Immigration, langue et rétention: il faut rétablir les faits
Selon le chef de la Coalition avenir Québec, François Legault, le fait que le Québec ait perdu 13 000 immigrants l’année dernière démontrerait l’échec de la politique d’immigration du Québec. Ce n’est pas ce qu’indiquent les statistiques.
Une étude du ministère de l’Immigration montre que la proportion des immigrants arrivés entre 2005 et 2014 et toujours présents en 2016 (ce que l’on appelle le taux de rétention) est passé de 67% en 2005 à 75% en 2014. Pour le Montréal métropolitain, le taux de rétention est présentement de 80,5%. Donc, les chiffres récents montrent plutôt une amélioration significative.
Cette amélioration est due principalement au changement dans la composition «linguistique» de l’immigration depuis les années 2000. Selon la même étude, entre les deux périodes 1991-95 et 2011-2015, le pourcentage des personnes immigrantes qui connaissent le français est passé de 35 à 60%.
Ce qui importe ici, du point de vue de la rétention, c’est de souligner que les taux de rétention varient selon la connaissance du français : plus on connaît le français, moins on quitte le Québec. Il est difficile avec ces statistiques de parler d’échec de la politique d’immigration du Québec.
Selon les chiffres récents, largement diffusés dans les médias, la proportion des immigrants connaissant le français à leur arrivée serait maintenant de l’ordre de 47% pour 2016 et de 42% pour 2017. Cette diminution dans la connaissance du français à l’arrivée s’explique principalement par l’augmentation importante de réfugiés au cours de ces deux années (9% en 2010 versus 17% en 2015).
L’origine des travailleurs qualifiés a changé depuis quelques années et pourrait constituer un autre facteur explicatif. Ceux-ci sont plus nombreux en provenance des pays d’Asie (et donc moins francophones). Le dernier bulletin statistique du ministère mentionne que des modifications ont été apportées en mars 2017 à la grille de sélection visant à donner plus de points à la connaissance du français. Il est encore trop tôt pour en mesurer les effets.
En bref, on doit conclure que les deux dernières années ne sont pas représentatives; ce serait une erreur de tirer des conclusions politiques sur celles-ci. Les chiffres présentés ici ne permettent pas de conclure à l’échec de la politique d’immigration québécoise. Si l’on veut parle d’échec, c’est vers la politique d’intégration, tant linguistique qu’économique, que l’on doit se tourner.