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Francophonie: Jean s'accroche, Trudeau lui parle

Sean Kilpatrick / La Presse Canadienne Photo: Sean Kilpatrick
Mélanie Marquis, La Presse canadienne - La Presse Canadienne

EREVAN, Arménie — Justin Trudeau a amorcé son séjour en Arménie en s’entretenant pendant environ une demi-heure avec la secrétaire générale sortante de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), Michaëlle Jean, mercredi soir. Rien n’a filtré de cette rencontre, qui survient alors que la Canadienne qui vient d’être larguée par son propre pays semble déterminée à s’accrocher jusqu’au bout.

Le bureau du premier ministre, qui n’avait pas avisé les médias au préalable de la tenue de cet entretien, n’a pas voulu dire ce qui s’est dit derrière des portes closes. Mais la position du gouvernement, elle, n’a pas changé, a indiqué une source gouvernementale: Ottawa se ralliera au consensus qui se dégagera des rencontres du sommet de la Francophonie.

Le dirigeant canadien est arrivé à Erevan avec le premier ministre désigné du Québec, François Legault, à qui il avait offert le transport à bord de l’Airbus du gouvernement canadien. Les deux hommes, dont les gouvernements avaient désavoué mardi la candidature de Mme Jean, espéraient avoir balayé sous le tapis l’enjeu de la course à la direction en foulant le sol arménien.

Mais c’était sans compter la combativité de la candidate. Cette dernière considère apparemment que son sort n’est pas encore tout à fait scellé. En fait, elle semble nier l’existence du «consensus» auquel Ottawa et Québec ont signifié leur intention de se rallier. «Un consensus suppose un débat qui doit se faire dans les règles», a fait valoir dans un courriel son porte-parole, Bertin Leblanc.

«Le sommet commençant demain (jeudi), nul doute que cette discussion aura lieu entre les chefs d’États et de gouvernements à huis clos», a-t-il ajouté dans ce message envoyé alors que Justin Trudeau et François Legault étaient au-dessus de l’Atlantique, en route vers le sommet de la Francophonie.

Aucune rencontre avec Michaëlle Jean ne figurait à l’agenda du chef de la Coalition avenir Québec (CAQ) au moment de publier ces lignes, tard mercredi soir, heure d’Erevan. Son entourage a signalé que les deux n’avaient pas eu de discussion depuis que le chef caquiste a publié mardi un tweet dans lequel il annonçait qu’il ne pouvait appuyer la candidature de l’ex-journaliste.

L’élection au poste de secrétaire général de l’OIF se fait traditionnellement par consensus et non par vote. Au gouvernement Trudeau, on avait dernièrement tenté de convaincre la candidate que ses chances étaient pratiquement nulles contre sa rivale Louise Mushikiwabo, ministre rwandaise des Affaires étrangères, qui est appuyée par la France et l’Union africaine (UA), mais en vain.

Les représentants des 84 États et gouvernements membres de l’OIF réunis pour ce XVIIe sommet pourraient bien forcer la tenue d’un vote. Dans une telle éventualité, combien d’appuis l’ancienne journaliste pourrait-elle alors décrocher? «Impossible à dire à ce stade», s’est contenté d’offrir Bertin Leblanc.

Si elle s’incline, Michaëlle Jean aura été la secrétaire générale au règne le plus court à la barre de l’organisation. Ses prédécesseurs, Abdou Diouf et Boutros Boutros-Ghali, sont tous deux demeurés aux commandes de la Francophonie pendant plus d’une décennie. Le poste de secrétaire général de l’organisation fondée en 1970 a été créé en 1997.

Rencontre Legault-Kagame

Le tout premier dirigeant qu’a rencontré François Legault à son baptême sur la scène internationale est le controversé président rwandais Paul Kagame, qui fait l’objet de nouvelles allégations entourant son implication dans le génocide de 1994. Le chef caquiste a eu un entretien avec lui dans un hôtel d’Erevan tard mercredi soir, quelques heures à peine après être arrivé sur place.

Peu avant de s’envoler vers l’Arménie, le chef de la CAQ s’était tourné vers Twitter pour faire part de son intention d’appuyer «une candidature provenant de ce continent (l’Afrique)», disant vouloir endosser une personne susceptible de faire la promotion de la langue française et de «la gouvernance démocratique».

Or, le président du Rwanda, qui occupe actuellement la présidence tournante de l’Union africaine, n’est pas exactement un modèle en cette matière, selon des organisations humanitaires qui l’ont accusé d’avoir réprimé les droits de ses concitoyens, en particulier lors du dernier scrutin de 2017, qu’il a remporté avec près de 99 pour cent des voix.

Qui plus est, le Globe and Mail faisait état dans son édition de mardi de nouvelles preuves voulant que les forces pro-Kagame auraient été impliquées dans l’attentat qui a marqué le déclenchement du génocide rwandais de 1994. Ce n’est pas la première fois que des allégations sur un rôle présumé du président font surface.

La rencontre entre les deux hommes a duré une bonne trentaine de minutes. Se trouvaient aussi dans la suite d’un hôtel du centre-ville de la capitale arménienne la candidate Mushikiwabo ainsi que Line Beauchamp, déléguée générale du Québec à Paris. À l’issue de l’entretien, François Legault a exprimé ses meilleurs voeux de succès à la Rwandaise. «Bonne chance», a-t-il dit à son intention.

Élu le 1er octobre dernier, le leader caquiste réalise avec ce déplacement en sol arménien ses premiers pas sur la scène internationale. Il doit profiter de son passage pour rencontrer d’autres chefs d’États et de gouvernements. Une première rencontre officielle avec Justin Trudeau aura lieu tôt jeudi matin.

Les deux chefs ont cependant déjà eu une conversation en vol, pendant la portion Glasgow-Erevan de leur voyage. D’après l’entourage de M. Legault, ils ont discuté pendant environ 20 minutes de sujets allant du «nouveau modèle d’immigration» à l’économie en passant par l’épineuse question du port des signes religieux.

Accueil à la Francophonie… en anglais

Lorsque les deux dirigeants sont descendus de l’avion, chacun leur tour, ils ont chacun eu droit à un comité d’accueil. Ironiquement, sur le tarmac de l’aéroport international Zvartnots, le ministre des Affaires étrangères du pays hôte du sommet de l’OIF, Zohrab Mnatsakanyan, a échangé avec Justin Trudeau… dans la langue de Shakespeare.

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