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Pétrole: les investissements en hausse, les environnementalistes inquiets

Alors que les appels à l’action climatique se multiplient, l’industrie pétrolière se réjouit devant des prévisions qui laissent entrevoir une hausse des investissements dans ce secteur en 2020. Une situation qui soulève l’ire de groupes environnementaux.

L’Association canadienne des producteurs pétroliers (ACPP) a publié jeudi ses prévisions annuelles concernant les investissements dans le secteur pétrolier et gazier du pays. Après avoir connu une baisse importante au cours des dernières années, un soubresaut est attendu en 2020. L’ACPP s’attend à une hausse de 2 G$ des investissements dans ce secteur cette année par rapport à 2019.

Ainsi, l’organisation, qui sert de lobby de l’industrie pétrolière auprès d’Ottawa, s’attend à des investissements totaux de 37 G$ cette année dans le secteur du pétrole et du gaz naturel. Cela représenterait une augmentation de près de 6% par rapport à 2019.

On est toutefois loin des sommets atteints il y a quelques années. En 2014, les investissements dans ce secteur s’étaient élevés à 81 G$, avant de chuter dans les années suivantes.

Baisses d’impôts en Alberta

Tim McMillan, président et directeur général de l’ACPP, crédite en partie la réduction de l’impôt aux entreprises accordée par le gouvernement de l’Alberta.

«Ça reflète le travail et la détermination déployés sur plusieurs fronts pour amener l’industrie [pétrolière et gazière] dans une position plus compétitive. Cela comprend la réduction de l’impôt des entreprises mise en place par le gouvernement de l’Alberta, ainsi que les incitations pour le transport du pétrole brut par train, ce qui aide à attirer les entreprises et les investissements», écrit-il dans un communiqué émis jeudi.

La hausse anticipée des investissements dans ce secteur cette année est aussi attribuable aux différents oléoducs en voie de prendre forme pour exporter le pétrole de l’Ouest, notamment la Ligne 3 d’Enbridge et le projet Keystone XL, qui a récemment reçu l’appui du président américain Donald Trump. C’est d’ailleurs dans le secteur des sables bitumineux, situés principalement en Alberta, que l’ACPP prévoit la plus grande hausse des investissements en 2020.

Protection de l’environnement

«C’est plus que décevant. On est dans une situation où il faut réduire les émissions de gaz à effet de serre de 50% en 10 ans. Or, leur vision, c’est qu’il faut continuer à augmenter les émissions à l’infini», déplore le directeur général pour le Québec de la Fondation David Suzuki, Karel Mayrand, en entrevue à Métro.

Même son de cloche du côté de Patrick Bonin, responsable de la campagne Climat-Énergie de Greenpeace.

«Le gouvernement canadien s’est engagé à être carboneutre en 2050, donc ça va nécessiter de réduire les émissions. Le secteur pétrolier et gazier, c’est le principal secteur d’où proviennent les émissions de gaz à effet de serre», soulève-t-il.

«Tant qu’on n’aura pas un gouvernement qui met des limites à l’industrie [pétrolière], elle va continuer son expansion.» -Patrick Bonin, responsable de la campagne Climat-Énergie pour Greenpeace

«Manque de cohérence» du gouvernement Trudeau

En septembre dernier, des centaines de milliers de personnes, dont le premier ministre Justin Trudeau, ont pris part à une grande marche pour le climat à Montréal, propulsée par la militante suédoise Greta Thunberg.

«Là où c’est problématique, c’est que le Canada est dans la demi-mesure. On veut lutter contre les changements climatiques, mais on continue d’investir dans des projets pétroliers», déplore M. Bonin.

Ce dernier souligne le manque de cohérence du gouvernement Trudeau qui, tout en promettant de planter deux milliards d’arbres d’ici 10 ans, investit des milliards pour permettre l’élargissement du pipeline Trans Mountain. Une décision qui a été critiquée à maintes reprises par plusieurs écologistes et communautés autochtones.

Face à cette situation, Karel Mayrand presse Ottawa de «trouver une alternative à l’économie de l’Alberta» qui, tout comme celle de la Saskatchewan, dépend en bonne partie de l’industrie pétrolière et gazière.

Interpellé par Métro, le cabinet du ministre de l’Environnement et du Changement climatique, Jonathan Wilkinson, a souligné les différentes mesures mises en place par Ottawa pour réduire les émissions de gaz à effet de serre du pays, notamment celle d’imposer une taxe sur le carbone afin de «mettre un prix sur la pollution».

Il a toutefois reconnu par courriel «qu’il reste encore beaucoup à faire» afin qu’Ottawa atteigne les cibles qu’il s’est fixé dans sa lutte contre les changements climatiques.

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