Le «Gong Show» pour la relève en humour
Depuis un peu plus d’un an, des centaines de jeunes humoristes, souvent avec peu d’expérience, foulent les planches du Bordel Comédie Club dans le cadre du Gong Show, le projet d’open-mic des humoristes Charles Deschamps et Antoni Remillard qui agissent à titre de juges.
Le concept est simple : les humoristes doivent faire un numéro de trois minutes qui peut être interrompu à tout moment par les juges, rejoints par un.e invité.e à chaque épisode, s’ils trouvent que le numéro n’est pas à la hauteur. S’ensuivent des félicitations, des conseils, des questions ou des moqueries, toujours dans le rire et la bienveillance.
Car au Gong Show, on peut voir des humoristes se faire acclamer comme on peut en voir se planter solide. C’est ce qui fait le charme du spectacle, diffusé par la suite sur YouTube, Spotify et Patreon, notamment.
L’idée
L’idée est venue à Charles Deschamps lors d’une discussion de fin de soirée avec un collègue humoriste, Anas Hassouna, qui lui disait qu’il était difficile de laisser une chance à des humoristes sans connaître leur calibre.
Alors que Charles était au Mexique à écrire des textes comiques pour une téléréalité, un contrat dont il avait marre, il a confié à son ami Antoni Remillard avoir envie de lancer un projet de gang qui pourrait faire rayonner l’humour.
Dès son retour, les deux amis ont lancé le projet.
« On est deux gars qui trippent sur le stand-up qui veulent donner une chance a du monde d’en vivre », résume Antoni en entrevue avec Métro, assis exactement au même tabouret du Bordel où il juge de 10 à 14 humoristes chaque mercredi soir.
Un spectacle authentique
Charles Deschamps se dit très fier du Gong Show, particulièrement pour son côté authentique qu’il ne retrouve pas à la télévision.
« Le stand-up doit être proche de la réalité. Depuis qu’on le voit à la télé, il y a des stylistes, du montage, des textes vérifiés par les producteurs, c’est fake. Nous, on n’a aucun montage, même si l’humoriste se plante, même si nos gags à nous tombent à plat. »
Et si un humoriste échoue à faire rire au Gong Show, ce n’est pas grave. De toute façon, il n’y a rien à gagner; les humoristes sont payé.e.s, que leur numéro provoque des rires ou pas.
« Il y en a qui ont manqué leur coup, sont revenus et se sont fait acclamer », raconte Charles.
Un beau tremplin
Dire qu’il n’y a rien à gagner, ce n’est pas tout à fait vrai. Le Gong Show offre aux humoristes émergent.e.s une captation de leur numéro et de la visibilité. Les épisodes récoltent en moyenne de 20 000 à 50 000 vues et certains extraits explosent sur TikTok, le plus populaire ayant atteint les 2,3 millions de vues.
Le spectacle permet aussi aux humoristes qui s’y aventurent de créer des relations. Certain.e.s humoristes ont ainsi fait des premières parties de juges invité.e.s, tandis que d’autres sont maintenant ami.e.s avec Charles et Antoni, qui en ont pris certain.e.s sous leurs ailes pour les aider à écrire. Même entre participant.e.s, des amitiés sont nées. Une nouvelle communauté d’humoristes se crée.
Certaines pépites aussi ont pu être découvertes. Charles et Antoni évoquent des noms comme Alex Harrison, Jean-Philippe Ringuet, Lauriane Lalonde ou Cédric Bergeron qui les ont vraiment impressionnés et qui ont maintenant leur propre bassin de fans.
« Des gens se font reconnaitre dans la rue à cause de ça. Un s’est même sauvé d’un ticket », raconte Charles en riant.
Une belle communauté de fans
Visiblement, le projet du Gong Show a pris plus d’envergure que ce à quoi ses fondateurs s’attendaient.
« Ce devait être un side project, mais c’est devenu plus gros que toutes nos autres affaires. Maintenant, on doit embaucher du monde. On est rendu des businessmen, même si à la base, on voulait juste prendre une bière le mercredi soir et écouter des humoristes », rigole Charles.
Et les deux humoristes sont très contents de la communauté de fans qu’ils ont acquise. « Au début, notre crainte était que les gens soient haineux sur Internet et tombent dans l’intimidation, mais le public qu’on est allé chercher est respectueux, il comprend le niveau », se réjouit Antoni.
Des bons conseillers
Charles et Antoni sont diplômés de l’École nationale de l’humour (ENH) depuis neuf et huit ans, respectivement. Les deux ont un fort côté pédagogue: Charles donne maintenant un cours à l’ENH et Antoni a occupé plusieurs emplois en enseignement dans sa vie. Ils estiment ainsi être en mesure de donner des conseils pertinents à la relève, d’autant plus qu’ils sont eux-mêmes très actifs, jouant sur scène souvent six jours par semaine.
« De toute façon, ce qui est beau dans ce milieu, c’est qu’on peut se donner des conseils, peu importe notre statut. Si Louis-Josée Houde vient tester une blague devant moi, je peux lui donner des idées et il va les écouter », avance Charles Deschamps.
Une relève inspirante
Les deux humoristes trouvent très motivant pour leur propre carrière d’humoriste de voir toute cette relève chaque semaine sur scène.
« Plus tu avances en humour, moins tu prends de risques parce que tu as trouvé ton style, croit Charles. Mais de voir des jeunes qui essaient des choses complètement différentes, ça te fait réaliser que tu ne prends plus assez de risques. Depuis que je fais le Gong Show, je travaille deux fois plus sur mon stand-up, parce que je trouve ça motivant et inspirant. »
Le Gong Show enregistrera son 100e épisode le mercredi 7 juin exceptionnellement au Club Soda pour fêter l’occasion.