature, des enfants de cet âge-là, il ne semble pas y avoir de différence pour l’apprentissage d’un parent ou d’un autre adulte. Par contre, d’après ce que j’ai lu, les enfants plus jeunes, là il y aurait peut-être plus une différence», a-t-elle expliqué.

«C’est sûr que, de 8 à 12 ans, les enfants ont commencé à aller à l’école, ils ont d’autres personnes significatives dans leur entourage», a-t-elle ajouté.

Mme Bilodeau-Houle n’est pas rendue au point où elle peut donner des conseils aux parents, car les recherches sont encore à un stade préliminaire.

Mais si des études subséquentes démontrent que l’environnement familial joue un rôle majeur dans l’apprentissage de la peur, alors les chercheurs suggéreront peut-être des moyens de limiter la transmission.

«On n’est pas rendus là, mais c’est sûr que ce serait le but», a-t-elle conclu.

Articles récents du même sujet

Mon
Métro

Découvrez nos infolettres !

Le meilleur moyen de rester brancher sur les nouvelles de Montréal et votre quartier.