Les «chants célestes» du patrimoine sonore du Centre-Sud
Plutôt que de se débarrasser des cloches de l’église, le compositeur et chef de chœur du Sacré-Cœur-de-Jésus les valorise en tant qu’instruments de musique.
En poste depuis 23 ans, André Pappathomas ne pouvait se résoudre à la perte des cloches paroissiales lorsqu’à l’hiver 2020, l’archevêque du diocèse de Montréal a donné son accord pour la démolition du clocher de l’église du Sacré-Cœur-de-Jésus, dans le quartier Centre-Sud, à la suite d’une infiltration d’eau.
Il s’est alors donné une mission: préserver les cloches et développer un répertoire spécifique à ces instruments de musique. La solution? Installer les cloches dans la nef de l’église – une première mondiale, selon le campanologue Michel Rowan – pour y organiser des concerts et des résidences de création.
André Pappathomas a dû faire des pieds et des mains pour convaincre l’archevêché d’installer à l’intérieur même de l’édifice les cinq cloches de l’église.
«Ç’a été assez étonnant pour [l’archevêché] de se faire proposer que les cloches entrent dans l’église, raconte le compositeur à Métro. Le plancher doit les supporter et ce n’est pas évident à faire entrer.»
Un chant céleste
Cinq cloches pour un seul clocher est «assez commun», soutient André Pappathomas, qui précise que plusieurs églises en ont trois ou un autre nombre généralement impair, ce qui permet de créer un son atonal.
«C’est comme une proposition d’un chant céleste qui, dans l’oreille de l’auditeur de la volée de cloches, ne réfère à rien de connu. Il y a quelque chose d’inconnu; il y a un mystère qui s’élève dans le ciel.»
Ainsi, la volonté d’André Pappathomas n’est pas que de préserver le patrimoine religieux de l’église du Sacré-Cœur-de-Jésus, mais également le patrimoine sonore émanant de ces cloches.
On protège très mal notre passé et notre patrimoine historique de toute forme.
André Pappathomas, compositeur et chef de chœur de l’église Sacré-Cœur-de-Jésus
Au-delà de la préservation de ces cloches, André Pappathomas souhaite en faire des instruments de concert, puisque celles-ci peuvent faire un éventail de sons qu’on n’entend pas lors de leur utilisation habituelle.
Une série de trois concerts en novembre est donc le deuxième volet de ce projet. Des concerts qui ne se limitent pas aux cloches elles-mêmes, puisque des instruments y sont ajoutés, sans compter l’utilisation de l’orgue de l’église.
Passer la main
Une fois ces concerts terminés, André Pappathomas souhaite passer la main, quoiqu’il ne sera pas bien loin. À partir de l’hiver 2023, des résidences à l’église seront offertes aux compositeur.rice.s pour la conception d’œuvres pour cinq grandes cloches.
«Il faut que je laisse la place à des jeunes ou moins jeunes compositeurs pour qu’ils puissent travailler sur les cloches et composer à partir d’elles», dit-il.
Il est d’ailleurs encore possible de déposer un projet en écrivant à apappathomas@gmail.com.
Les concerts seront présentés les 18 et 19 novembre prochains à 19h30 ainsi que le 20 novembre à 15h à l’église du Sacré-Cœur-de-Jésus, située à l’intersection des rues Ontario Est et Plessis.