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L’hiver, théâtre d’un laboratoire impromptu

Un bric-à-brac d’objets cherchant propriétaire, entassés au milieu de la scène. Les six comédiens fouinent dans ce décor éparpillé, pendant qu’une série de bouilloires alignées sifflotent en continue comme une bourrasque de vent glacial. Tel est le tableau d’ouverture du Voyage d’hiver vu par le metteur en scène Benoît Landry et la circassienne Anna Ward.

La première réplique sonne le glas. Une jeune femme s’empare d’un micro et nous lance au visage le nœud de tout ce cafouillis: une rupture amoureuse, une envie de retrouver ses choses à soi sans savoir lesquelles nous appartiennent. L’ambiance, qui pour le moment était située dans un laps de temps arrêté et étiré change alors du tout au tout pour un climat aride. Les six interprètes dépouillent la scène de ses objets.

C’est ainsi que tombent comme des flocons de neige, les uns après les autres, les 24 tableaux qui ont pris pied, au départ, dans la pièce de Schubert, constamment entre contemplation, vide et aridité.  Le tout est exploité sans appareillage ou culbutes excessives où la technique circassienne n’est qu’une technique d’expression instinctive dans ce retour aux sources sensoriel.  Les six comédiens tentent de se réapproprier les moyens pour rêver, dans l’univers solitaire et déchirant de la rupture. Les flocons tombent, mais la neige ne colle toutefois pas. La principale faiblesse réside dans le texte. Les interventions au micro de la jeune femme agissent à chaque fois comme une cassure, sans pour autant faire progresser l’intrigue.

Si le public est amené à passer par une gamme d’émotions variée, aucun des protagonistes ne semble effectuer de retour à la surface. Le laboratoire sensoriel laisse par contre place à des images incroyables et tirées du quotidien.  Une acrobate traverse la scène en enjambant quatre seaux d’eaux à moitié remplis, auxquels elle fait suivre une trajectoire en les déplaçant petit à petit, accrochés à ses orteils. Une simple bassine d’eau sert de point d’ancrage à des acrobaties tant physiques que sonores, alors que le son est amplifié. L’éclairage et la conception sonore sont d’ailleurs parfaitement équilibrés dans le spectacle et assurent une meilleure continuité que les quelques répliques éparses. On se réjouit notamment du concert de bouilloire rendu par un interprète qui s’improvise dj. Les ombres contribuent autrement à rendre les tableaux plus grands que nature.

Le Voyage d’hiver réussit à explorer la solitude et le sacré, mais ne parvient pas à faire rêver le spectateur. Néanmoins, le travail de la compagnie Nord Nord Est est définitivement à surveiller.

Le Voyage d’hiver
Jusqu’à mercredi, 20h, au théâtre l’Espace GO
Dans le cadre de Montréal complètement cirque

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