La course au leadership du NPD se termine
OTTAWA – Aux premiers instants de la course pour succéder à Jack Layton, le candidat de l’establishment du parti Brian Topp semblait bien en selle pour arriver premier à la ligne d’arrivée. Cela tombait bien pour l’équipe de Thomas Mulcair: c’est justement ce qu’elle voulait.
La campagne du député d’Outremont a commencé doucement, après quelques semaines d’hésitation de la part du principal intéressé. Dans le camp Mulcair, on voulait éviter qu’il soit perçu comme le meneur de la course dès le début. On préférait être la tortue de la fable, en quelque sorte.
Après avoir jaugé ses appuis, l’ancien ministre québécois a conclu qu’il pouvait l’emporter. D’autres candidats ont fait le pari de se lancer dans la course malgré un manque d’appuis, afin de se faire voir et de gagner en notoriété. Ce n’est pas le cas de Thomas Mulcair. Il voulait jouer pour gagner.
La course au leadership du Nouveau Parti démocratique (NPD) arrive à son point culminant ce week-end, alors qu’environ 3000 militants néo-démocrates convergeront à Toronto pour élire leur nouveau chef. Les quelques 131 000 détenteurs d’une carte de membre du parti devront déterminer qui, entre Niki Ashton, Nathan Cullen, Paul Dewar, Thomas Mulcair, Peggy Nash, Martin Singh et Brian Topp, sera le mieux placé pour affronter Stephen Harper aux prochaines élections.
M. Mulcair devance désormais les six autres candidats, mais il n’aura sans doute pas les 50 pour cent du vote requis pour l’emporter dès le premier tour. Et une fois que les alliances et les deuxièmes choix entrent en scène, tout peut arriver. Demandez-le aux libéraux, qui ont vu Stéphane Dion se faufiler entre les favoris Michael Ignatieff et Bob Rae en 2006.
La course a été longue depuis le décès inattendu de Jack Layton le 22 août 2011. Beaucoup l’ont également qualifiée d’ennuyeuse; sans déchirement, sans coup d’éclat, sans différences frappantes émanant des sept candidats.
L’avantage d’une course ennuyeuse pour un parti, c’est quelle ne fait par trop de ravages à son unité. Elle a cependant fait des ravages à sa popularité. Car depuis le début de l’automne, le NPD a dégringolé dans les intentions de vote. Le nouveau leader aura comme principal défi de regagner le coeur des Canadiens, et surtout des Québécois, sans qui le NPD ne serait pas l’opposition officielle aux Communes depuis le 2 mai 2011.
La fin de la course s’est toutefois corsée, avec la sortie d’Ed Broadbent contre Thomas Mulcair. L’ex-leader néo-démocrate, qui appuie Brian Topp, s’est attaqué à la personnalité du député d’Outremont, trop polarisante à son goût, ainsi qu’à ses idées, trop centristes. Si un mouvement du style «n’importe qui sauf Mulcair» se consolidait, l’ancien ministre du cabinet Charest pourrait voir la victoire lui glisser entre les doigts.
Mais peu importe qui remportera la course, le caucus se rangera derrière son nouveau chef, selon la chef intérimaire Nycole Turmel, qui a tenu le fort depuis le départ de Jack Layton. «Il y a un engagement de la part de tout le monde», a-t-elle assuré lors de sa toute dernière conférence de presse, mercredi à Ottawa.
Elle a concédé cependant qu’une période plus houleuse pouvait poindre à l’horizon. «Il y a toujours un danger, quand tu as une nouvelle direction, une nouvelle vision, de diviser. Ça, il faut l’admettre, il faut le reconnaître.»
Jour du scrutin
Il est difficile de prévoir qui prendra les rennes du parti et deviendra de facto chef de l’opposition au Parlement compte tenu de la structure du vote choisie au NPD. Quelque 131 000 membres sont appelés à faire leur choix selon le principe «un membre, un vote».
En date de mercredi, 43 000 militants avaient déjà voté par anticipation, par la poste ou Internet, en dressant leur liste de candidats par ordre de préférence. Ces électeurs qui votent à l’avance – ils ont jusqu’à vendredi matin pour le faire – scellent en quelque sorte leur vote. Leur premier choix sera comptabilisé tant et aussi longtemps que leur candidat favori est dans la course. S’il perd, on se rapporte alors à leur deuxième choix, et ainsi de suite.
Les militants peuvent également voter sur place ou sur le web en temps réel. À chaque tour de scrutin, le candidat qui possède le moins de voix est éliminé. Les partisans du perdant sont alors libres de se tourner vers un autre candidat, jusqu’à ce que quelqu’un obtienne plus de 50 pour cent des voix.
Le premier tour de scrutin débute dès vendredi en fin de journée et l’on en connaîtra les résultats samedi à 10h. Un délai d’environ 90 minutes est prévu entre chacun des tours.
Il y a fort à parier qu’au moins une seconde ronde sera nécessaire pour déterminer le gagnant. Cela ajoutera sans contredit du suspense et du piquant au Congrès torontois.
Si MM. Mulcair et Topp semblent en bonne position pour l’emporter – ce sont d’ailleurs ceux qui ont levé le plus de fonds – d’autres candidats pourraient créer la surprise. Le député de la Colombie-Britannique Nathan Cullen, seul candidat à avoir suggéré un rapprochement avec le Parti libéral du Canada (PLC), pourrait tirer son épingle du jeu en ralliant les partisans d’une union de la gauche et du centre-gauche.
Les Ontariens Peggy Nash et Paul Dewar, qui ont connu de bons départs, semblent s’être essoufflés en fin de campagne, mais pourraient briller si de multiples tours s’avéraient nécessaires. La jeune députée manitobaine Niki Ashton et le pharmacien de la Nouvelle-Écosse Martin Singh paraissent quant à eux fermer la marche, les deux candidats n’étant pas parvenus à récolter des appuis flamboyants comme leurs rivaux ou à amasser des sommes significatives.