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Éric Lapointe sans compromis

Photo: Satya Jack

Entouré d’une nouvelle équipe de collaborateurs qui apportent un vent de fraîcheur à son univers, Éric Lapointe lance ces jours-ci son huitième album, Délivrance. Un disque sans compromis.

Nous devions nous rencontrer dans un resto de l’avenue du Mont-Royal. Texto: «Viens donc chez nous à la place, je te paie le taxi.» C’est que Lapointe est plus casanier qu’au temps pas si lointain des longues nuits écartelées qui commençaient souvent dans un resto.

Rendu dans l’antre du rocker, on descend dans son studio, histoire de jaser de cet album qu’il vient de terminer, comme d’autres courent un marathon de nuit. Une photo de Roger Tabra orne le studio. Choc, car le parolier qui a donné le ton au discours de Lapointe était un ami commun et la dernière fois qu’on s’est vus, c’était dans ce même studio maison pour un documentaire (Le prix de la liberté).

On se parle de la vie, le rocker devant moi et la photo de Roger derrière: «Tabra guette, mes p’tits criss.» Puis on cause de ce dernier disque qui, entre des super ballades comme la berceuse Sans vous écrite par Luc De Larochellière et la country La guerre a perdu dont la musique est signée Zachary Richard, dénote chez Lapointe un son plus rock, plus brut, de l’époque charnière d’Inviter les vautours (1996). «À mes débuts, ça me coûtait plus cher pour jouer que ce que les gens déboursaient pour nous voir. On arrivait de nulle part et on avait déjà une grosse scène, comme un band qui roule depuis longtemps. J’ai toujours pensé au show et je ne l’ai jamais regretté. C’est probablement pour cela qu’on est en tournée depuis 25 ans! Et effectivement, sur cet album, on revient avec un son plus band, parce qu’on a d’abord pensé au show. Le disque commence avec La nuit, la toune qui va ouvrir le spectacle, tandis que Sans vous, qui ferme l’album, sera la pièce du dernier rappel», explique Lapointe pendant que sa blonde, Rosalie, à qui Lapointe a consacré la chanson Ma rose, vient me servir un Coke.

«Je ne suis pas du genre ésotérique, mais en une seule nuit, nous avons monté deux chansons sur des textes de Roger [Tabra]. C’est la première fois que ça m’arrivait de produire deux pièces en si peu de temps. Au petit matin, lorsqu’un de nos musiciens a appris cela en arrivant, il nous a fait remarquer que ça faisait exactement deux ans, cette nuit-là, que Roger était décédé.» – Éric Lapointe

Plus serein que jamais dans cette relation amoureuse, Lapointe est volubile et ne nie pas que sous ses airs de rockeur se cache un papa au cœur tendre qui chante des berceuses à ses deux fils, lorsqu’ils sont avec lui au cours de sa semaine de garde. C’est d’ailleurs en raison du succès qu’elle a dans ce rituel quotidien que Lapointe a décidé d’ajouter Le p’tit bonheur, de Félix Leclerc. Une des premières chansons qu’il a apprise à la guitare. Il y a aussi un autre grand disparu sur l’album, Johnny Halliday, dont il reprend L’envie, après avoir popularisé chez nous la pièce Ma gueule (sur une suggestion de votre serviteur, en 1999). «Je me considère comme extrêmement chanceux d’avoir côtoyé ce gars-là et, surtout, d’avoir chanté avec lui sur scène. Ça m’a permis de comprendre pourquoi c’était un monstre sacré. Autant il était timide dans la vie et regardait par terre comme s’il n’avait pas confiance en lui, autant son aura se déployait sur l’ensemble du stage, lorsqu’il y montait. Avec lui, j’ai probablement fait le duo le plus intense de ma vie. Franco [Nuovo] m’a envoyé un extrait d’entrevue où Johnny dit: “Éric Lapointe a repris Ma gueule: toutes les fois que je la chante, je pense à lui.” Je vais probablement inclure cet extrait dans mon show avant de la chanter.»

Et Tabra, qui était un fan fini de Johnny, se retournera dans sa tombe. Pour mieux triper.

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