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Les mesures sanitaires désavantagent les femmes

Les femmes s’occupent principalement des tâches parentales.
Les femmes s’occupent principalement des tâches parentales. Photo: 123 RF

Les femmes sont celles qui accomplissent principalement les tâches parentales à l’intérieur de leur ménage pendant la pandémie, y compris l’enseignement à domicile, selon une récente étude de Statistique Canada. Selon plusieurs experts, cela contribue à creuser le fossé égalitaire entre les hommes et les femmes.

Les mesures sanitaires ont contribué à exacerber les inégalités entre les hommes et les femmes, avance la professeure au département de sociologie de l’Université du Québec à Montréal (UQAM), Catherine Des Rivière-Pigeon. «C’est bien documenté maintenant pour la première partie du confinement, et il n’y a pas de raison que ça ne soit pas le cas pour la deuxième partie. Pendant la crise, toutes les mesures ont eu des impacts beaucoup plus difficiles à vivre en moyenne pour les femmes et les personnes défavorisées socioéconomiquement», mentionne-t-elle.

La pandémie a demandé une réorganisation des espaces de travail, des activités des enfants et de la gestion domestique. «Cette réorganisation a été mise en place principalement par les femmes. La seule solution aux problèmes organisationnels était de donner plus de son temps comme pour l’école à la maison et c’est le temps des femmes qui a été mis à disposition de la famille», soulève Chiara Piazzesi, professeure au département de sociologie à l’UQAM et membre du Réseau québécois en études féministes (RéQEF).

«Ce qui me préoccupe, c’est que ça n’a pas l’air de préoccuper beaucoup de gens. Il ne faut pas que ces enjeux d’inégalités, parce qu’il y a une crise sanitaire, disparaissent sous le tapis.» -Catherine Des Rivières-Pigeon

Progrès

Les spécialistes s’entendent pour dire que même si on remarque depuis plusieurs années un progrès face à l’égalité homme-femme, il reste encore du chemin à faire. «Même en temps normaux, même dans des familles qui se disent “égalitaires”, les femmes sont majoritairement responsables de la charge mentale de l’organisation familiale et de l’arrimage entre travail professionnel et travail ménager ou de soin», explique Mme Piazzesi.

Par ailleurs, les résultats de l’étude montrent que les partages des tâches parentales au sein du couple étaient mieux répartis lorsque les hommes travaillaient à domicile. «C’est une chose de faire le travail domestique, et c’en est une autre que d’être responsable du travail domestique», nuance Mme Des Rivières-Pigeon.

Par exemple, lorsque vient le temps de préparer le souper, «le conjoint [peut aider], mais c’est surtout la femme qui en a la responsabilité. C’est souvent ce qu’on retrouve dans le partage du travail domestique», explique l’experte.

Des mesures égalitaires?

Les effets des mesures sanitaires ou d’aides en lien avec la crise ne sont pas les mêmes pour tous, soutient Mme Des Rivières-Pigeon. «Même si ç’a l’air d’être des mesures équitables, elles sont inéquitables, dit-elle. [Certaines mesures] ciblent les femmes parce que dans les faits, on sait très bien que ce sont elles qui vont avoir à gérer le surtravail qui doit être fait en plus de leur emploi qu’elles ont à faire en télétravail.»

Sa collègue va dans le même sens. «Ce nouveau rôle ne va pas s’estomper si on oblige les familles à prendre en charge les aspects de la vie pour lesquels nous avions en place des services, à commencer par les services de garde», souligne Mme Piazzesi.

La solution serait de penser en amont des mesures et quelles seront les conséquences pour les hommes et les femmes.

«Il y a une analyse différenciée selon les sexes qui doit se faire lorsqu’une loi est promue. Concernant la pandémie, cette analyse ne semble pas avoir été faite» – Catherine Des Rivières-Pigeon

Elle dit comprendre que le gouvernement a agi dans l’urgence. Toutefois, elle croit nécessaire la réflexion sur le prix à payer pour les mesures instaurées afin que les choix désavantagent moins les femmes.

C’est par un processus de socialisation que les femmes deviennent les spécialistes des tâches parentales et domestiques. Il est plus difficile pour quelqu’un qui n’est pas socialisé comme cela de s’en occuper. Ainsi, la petite fille qui joue à la poupée est en train de développer une compétence en ce qui a trait à prendre soin des enfants, estime Mme Des Rivières-Pigeon.

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