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Duffy: des acteurs-clé de la campagne au courant

Jennifer Ditchburn et Kristy Kirkup - La Presse Canadienne

OTTAWA – Des membres hauts placés de l’équipe de campagne du premier ministre Stephen Harper, incluant l’employé principal actuellement au bureau du premier ministre, étaient parmi ceux qui savaient en 2013 que le sénateur Mike Duffy n’avait pas remboursé ses comptes de dépenses contestés.

Mais ce cercle de conseillers clés sont restés muets, même lorsque les ministres du cabinet ont déclaré à la Chambre des communes que Mike Duffy avait «fait preuve de leadership» et que le chef de cabinet Nigel Wright «était le seul qui était impliqué».

Ray Novak, l’actuel chef de cabinet de Stephen Harper, s’était fait dire que son prédécesseur, Nigel Wright, se préparait à rembourser 90 000 $ au Sénat pour M. Duffy.

Parmi ceux qui sont près de Stephen Harper, M. Novak est celui qui est là depuis le plus longtemps et celui qui est le plus près de lui.

«Je crois que son approche a fonctionné», a écrit M. Wright à M. Novak et à l’avocat du bureau du premier ministre, Benjamin Perrin, le 23 mars 2013, au sujet d’une conversation qu’il avait eue avec l’avocate de M. Duffy. «Je vais envoyer mon chèque lundi».

Ce courriel a été déposé en preuve à la cour, jeudi, lors du second jour du témoignage de Nigel Wright au procès criminel de Mike Duffy. Le sénateur a plaidé non coupable à 31 chefs d’accusations pour fraude, corruption et abus de confiance.

L’avocat de M. Duffy, Donald Bayne, s’est lancé dans un examen méthodique des déclarations de Nigel Wright faites à la police, en plus des courriels qu’il a échangés avec son client et d’autres personnes au sein du bureau du premier ministre et au Sénat.

Il y a eu des échanges acerbes entre Me Bayne et M. Wright alors que les deux hommes ont laissé paraître des moments de frustration ou d’irritation.

M. Bayne tente de démontrer que c’est M. Wright et son équipe — et non pas M. Duffy — qui avaient concocté le plan selon lequel le sénateur devait dire publiquement qu’il avait réclamé des allocations de logement par erreur pour sa maison de la région d’Ottawa.

L’avocat tente aussi d’établir que c’est M. Wright qui a poussé le sénateur Mike Duffy à dire publiquement qu’il avait remboursé ses dépenses.

«Je croyais qu’il était préférable, vraiment préférable pour le sénateur Duffy que les gens croient qu’il avait remboursé», a dit M. Wright en cour.

«Vous pouviez prendre cette décision pour lui, même s’il ne voulait pas prendre part à cela?», a demandé Me Bayne.

«Je n’ai pas pris cette décision pour lui», a répliqué M. Wright. «Je croyais que la chose importante était que les dépenses soient (…) remboursées». Il a toutefois dit qu’il avait été «persistant» et que M. Duffy avait finalement accepté.

Les courriels qui ont été déposés par M. Bayne contiennent beaucoup d’indications montrant à quel point un vaste cercle de conseillers étaient au courant du plan de remboursement des dépenses de M. Duffy.

M. Novak, qui voyage actuellement aux côtés du premier ministre pour la campagne, n’a pas donné suite à une requête envoyée au porte-parole du Parti conservateur, Kory Teneyke.

Lors d’un arrêt de sa campagne électorale jeudi à Regina, Stephen Harper a maintenu qu’il était aussi préoccupé par l’utilisation des fonds publics.

«Comme je l’ai déjà dit, quand cela est venu à mon attention, ma préoccupation dans toute cette affaire était que M. Duffy avait fait un usage des fonds publics d’une façon qui ne pouvait être justifiée», a dit M. Harper.

«Qu’il ait respecté ou non les règles, il avait fait des réclamations de dépenses qui n’étaient pas de réelles dépenses et j’ai dit à de multiples reprises que je ne pouvais justifier de payer pour des dépenses qui n’avaient pas réellement été engagées.»

M. Harper a déclaré qu’il s’était alors fait dire que M. Duffy allait rembourser ces dépenses et qu’il allait «expliquer sa version de l’histoire à ce sujet». «Et, à ma connaissance, c’était exactement ce qu’il a fait jusqu’à ce que je découvre que ce n’était pas le cas», a-t-il ajouté.

Plus tôt jeudi, Nigel Wright a déclaré qu’il tentait de faire «une bonne action» lorsqu’il a fait part en privé, au directeur de la gestion des enjeux du premier ministre, de sa décision de donner 90 000 $ à Mike Duffy.

M. Wright, un homme profondément religieux, a affirmé à la cour qu’il suivait les conseils d’un passage de la Bible qui suggère la «droiture morale», mais qui avise de ne pas le faire devant les autres pour s’autoglorifier.

«C’est en quelque sorte Matthieu 6, non?», a-t-il témoigné, citant les Saintes Écritures. «Vous devez faire ce genre de choses discrètement et « vous assurer que votre main gauche ne sache pas ce que votre main droite fait ».»

M. Wright a soutenu qu’il avait décidé de donner l’argent à M. Duffy «un jour ou deux» après que le sénateur conservateur Irving Gerstein eût indiqué que le plan original — qui prévoyait que le parti rembourse les dépenses discutables du sénateur, alors que tous croyaient que le total était de 32 000 $ — ne tenait plus maintenant que la facture avait presque triplé.

«J’en suis venu à cette décision, je crois, un jour ou deux après que j’aie compris que le fonds conservateur ne paierait pas», a raconté M. Wright.

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