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Une survivante de Polytechnique accusée à tort de conflit d’intérêts

Adrian Wyld / La Presse Canadienne Photo: Adrian Wyld
Jim Bronskill, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

OTTAWA — La commissaire au lobbying du Canada a rejeté les plaintes portées contre une survivante de la tuerie de Polytechnique à qui l’on reprochait de militer pour le contrôle des armes à feu tout en siégeant au comité consultatif du gouvernement fédéral sur les armes.

La commissaire Nancy Bélanger a statué que l’implication de Nathalie Provost au sein de «PolySeSouvient» ne va pas à l’encontre des lois sur le lobbyisme, puisque la militante n’est pas rémunérée par l’organisme et n’a donc pas l’obligation de s’inscrire à titre de lobbyiste.

En entrevue avec La Presse canadienne, Mme Provost s’est réjouie de la décision de la commissaire Bélanger, même si elle savait pertinemment qu’elle n’était pas une lobbyiste. «En même temps, cela confirme la perception que j’avais (…) Depuis 2015 et 2016, on voit de plus en plus différentes stratégies et stratagèmes pour pouvoir nous faire taire, ou nous discréditer aux yeux de la population dans notre implication. À ce titre-là, je n’étais pas tellement surprise», a-t-elle souligné.

« »Tous contre un registre » au Québec avait voulu faire une manifestation le 6 décembre 2017, et (l’organisme) indiquait même qu’on était payé» pour faire partie du comité consultatif, «ce qui est tout à fait faux», rappelle Mme Provost. Cette rumeur circulerait d’ailleurs abondamment chez les militants pour le droit aux armes à feu, selon elle.

Celle qui a été atteinte par quatre balles lors de la tuerie perpétrée par un tueur antiféministe à Polytechnique, en 1989, milite depuis huit ans au sein de «PolySeSouvient», qui promeut un meilleur contrôle des armes à feu. Le groupe réunit notamment des étudiants et des diplômés de cette école affiliée à l’Université de Montréal.

En 2016, les libéraux fédéraux ont nommé Mme Provost vice-présidente du Comité consultatif canadien sur les armes à feu, qui a pour mission de conseiller le ministre de la Sécurité publique. Parmi ses dix membres figurent notamment un ancien juge de la Cour suprême, un chef de police, une championne de tir au pistolet, une experte en santé publique et un urgentologue.

Projet de loi contesté

En vertu du mandat du Comité consultatif canadien sur les armes à feu, il est interdit aux membres de se livrer à des activités de lobbyisme ou de travailler comme lobbyiste enregistré au nom d’une organisation qui présente des observations au gouvernement fédéral sur des questions liées au mandat du comité.

Un projet de loi fédéral, déposé en mars, élargirait la portée de la vérification des antécédents de ceux qui veulent acheter une arme à feu au Canada. La loi obligerait les détaillants d’armes à conserver des registres de leur inventaire et des armes vendues, et à s’assurer de la validité du permis d’armes à feu présenté par le client.

Le projet de loi a rapidement suscité une polarisation des réactions: certains l’on jugé trop timide, alors que les autres l’ont qualifié d’effort malavisé qui ne fera rien pour s’attaquer à la véritable criminalité armée.

Une représentante de la Coalition canadienne pour le droit aux armes à feu, qui représente les propriétaires d’armes, a déposé une plainte contre Mme Provost auprès de la commissaire au lobbying, alléguant qu’elle était en conflit d’intérêts. Le site internet «OneClearVoice.ca» proposait aussi un modèle type de lettre pour porter plainte à la commissaire au lobbying.

«Il faut se demander jusqu’où ira le gouvernement pour contenter Nathalie — et à quel prix, pour les millions de Canadiens touchés par (le projet de loi sur le contrôle des armes à feu), alors qu’aucun d’entre eux n’est un criminel, soit dit en passant», avait écrit sur son site web la Coalition canadienne pour le droit aux armes à feu.

Mme Provost a déclaré qu’avant de se joindre au comité consultatif fédéral, elle avait demandé et obtenu l’autorisation du cabinet du ministre de la Sécurité publique, Ralph Goodale, pour continuer à agir à titre de porte-parole de «PolySeSouvient», afin de ne pas perdre l’occasion de siéger au sein du comité consultatif.

Dans une lettre du 26 juin transmise à Mme Provost, la commissaire Bélanger indique qu’après avoir examiné diverses correspondances, mené des entrevues et consulté des documents accessibles au public, elle mettait fin à l’évaluation préliminaire des allégations. La Loi sur le lobbying ne s’applique qu’aux personnes qui sont rémunérées pour leurs activités de communication avec des fonctionnaires fédéraux, alors que Mme Provost est une bénévole, explique la commissaire.

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