Internal ou le plus étrange des blind dates
En entrevue avec Métro, Martin Durocher ne manquait pas de superlatifs pour qualifier Internal, de la troupe de théâtre belge Ontroerend Goed. «C’est l’expérience la plus fuckée de ma vie», nous avait dit le directeur de la programmation francophone du Festival Juste pour rire.
Après avoir nous-même goûté à la médecine du collectif flamand, nous sommes enclin à partager son enthousiasme. À mi-chemin entre une séance de speed-dating et une thérapie de groupe, Internal réunit 5 acteurs et 5 spectateurs pendant près de 25 minutes. Oubliez le théâtre conventionnel et sa notion du quatrième mur; ici, aucun écran imaginaire ne sépare les comédiens du public. On s’en rend compte dès les premiers instants de la représentation, lorsque l’épais rideau noir auquel on fait face se lève d’un trait. À quelques centimètres de notre visage se trouve une jeune femme, les yeux braqués sur nous, dans le silence total. À côté d’elle, ses collègues font de même avec les quatre personnes qui nous accompagnent Malaise. Gêne. Intense.
Ce petit manège dure quelques secondes (qui nous paraissent une éternité, tellement la situation est inconfortable). Plus le temps passe, plus on se dit qu’on aurait préféré passer une soirée pénard affalé devant la télévision… Incapable de supporter ce regard hyper pénétrant, on pense à rebrousser chemin jusqu’à ce qu’un comédien nous prenne par la main et nous amène dans un petit isoloir où sont disposés une table, deux chaises, une bougie et une bouteille de bordeaux.
Histoire de ne pas voler de punchs, nous n’en dirons pas plus. Sachez toutefois que l’embarras fait ensuite place à la complicité. Ouf!Car la position de voyeur habituellement adoptée par l’amateur de théâtre est mise de côté au profit d’un rôle beaucoup plus actif. Soyez prêts à établir une connexion quasi instantanée avec votre interlocuteur. En moins de deux minutes, vous vous surprendrez à lui révéler vos secrets les plus intimes, des choses dont vous avez l’habitude de parler lors d’un souper bien arrosé entre amis. On a beau se répéter qu’on a devant soi un groupe d’acteurs professionnels, on se laisse facilement prendre à ce jeu de séduction.
Étude sociologique ou manipulation émotive? On délibère encore. Chose certaine, Internal alimente les conversations. Au sortir de la salle, vous aurez envie de prolonger l’aventure sur une terrasse, entouré des quatre autres spectateurs avec qui vous avez partagé ce curieux et mémorable moment. C’est un peu ce qui nous est arrivé, hier soir, mais nous avons dû couper court à cet échange pour aller écrire cet article. Résultat : nous mourons d’envie d’en parler davantage, mais nous n’avons personne vers qui nous tourner… À moins que vous soyez l’un des 900 chanceux qui auront l’occasion de vivre cette expérience d’ici le 31 juillet. Dans ce cas, donnez-nous un coup de fil!
Internal
Au Monument-National
Jusqu’au 31 juillet